Chronique du jour : LETTRE DE PROVINCE
SC�NARIO POUR "SEPTENNAT" SANS NOM
Par Boubakeur Hamidechi
hamidechiboubakeur@yahoo.fr


L�incurie est totale au sommet de l�Etat. Un laisser-aller qui alimente le malaise g�n�ral et pousse des ministres � dire, faire et commettre n�importe quoi. Dans des registres diff�rents mais sur deux sujets aussi f�cheux l�un que l�autre, certains viennent de s�illustrer par des couacs, lesquels vont, une fois de plus, �corner l�image, d�j� d�t�rior�e, de l�ex�cutif. Ha�chour et Djiar, charg�s respectivement de la t�l�communication et du sport, sont au centre de r�v�lations pol�miques au moment o� le chef de l�Etat et son fusible ont choisi le repli silencieux.
A travers ces godiches, parmi tous les godillots du gouvernement, surpris par la soudaine mise en lumi�re de leurs pratiques et leurs aveux, ne faut-il pas conclure que cette gouvernance poss�de non seulement un c�t� sombre mais aussi une curieuse indiscipline ? Cela ne signifie-t-il pas qu�il n�y a plus de navire -amiral indiquant le cap ? Entendons par l� les objectifs que se fixe le pouvoir en termes de propagande. Autant du c�t� du ministre des P et TIC, l�affaire du limogeage d�un haut fonctionnaire appara�t dans ses aspects les plus sulfureux ; autant la p�roraison de celui qui a la charge du sport prend �tonnamment le contre-pied (sans jeu de mots des stades) de la strat�gie de communication du pr�sident au moment o� il ne faut parler que des succ�s. En clair, nous sommes bel et bien en face d�une tragi-comique cacophonie dont il est difficile de croire qu�elle n�est pas volontairement souhait�e par la chefferie, en parfait accord avec la pr�sidence. Le bin�me Bouteflika- Belkhadem qui ne s�est pas retrouv�, depuis des mois, en Conseil des ministres, ne doit-il pas � l�opinion de ce pays quelques explications ? La panne qui caract�rise l�action gouvernementale n�est-elle pas imputable � l�absence d��valuation ponctuelle dont le cadre idoine demeure le �Con-seil des mi-nis-tres� ? C�est � travers celui-ci que se consolident les synergies sectorielles et que se corrigent les erreurs de parcours. Et ce sont ces coutumes qui ont fait leurs preuves dans n�importe quel r�gime que l�on a d�laiss� sous le n�tre. Sans boussoles fiables, nos ministres vaquent � leur mission avec de vagues feuilles de route de temps en temps �actualis�es� � l�humeur. Rituellement, un conseil de gouvernement se r�unit mais rarement au complet et dont le �coordinateur� (Belkhadem s�est lui-m�me qualifi� ainsi) est fortement contest�. En guise de m�thode, il n�y a que des m�canismes intersectoriels totalement gripp�s jusqu�� g�n�rer des chevauchements de pr�rogatives. Enfin, la surpolitisation des actes d�intendance n�a-t-elle pas fini par aggraver la tendance du clanisme ? Voil� les quatre tares d�une gouvernance d�finitivement discr�dit�e parce que justement elle en tra�ne quatre de trop. En face, ou plut�t dans la cime de l�ex�cutif, que fait le pr�sident de la R�publique quand, r�guli�rement, lui parviennent des rapports alarmants ? En apparence, il laisse faire et surtout il s�abstient de faire le grand m�nage. Il est vrai qu�� 11 mois de la fin d�une magistrature, il n�est jamais ing�nieux politiquement de mettre la main dans le cambouis de la gestion. En laissant � ceux qu�il a d�sign�s le soin de se salir jusqu�aux coudes dans les bilans d�sastreux, il s�affranchit subtilement de l�exercice des r�sultats afin de se pr�senter � nouveau comme un arbitre au-dessus des contingences et dont les obligations sont celles d�incarner uniquement la nation, l�Etat et la Constitution. Ce souverainisme excessif qui vise � d�coupler le �temps pr�sidentiel� de celui