Chronique du jour : KIOSQUE ARABE
Duplicit� et pantalonnade au sommet
Par Ahmed Halli
halliahmed@hotmail.com


Les grandes man�uvres politico- diplomatiques arabes ont d�j� commenc�. Et comme toujours, les Arabes se retrouvent encore divis�s d�s qu�Isra�l d�clenche une guerre meurtri�re contre un des leurs. Dans les ann�es la�ques arabes, les choses �taient simples : il y avait, d�un c�t�, le camp progressiste anim� par l�Egypte et de l�autre les mod�r�s, Arabie saoudite en t�te. Il y eut ensuite la d�fection de l�Egypte, pour cause de Camp David, et l�Alg�rie prit le relais avec le �Front de la fermet� et de la r�sistance�.
H�las, ce front n�a pas r�sist� aux soubresauts de l�histoire et aux calculs de pays qui avaient d�j� d�autres projets. Peu � peu, le r�alisme et la mod�ration s�impos�rent comme m�thode de bonne gouvernance. Le slogan �USA come home !� a progressivement remplac� le c�l�bre �USA go home !�, potion magique des peuples qui y croyaient encore. Les Arabes ont fini par suivre, avec beaucoup de retard, les conseils avis�s de feu Bourguiba : ils ont admis la r�alit� du partage de la Palestine. Ils avaient mieux en 1948 et en 1967 mais tant pis, il y en a qui �taient fatigu�s de se battre tout seuls pour la cause. Aujourd�hui, nous sommes tous des wahhabites, arm�es, peuples, gouvernements sont rassembl�s sous le m�me �tendard religieux. Mais le royaume d�Arabie saoudite, qui a r�pandu l�id�ologie salafiste jusqu�aux confins du Maghreb, n�est plus le ma�tre du jeu. De la bo�te de Pandore ont jailli de nouveaux va-t-en-guerre, pr�ts � mourir jusqu�au dernier Palestinien. Vendredi dernier, on a assist�, en direct-live selon la formule consacr�e, � la d�monstration de la duplicit� et des divisions qui r�gnent au sommet de la pyramide arabe. A Doha, une poign�e de chefs d�Etat, dont le n�tre, s�est convoqu�e � un �sommet� pour Ghaza. Il y avait l� l��mir du Qatar, comme ma�tre de c�r�monie, et le responsable damasc�ne du Hamas, Khaled Macha�l. Pour donner du poids � sa repr�sentation, Macha�l �tait flanqu� de quelques dirigeants palestiniens, dont Ahmed Djibril qui, au fil du temps, a appris � r�citer la �Bismallah� sans accent. Ahmed Djibril, qualifi� de militant du �strip-tease politique� par le directeur du quotidien cairote El- Fedjr, Adel Hammouda, r�put� pourtant �tre un opposant f�roce � Moubarak. Il est, en tout cas, sans piti� pour Djibril qu�il compare � un �vieux lion, avec des rats qui jouent entre ses dents�. Quant aux autres dirigeants arabes et � leurs d�l�gations, il semble qu�ils ne soient venus � Doha que pour faire tapisserie. Ce qu�il y a de bien dans ce genre de sommet improvis�, c�est que les absents sont remplac�s, au pied lev�, par des repr�sentants dont la l�gitimit� est valid�e s�ance tenante, si l�on peut dire. L��mir du Qatar a eu, bien s�r, la d�licatesse de laisser le fauteuil de Mahmoud Abbas vide et de le d�plorer avec des paroles de regret et des regards appuy�s vers le si�ge vide. On nous expliquera, par la suite, que Mahmoud Abbas a �t� invit� � ce �sommet� des r�sistants mais qu�il s�est excus�. En fait, on a fait Doha uniquement pour montrer que les absents ont toujours tort. En revanche, le pr�sident iranien, Ahmadinejad, ne s�est pas fait prier. Il a m�me inaugur� l��re de la nouvelle Ligue arabe, avec un discours enflamm� contre ses ennemis am�ricains. Or, attaquer verbalement les Am�ricains au Qatar, c�est comme haranguer les foules � partir d�un porte-avion US. Or, c�est pr�cis�ment de cette base a�rienne du Qatar que d�collent les F16 qui bombardent Ghaza, apr�s avoir