Régions : BRAHIM MERAD, NOUVEAU WALI DE BOUMERDÈS
Les contours d'une mutation


Le ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni, a présidé la cérémonie d’installation du nouveau wali de Boumerdès, Brahim Merad, anciennement wali de Tiaret, qui remplace à ce poste Ali Bedrici appelé à présider l’exécutif de la wilaya de Béjaïa.
Venant d’une wilaya dont il avait, rappelons-le, la charge et où le pouvoir politique qui régente le pays, faute de solutions à offrir aux Algériens, monte un véritable procès d’inquisition contre une compatriote, M. Merad entame sa mandature dans un nouveau poste avec des préjugés qui ne lui seront certainement pas favorables. Et pour cause, ce procès qui bafoue les droits fondamentaux des personnes a mis en émoi l’opinion publique nationale et a soulevé un tollé à l’étranger. L’ex-wali de Tiaret est donc partie prenante d’une faute politique grave, estiment les observateurs. Cependant, il est de tradition après chaque nomination régionale importante que l’opinion publique locales épie les premiers gestes et la moindre décision pour se faire justement une opinion sur la méthode de gestion et de détermination dont fera preuve le nouveau venu pour affronter les problèmes. Dès lors, intéressons-nous aux supputations en cours dans le sérail local s’agissant de la mutation de Ali Bedrici à Béjaïa. De prime abord, même si la capitale des Hammadites, sur le plan politique, est tout de même plus importante que celle de l’ex- Rocher Noir, cependant les supporters de M. Bedrici s’attendaient peut-être à mieux d’autant plus que cet énarque natif des Ouadhias (Tizi-Ouzou) qui a grimpé tous les échelons de la hiérarchie de l’administration avant de se voir confier, antérieurement à sa venue à Boumerdès, la gestion de la wilaya d’Oran, fait partie du carré des walis chargés par Zerhouni de rédiger certains textes qui régiront les collectivités territoriales notamment le projet du nouveau statut des walis. Par ailleurs, à sa venue dans la wilaya de l’ex- Rocher Noir pour remplacer l’ancien wali révoqué par Bouteflika dès son installation au pouvoir en 1999, M. Bedrici a trouvé une localité gangrenée par la corruption et sur laquelle les terroristes islamistes s’acharnaient et la dilapidation de son foncier atteignait des proportions alarmantes. Il a eu aussi à faire face aux douloureux évènements du printemps Noir. Fort heureusement, mis à part un certain nombre de blessés par balle et des dégâts matériels, la wilaya de Boumerdès n’a pas eu à déplorer de décès. Or, à l’époque, il y avait le risque de voir s’incruster des groupes terroristes dans la foule des jeunes en colère. Témoignons pour l’histoire que le chef de l’exécutif ainsi que les forces de police avaient adopté une démarche tendant à contenir la vague de colère juvénile et faire en sorte que la répression reste circonspecte particulièrement dans la région est de la wilaya pour éviter le pire. Par la suite, ce furent les inondations avant la catastrophe de 2003 et ses tragédies. C’est une légende qui se vérifie. Celle qui veut que les natifs d’une région du pays connus pour leurs capacités intrinsèques se voient confier la gestion pour le compte du système des clans du pouvoir mais sans que ces administrateurs de la demande sociale et des problèmes qui en résultent aient la décision de pouvoir influencer lourdement sur la conduite du pays. Cette tendance s’est fortement accentuée à la prise de pouvoir de Bouteflika, constate l’opposition. La désignation à la tête de la seconde ville de la petite Kabylie serait-elle donc un juste retour de l’homme à la gestion des grandes agglomérations ? Sûrement pas, estiment certains observateurs. L’opacité qui prévaut dans les méandres du système en place laisse peu de visibilité permettant aux uns et aux autres de se faire une idée précise à ce sujet. Pour quelques responsables locaux, cette mutation obéit à d’autres considérations qui seraient d’ordre politique. Le développement économique est complètement bloqué dans la wilaya de Béjaïa. «A l’instar de toute la Kabylie, le développement est mis en stand-by. Cette région subit la sanction décidée en 2001. Il y a par conséquent risque d’émeutes», dit un natif de cette région. La changement procède-t-il donc de la volonté du pouvoir central de relancer la machine de développement de cette région ? En tout cas, d’autres voix font une autre lecture. Il s’agirait, selon elles, de conforter les alliances économiques locales de Bouteflika afin de tenter de reprendre pied dans la capitale des Hammadites. D’ailleurs, ces alliances prêtées au président, remarque-t-on, n’ont pas manqué de lancer des messages médiatiques justes après cette désignation. Au chapitre de la gestion, à son arrivée en 1999 dans la wilaya de Boumerdès, Bedrici avait trouvé une localité exsangue. En plus du lourd dossier lié à la gestion des séquelles du séisme qui concerne les 32 communes et qui a nécessité la mobilisation des énergies de la wilaya pendant 5 ans, le wali et son staff ont lancé quelques programmes, notamment l’expansion des capacités de l’université, les projets routiers d’envergure mais qui enregistrent d’énormes retards, le logement et des actions de développement local. Concernant la lutte contre l’accaparement illégal de terrains domaniaux, les constructions illicites et le laisser-aller, voire l’anarchie dans les espaces publics que subissent chaque jour les citoyens dans certaines communes, l’ex-patron de la wilaya avait privilégié la paix sociale. Dans les réunions publiques avec les populations, le wali aimait insister sur sa position de commis de l’Etat et clamait à diverses occasions son légalisme quant à la gestion de l’affaire de l’Etat. Or, il était bien généralement plus laborieux de tenir une position préservant l’éthique républicaine dans un climat politique en cours et ce, depuis l’arrivée de Bouteflika au pouvoir qui voit l’administration convertie bien souvent en parti politique ou en instrument répressif dans notre pays. Les abus du clan présidentiel aux élections de 2004 et le gonflement des résultats du référendum sur la charte sur la paix et la réconciliation nationale en sont entre autres des négatifs, selon l’opposition, à inscrire à la charge du désormais wali de Béjaïa.
Abachi L.



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