Actualit�s : APR�S LA LA�CIT� "POSITIVE"
La m�moire s�lective de Sarkozy
De notre bureau de Paris, Khadidja Baba-Ahmed


Jusqu�o� ira Nicolas Sarkozy ? L�encha�nement des d�clarations et m�me des d�cisions que prend le locataire de l�Elys�e ne cesse de questionner. La derni�re sortie en date est l�annonce qu�il a faite mercredi dernier au d�ner annuel (le 23e) du Conseil Repr�sentatif des Institutions juives de France (Crif).
Apr�s avoir d�velopp�, � juste titre d�ailleurs, l�atrocit� de la shoah et le n�cessaire devoir de m�moire pour que nul n�oublie ces �pers�cutions effroyables�, le chef de l�Etat fran�ais a annonc� : �j�ai demand� au gouvernement et en particulier � Xavier Darcos, le ministre de l�Education, � ce que d�s la rentr�e scolaire 2008, on confie la m�moire d�un enfant victime de la shoah � chaque �l�ve de CM2�, soit aux �l�ves de 10 ans. Dans ce m�me discours, et sans que personne n�en doute ni ne le lui conteste, Nicolas Sarkozy a martel� : �Oui, c�est vrai, je suis un ami d�Isra�l et j�attache une grande importance au resserrement des liens politiques, d�amiti� et de coop�ration entre nos deux pays�.Plus encore, le pr�sident fran�ais annonce avoir d�cid� que la premi�re visite d�Etat d�un chef d�Etat �tranger soit celle du pr�sident isra�lien. Shimon Peres sera donc le premier pr�sident � effectuer une visite d�Etat en France du 10 au 14 mars et Sarkozy se rendra en Isra�l au mois de mai prochain. Et pour remercier davantage la communaut� juive de France d�avoir vot� massivement pour lui (des propres aveux de cette communaut�, la majorit� de ses voix sont all�es � Sarkozy), l�invit� du Crif a rappel� aux participants du d�ner �qu�Isra�l �tait convi�e � rejoindre la francophonie�. Au lendemain de ces d�clarations, des r�actions nombreuses se sont faites entendre. Il y a eu d�abord celles des syndicats de gauche comme de droite qui se sont �lev�s contre la nouvelle intrusion du politique � l��cole, l�instrumentalisation sur le registre de l��motion d�un drame historique aupr�s de jeunes enfants du primaire et les traumatismes qui pourraient en r�sulter. Au plan politique, mais curieusement, et en dehors des r�actions individuelles, aucun parti ne s�est encore �lev� contre cette m�moire s�lective du pr�sident fran�ais. Pour rappel, � propos des atrocit�s commises pendant la guerre d�Alg�rie et la demande qui lui est faite de reconnaissance par la France de ces atrocit�s, Sarkozy n�a cess� de marteler que �la France n�a pas de repentance � faire et les enfants n�ont pas � se culpabiliser pour ce qu�ont pu commettre leurs parents�. Fran�ois Hollande, secr�taire du PS trouve bonne l�id�e de Sarkozy et ajoute : �chaque fois que l�on peut faire transmettre les exigences du devoir de m�moire, il faut le faire�. Mais le premier homme du PS se garde de d�clarer qu�il faut le faire aussi pour d�autres atrocit�s commises par la France coloniale en Alg�rie comme dans d�autres pays qu�elle occupa. �Sur le plan politique, l�on peut craindre que l�initiative du chef de l�Etat n�attise la concurrence m�morielle qui s�vit entre diff�rentes communaut�s�, a dit Fran�ois Pupponi, le maire socialiste de Sarcelles. Ce deux poids, deux mesures sur le devoir de m�moire, va, sans aucun doute dans les jours qui viennent, faire r�agir tous ceux qui se sont �lev�s et ont milit� contre la fameuse loi de f�vrier 2005 sur �les bienfaits de la colonisation�. Outre cette derni�re sortie de Sarkozy sur la shoah, le pr�sident en a fait une autre encore sur l�importance de la religion dans l�enseignement. Depuis plus de deux mois, la loi de 1905 sur la la�cit� portant s�paration de l��glise et de l��tat est tr�s fortement malmen�e par le pr�sident qui souhaite apporter un peu plus de religieux � la vie des citoyens. Au d�ner du Crif et faisant fi des critiques qui lui ont �t� adress�es sur �sa bigoterie� et son souhait d�imposer la religion l� o� de longues luttes men�es en ont fait une affaire personnelle, Sarkozy persiste et signe : �tous nos enfants ont le droit, a-t-il dit, de rencontrer, � un moment de leur formation intellectuelle et humaine, des religieux engag�s qui les ouvrent � la question spirituelle et � la dimension de Dieu�. La messe est dite et la rupture annonc�e lors de sa campagne est non seulement dans la forme, mais aussi dans le fond. Et c�est pr�cis�ment cette rupture dans le fond qui touche le socle m�me de la R�publique qui a conduit vendredi des personnalit�s de divers horizons � r�agir. Un appel pour une vigilance r�publicaine sign� entre autres de Dominique de Villepin, Fran�ois Bayrou, S�gol�ne Royal, Delano� , Chev�nement � a �t� publi� sur le site de l�hebdomadaire Marianne. Les signataires rappellent leur �attachement aux fondamentaux d�une la�cit� ferme et tol�rante, � l�ind�pendance de la presse et au pluralisme de l�information et enfin � une politique �trang�re digne, attach�e � la d�fense des droits des peuples, soucieuse de pr�server l�ind�pendance nationale� �. L�opposition de personnalit�s de divers horizons politiques vient s�ajouter aux sondages d�opinion dans lesquels les Fran�ais se d�clarent de plus en plus d��us ou pour le moins d�sar�onn�s par un type de gouvernance et des d�cisions en cascade, de plus en plus incompr�hensibles, et ce, depuis neuf mois.
K. B.-A.

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