
Régions : BOUIRA Journée d’information et de sensibilisation sur l’avortement à risque
soit dans un cadre qui ne répond pas aux exigences médicales minimums, soit les deux à la fois, et qui par voie de conséquence, expose les femmes à des risques accrus de morbidité et de mortalité.» Selon des statistiques non officielles, il y a 8 000 cas d’avortement annuellement contre 77 500 naissances dont 7 000 hors mariage, soit 10,5 avortements pour 100 naissances. Autres données chiffrées : l’année passé, il y a eu durant 8 mois, 78 cas de femmes décédées et 21 cas d’avortement clandestin à la même période. Ce sont là les chiffres communiqués par le président du bureau de wilaya de l’AAPF, le Dr Malek, qui citera, également lors de son intervention, les conséquences de l’avortement à risque comme les infections locales de l’utérus et les complications régionales infectieuses, ainsi que les séquelles, chroniques comme les salpingites et les para-métrites et psychiques dont la névrose dépressive, les complexes de culpabilité et d’indignité. Il y a aussi les risques de stérilité, les irrégularités menstruelles, la métrorragie et les aménorrhées. Durant cette journée d’information et de sensibilisation, organisée par le bureau de wilaya de Bouira de l’AAPF (Association algérienne pour la planification familiale) à laquelle étaient conviés plusieurs spécialistes ainsi que des représentants des différents secteurs sanitaires de la wilaya de Bouira, il a été présenté également d’autres communications liées à la question, notament l’approche religieuse de l’avortement, juridique et psychosociologique, l’enfance abandonnée, les moyens de la prévention. Auparavant, le représentant de la police a donné quelques chiffres concernant les nouveau- nés abandonnés vivants ou mort-nés. Le conférencier fera savoir que pendant l’année 2007, il a été retrouvé 18 bébés mort-nés dont 10 au niveau de la seule commune de Bouira, le chef-lieu de wilaya. Il dira que ces bébés sont retrouvés souvent au niveau des décharges intercommunales. Concernant l’approche religieuse de l’avortement, Kari Kamel-Eddine, docteur d’Etat en sciences islamiques, parlera de la vision des quatre grands rites sur la question. Il fera savoir que dans l’ensemble, les quatre rites sont unanimes à dire qu’à partir du quatrième mois de grossesse, période à laquelle le fœtus prend la forme humaine, l’avortement est illicite sauf dans quelques cas comme celui dans lequel le fœtus présente des tares majeures pouvant porter atteinte à la mère ou celles de malformations dangereuses pour le bébé. Concernant l’approche juridique, le Dr Si Youcef, maître de conférences au centre universitaire de Bouira, parlera de trois sortes d’avortement, à savoir l’avortement naturel, qui survient à cause de la maladie de la mère ou dans des cas de maladies génétiques, l’avortement thérapeutique, qui est pratiqué sur avis du médecin dûment assermenté pour sauver la vie de la mère (article 72 de la loi 85/05 du 17 février 1985 relative à la protection de la santé) et, enfin, l’avortement criminel qui est sévèrement réprimé par la législation algérienne notamment, dans les articles 304 à 314 du code pénal. Ainsi, fera-t-il savoir, parmi tous ces articles, seul le 308 parle de la possibilité d’avortement en stipulant que «l’avortement n’est pas puni lorsqu’il constitue une mesure indispensable pour sauver la vie de la mère en danger et qu’il est ouvertement pratiqué par un médecin ou un chirurgien après avis donné par lui à l’autorité administrative». Concernant les peines encourues pour l’acte d’avortement, l’article 305, expliquera le Dr Si Youcef, stipule que «quiconque, par aliments, breuvages, médicaments, manœuvres, violences ou par tout autre moyen, a provoqué ou tenté de provoquer l’avortement d’une femme enceinte ou supposée enceinte, qu’elle y ait consenti ou non, est puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 500 à 10 000 DA». Plus loin, l’article 306 du code pénal définit toutes les personnes pouvant être incriminées dans l’avortement. Ainsi, on y lit : «Les médecins, sagesfemmes, chirurgiens-dentistes, pharmaciens ainsi que les étudiants en médecine ou en art dentaire, bandagistes, marchands d’instruments de chirurgie, infirmiers, masseurs et masseuses, qui ont indiqué, favorisé ou pratiqué les moyens de procurrer l’avortement, sont, suivant les cas, punis à des peines prévues aux articles 304 et 305». Des peines pouvant se transformer en réclusion à temps, si par l’acte d’avortement, la mère décède. En ce cas-là, précise le conférencier, l’article 304 chapitre 2 stipule que «si la mort en est résultée, la peine est la réclusion à temps, de 10 à 20 ans». Et au sujet des peines, même la mère qui décide de recourir à l’avortement est punie par la loi dans l’article 309 du code pénal qui stipule que «est punie d’un emprisonnement de six à deux ans et d’une amende de 250 à 1 000 DA, la femme qui s’est intentionnellement fait avorter ou a tenté de faire, ou qui a consenti à faire usage de moyens à elle, indiqués ou administrés à cet effet». Enfin, dira le conférencier, le législateur algérien, et pour être intransigeant vis-à-vis de ces actes d’avortement «clandestins», les médecins qui recourent à ces procédés se verront interdits d’exercer à vie leur métier. On trouve ce cas de figure expliqué dans l’article 311 du code pénal qui stipule que «toute condamnation pour une des infractions prévues par la présente section comporte de plein droit, l’interdiction d’exercer aucune fonction et de remplir aucun emploi, à quelque titre que ce soit, dans les cliniques ou maisons d’accouchement et tous établissements publics ou privés recevant habituellement à titre onéreux ou gratuit, et en nombre quelconque, des femmes en état réel, apparent ou présumé de grossesse». Enfin, rappelons que l’avortement a été classé par catégories au niveau des pays arabes, du degré de tolérance zéro classé en A comme l’Irak ou l’Arabie Saoudite, à un degré moindre classé en B dans lequel figurent l’Algérie et le Maroc, qui comme le prévoit leurs législations, laisse quelques marges de manœuvres pour l’avortement, et enfin, la classe C, c’est-à-dire où l’avortement est largement toléré comme la Tunisie, seul pays arabe à admettre ce procédé. Y. Y.
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