P�riscoop : BAZOOKA
Je me vois avancer...
PAR MOHAMED BOUHAMIDI
mbouhamidi2001@yahoo.fr


�Je me vois avancer dans une impasse et rien ne pointe � l�horizon. � Le correspondant d� El Watan � Relizane a recueilli cette d�claration d�une lyc�enne et il serait malvenu de relever que, justement, dans une impasse on ne peut voir l�horizon. Belle erreur de cette lyc�enne qui r�sume toute la situation du pays et vous vous posiez la question sur les motivations de la harga vous l�avez dans cette formule- choc : �Je me vois avancer dans une impasse.�
Cri du c�ur ? Cri de la vie r�volt�e par le manque d�espace et de perspective ? Cri d�une jeune fille (qui peut, tout � fait, �tre le cri d�un jeune homme) qui refuse de c�der � l�abattement ? Jugez-en par vous-m�mes. Cette phrase m�a remu� et m�a entra�n� dans le souvenir d�un texte d�Aragon expliquant, � propos de Rimbaud, comment une erreur peut construire toute la beaut� d�un po�me. Et vous pouvez recopier cette phrase, l�encadrer et la suspendre dans un coin de la maison en �cho lointain et inattendu � tous ces cris de nos jeunes de Kabylie qui clamaient : �Ils ne peuvent nous tuer, nous sommes d�j� morts� ; en �cho si proche � la devise des harragas : �Plut�t finir dans le ventre des poissons� ; en �cho r�aliste � ce film dont le titre seul aurait d� �veiller quelque conscience chez les autorit�s : �Roma wala entoumma�. Car, comment comprendre qu�� cet �ge o� on se voit d�j� m�decin, ing�nieur, pilote, romancier ou po�te, agronome ou psychologue ; cet �ge o� le bac appara�t comme le s�same vers l��ge adulte et le droit, enfin, de choisir son avenir, ses amis, son emploi du temps, les jeunes en arrivent � se sentir �avancer dans une impasse�. Plus que tout autre d�veloppement, ces cris de jeunes � puis leur passage � l�acte dans la fuite par la harga, par le terrorisme, par la drogue � signalent le travail souterrain de graves probl�mes de soci�t�, l��chec d�une transition � �conomique, sociale, culturelle, psychologique � en douceur et concert�e avec les hommes de chair et de sang de ce pays disparus du paysage mental de nos gouvernants obs�d�s par leur nouvelle religion du n�o-lib�ralisme pour laquelle la casse sociale et humaine est le prix � payer au dieu dollar et � la th�orie d�une �conomie de march� d�brid�e. Il y a loin en apparence entre la gr�ve des lyc�ens et ce dogmatisme du pouvoir : tant que des hommes, surtout des jeunes, se l�vent pour dire qu�ils existent r�ellement et ne sont pas de simples chiffres dans le calcul des b�n�fices. En m�me temps, la gr�ve et les marches des lyc�ens marquent le passage lent et difficile d�un pays qui subissait � un pays qui se d�fend. Ce n�est pas rien et si les harragas abandonnent le pays au pouvoir, les lyc�ens sont en train de le lui disputer. Quel immense progr�s dans la conscience et dans la volont� de vivre. Ici !
M. B.

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