des cabinets minist�riels � quelle que soit la long�vit� accord�e � ceux-l�, pourrait justement servir � la singuli�re plaidoirie que l�on pr�pare pour justifier certains amendements de la Constitution. C�est donc le contexte qui dicte l�actuelle prudence � ne rien r�am�nager, voire l�indiff�rence devant les multiple d�rapages des ministres. Car les fusibles ne servent pas seulement � sauter en cas de m�contentement, ils peuvent, par ailleurs, se r�v�ler efficaces pour focaliser sur eux la critique et l�absorber afin de ne pas �tre soi-m�me impliqu�, �clabouss�. Les r�seaux qu�il a mis en place au lendemain de sa premi�re investiture et que l�on a appel�s �Alliance pr�sidentielle � r�pondent tout � fait � ce qu�il d�sire accomplir prochainement. Ils constituent toujours le r�servoir en personnel politique dont il a besoin. En effet, depuis les p�rip�ties d�un Benflis, qui se r�v�la n��tre qu�un pi�tre strat�ge et un analyste approximatif du syst�me, le pr�sident ne coupe plus les t�tes. Il se contente intelligemment de les mettre au cong�lateur pour des usages futurs. Ouyahia, dont la disgr�ce momentan�e a �t� orchestr�e par son successeur issu du FLN, a saisi finement la mutation qui s�est op�r�e chez le chef de l�Etat. Il savait bien qu�il pourrait revenir dans le jeu du s�rail pour peu qu�il accepte provisoirement son sort sans broncher. La m�me r�gle vaut �galement pour Belkhadem. Celui que toutes les critiques accablent n�est, paradoxalement, pas d�stabilis� dans ses relations avec le chef de l�Etat tant qu�il lui sert de tampon et de souffre-douleur aupr�s de l�opinion. Il s�en accommode �videmment et continue � aller au charbon en connaissance de cause et d�int�r�ts. Celle qui le rassure, comme tant d�autres d�ailleurs, que la guillotine politique ne fonctionne jamais dans la cour du premier cercle. L� o� l�immunit� octroy�e comme une charge r�galienne permet de ne rendre compte � nulle institution et encore moins aux administr�s de ce pays. Quant aux ministres gaffeurs qui font les choux gras de la presse, ils b�n�ficient de quelques protections de clans auxquels ils appartiennent dans la mesure o� ils savent cultiver l�omerta � ce qu�ils appellent abusivement : l�obligation de r�serve ! Ha�chour apparatchik biberonn� par le parti unique peut encore compter sur Belkhadem, aujourd�hui son mentor et jadis son compagnon de route. Djiar �galement n�est pas en reste de connivence. Ex-wali �placard� au milieu des ann�es 1990, il ne doit sa r�surrection qu�� la faveur de l�entourage de Bouteflika en 1999. Conseill� et communicant du chef de l�Etat � El-Mouradia, il n�est pas �tonnant qu�il continue � avoir ses entr�es dans cette maison. Autant d�indications qui soulignent que les d�passements ou la maladresse ne sont pas forc�ment passibles de sanctions. Car l�impunit� politique n�est plus consid�r�e comme une d�testable d�rive du laxisme ambiant mais l��talon de la fid�lit� et le gage de la stabilit� de �son� personnel en perspective des campagnes futures. Contrairement aux id�es re�ues, le bouteflikisme a cess� d��tre une humeur impr�visible. Il s�est non seulement assagi, en quelque sorte, mais est devenu une redoutable machine � calculer ses coups. En poussant la logique de �l�ingouvernabilit�, il n�est pas politiquement suicidaire mais efficacement agissant dans le sens du but � atteindre. Quand les affaires publiques sont affect�es par le d�sordre des intendants, il ne reste au gardien des lois qu�� prendre le d�cret qu�il faut. Celui d�ajourner un rendez-vous �lectoral et d�enfanter un septennat sans le nommer. Sc�nario insens� ? Il ne faut jurer de rien.
B. H.

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