Chronique du jour : ICI MIEUX QUE LA-BAS
N�importe quoi
Par Arezki Metref
arezkimetref@free.fr


Comme le remarquait l��conomiste Fouad Hakiki dans Le Quotidien d�Oran, il est vrai qu�on dit n�importe quoi ! Et il n�est pas moins vrai que si on lit n�importe quoi, c�est parce que des n�importe qui �crivent n�importe quoi n�importe o�� Moi, me mart�le ce lecteur sagace, ma�tre de son sang-froid, quand je tombe sur n�importe quoi, ce qui est courant, je tourne la page ou change de journal ! Je laisse � ceux � qui cela agr�e, il y en a toujours, de faire leurs choux gras de leur feuille de chou.
C�est ma fa�on � moi, pr�cise-t-il, de soutenir la libert� de la presse et le pluralisme des opinions. Quand on m�inflige le n�importe quoi usuel, je passe mon chemin, digne et calme, poursuit ce lecteur, plut�t que de d�gainer une factice suffisance ou cette morale � qat�sous disponible dans les bazars pour signifier au gus qui scribouille � la ligne qu�il ferait mieux de vendre des sardines en les enveloppant dans du papier journal au lieu de remplir des colonnes de n�importe quoi. On dit n�importe quoi, mon pauvre vieux, et on arrive m�me � paradoxe des paradoxes ! � � troquer une langue de bois bien rod�e, tremp�e comme l�acier, impossible par cons�quent � raboter, par une autre, h�sitante, frileuse, frissonnante, timide, n�e pourtant de la contestation de la premi�re. Rien ne se perd, tout se transforme� ! Se transforme, oui ! Il faut juste du culot ! N�importe quoi, donc ! Mais, c�est quoi n�importe quoi ? C�en est-il, le surlignage de ce d�nouement dans des circonstances heureuses, souriantes, et tout et tout, du faux suspense de la participation d�Abdelaziz Bouteflika au lancement de l�UPM de Sarkozy � Paris ? On l�a vu sur quantit� de photos de presse et d�images t�l�, le dilemme s�est achev� dans une tape amicale et un sourire de connivence � l�issue d�un t�te-�-t�te � Tayako entre le pr�sident alg�rien et le pr�sident fran�ais. Dans l��lan, le premier a demand� au deuxi�me non seulement de rendre publique la bonne nouvelle de la fin de l�expectative mais aussi d�annoncer la visite d�Etat qu�il effectuerait en France en 2009, ce qui suppose qu�il se pr�sentera et sera r��lu pour un troisi�me mandat. Nicolas Sarkozy : �Le pr�sident Bouteflika a une exp�rience, une autorit�, qui font que sa pr�sence autour de la table pour le sommet de l'Union pour la M�diterran�e est indispensable pour le succ�s de ce sommet.� Comment r�sister � �a ? A propos des h�sitations alg�riennes, on a dit aussi que ce sont-l� des humeurs normales dans les vieux couples dont les liens, passionnels, capricieux, inconstants, voire chaotiques, parcourent en un rien de temps toutes les couleurs de l�arc-en-ciel. Il faut prendre garde � la m�taphore du vieux couple. Dedans, il y a � boire et � manger. On ne sait jamais qui de la vieille ou du vieux pourrait tenir la plus longue bouderie. �a, c�est vraiment du n�importe quoi! L�acceptation in fine de l�Alg�rie de participer au sommet de Paris r�sulte-t-elle, entre autres, du remplacement au pied lev� de Abdelaziz Belkhadem, r�put� hostile � toute initiative diplomatique qui �loignerait l�Alg�rie de l�arrimage islamiste, par Ahmed Ouyahia, dont le pragmatisme sert objectivement l�ouverture des volets ? Il y a vraisemblablement un peu de cela mais survaloriser l�influence du Premier ministre dans le syst�me Bouteflika, c�est m�sestimer le r�le de l�autocrate dans une autocratie. Il est vrai cependant qu�avec Belkhadem comme Premier ministre, l�Alg�rie ne serait peut-�tre pas all�e � Paris ou aurait, � tout le moins, tra�n� les pieds en poussant des petits cris effarouch�s... Dans le registre du n�importe quoi, on a pu entendre des railleries � propos de la d�claration d�Ouyahia selon laquelle il n�y a pas lieu d��tre �plus palestinien que les Palestiniens�. Si, par exemple, sous l�impulsion d�un Belkhadem et de sa vision obsidionale de la survenue d�un Etat vou� � la Charia et arrim� � l�Iran, l�Alg�rie avait d�clin� l�invitation � Paris sous pr�texte que les Isra�liens y �taient invit�s, cela r�glerait quoi du probl�me palestinien ? Il ne faut pas �tre en effet �plus palestinien que les Palestiniens� ni plus que les Jordaniens, ou Syriens, ou Egyptiens qui, eux, s�asseyant sur leur panarabisme autrefois sacr�, sont pr�sents sans complexe l� o� les conduisent leurs int�r�ts. Ni pour ses int�r�ts ni par position de principes, l�Alg�rie n�a vocation � rester en marge de ce projet avant de juger sur pi�ce et sur place. Sans perdre de vue la gravit� du probl�me palestinien et la constante agressivit� d�Isra�l puis�e dans le soutien des Etats-Unis et de leurs sbires dans toutes les parties du monde, Europe compris bien entendu, ce n�est pas en se parant des atours islamistes cens�s ranger du c�t� des peuples, qu�on d�fend le mieux l�une des causes les plus tragiques de notre temps. De m�me que la d�fense de l�Iran contre lequel des puissances belliqueuses autour des Etats-Unis pr�pareraient une agression n�implique pas fatalement de soutenir les forces islamistes sous pr�texte qu�une configuration simpliste et manich�enne des conflits se r�sum�t � un affrontement du n�o-conservatisme de Bush d�un c�t� et des peuples, organis�s autour de l�islam, de l�autre. N�est-ce pas le revers du �choc des civilisations� de Samuel Hutington ? N�est-ce pas, per�us et mis en �uvre de l�autre bout de la lorgnette, �l�identit� nationale� et le �choc des cultures�? L�ordre am�ricain est absolument injuste contre les peuples. Celui des islamistes suppos�s incarner la r�sistance populaire aux Etats-Unis l�est-il moins ? N�importe quoi� Dans aucun pays, a fortiori quand il n�est pas une puissance, les changements ne se font en fonction de param�tres uniquement nationaux. La mondialisation, c�est aussi l�interf�rence des influences. Aucune raison pour que l�Alg�rie �chappe � la r�gle. Ainsi, � l�instigation d�un chauvinisme national qui agit en n�vrose par rapport � l�ancienne puissance coloniale, si l�Alg�rie avait adopt� la politique de la chaise vide par rapport � l�UPM de Sarkozy, elle aurait connu le sort de la Libye. On aurait sans doute d�plor� son absence et on fait sans. Pas plus que son absence, sa pr�sence n�est en soi un symbole suffisant. Ce qui importe, c�est la fa�on dont elle va et veut contribuer � faire de l�UPM non pas un instrument d�influence de la rive nord de la M�diterran�e sur la rive sud mais une v�ritable organisation r�gionale capable de r�guler les rapports dans l�int�r�t de chacun des peuples des pays qui la composent. Si l�Alg�rie laisse devenir l�UPM uniquement l�organisateur d�un march� de libre-�change et instrumentaliser les r�gimes du Maghreb en ex�cutants d�une politique migratoire muscl�e, sa pr�sence ou son absence, ce serait kif-kif la m�me chose.
A. M.

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