fait une escale �technique � en Isra�l. C�est du moins ce qu�affirme notre confr�re �gyptien Nabil Charef Eddine dans le magazine Elaph. Evoquant les dirigeants pr�sents � Doha, il affirme qu�il ne manquait aux organisateurs de ce �sommet� qu�� inviter Hassan Nasrallah, Oussama Ben Laden et Ayman Zawahiri. �Un regard sur les participants suffit � montrer que certains d�entre eux sont passibles du Tribunal p�nal international pour g�nocide. D�autres sont des meurtriers en puissance, des tyrans, voire des dirigeants parvenus au pouvoir par un coup d�Etat�, note encore le journaliste. Quant aux discours et aux �d�cisions� de ce �sommet� surr�aliste, ils sont conformes � la tradition. Ce qu�il faut bien appeler la �pantalonnade de Doha� a commenc� par des bruits de bottes et a fini � pas feutr�s. Ainsi, le Qatar et la Mauritanie ont annonc� qu�ils gelaient leurs relations avec Isra�l, laissant la voie libre � un futur et tr�s probable d�gel. Bechar Al-Assad, m�decin l�giste, a sign� l�acte de d�c�s de l�initiative de paix arabe. Il a lanc� une ultime pellet�e de terre sur le cercueil en imaginant que l�Egyptien Moubarak �tait dedans. Auparavant, le dirigeant syrien avait suspendu la n�gociation sur le Golan avec Isra�l, sans courir, toutefois, le risque de l�enterrer d�finitivement. Avant son d�part, il a fait organiser un grand meeting populaire au cours duquel on a d�nonc� la �complicit� � de l�Egypte et son inaction. Cependant, on n�a pas entendu un seul coup de feu en provenance du Golan, observent les commentateurs �gyptiens. On retiendra aussi de ce sommet la couverture assur�e par les deux t�l�visions rivales, Al Jazeera du Qatar et la saoudienne Al Arabiya. La cha�ne qatarie, qui s��vertue � enflammer les foules arabes, a mis le paquet pour le �sommet� de Doha. On a particuli�rement appr�ci� les gros plans sur le si�ge vide de Mahmoud Abbas ainsi que la fa�on dont les animateurs conduisent leurs interviews. La technique mise au point par le Syrien Fay�al Akassem consiste simplement � couper syst�matiquement l�intervenant lorsqu�il exprime un point de vue non conforme � la ligne de la cha�ne. Quant � la cha�ne saoudienne, elle s�est abstenue, pour une fois, d�imiter aveugl�ment sa rivale et de faire de la surench�re religieuse ou politique. Pour �Al Arabiya�, le �sommet� de Doha est devenu la �r�union consultative de Doha�, une nuance de taille. Ensemble, les deux cha�nes illustrent de quelle mani�re les gouvernants arabes utilisent la religion pour r�aliser des objectifs politiques souvent contestables. Ainsi lorsque la cha�ne Al Jazeera utilise le terme de �chouhada � pour d�signer les morts de Ghaza, Al Arabiya parle de �victimes �. Pour parer � d��ventuelles critiques, les autorit�s saoudiennes ont fait monter leurs th�ologiens en premi�re ligne. Dans le quotidien londonien Al- Hayat, un certain Hassan Bensalem refuse d�accorder la qualit� de martyrs � ceux qui meurent sous les bombes isra�liennes. Se basant sur la tradition proph�tique, il affirme que seul Dieu peut conf�rer le titre de �chahid�. A l�appui de ses dires, Hassan Bensalem cite les propos m�mes du Proph�te racontant le d�roulement d�une bataille : �Ze�d a saisi l��tendard et il a �t� tu�, Djaffar s�en est ensuite empar� et il a �t� tu�, puis Abdallah Ibn Raouaha l�a pris et il a �t� tu酻 Pourquoi donc, le Proph�te a dit qu�ils ont �t� tu�s et non pas qu�ils sont tomb�s en martyrs, si ce n�est pour insister sur le fait que la qualit� de �chahid � ne peut �tre octroy�e que par Dieu ? conclut Hassan Bensalem. Et comme pour nous dissuader d�enfreindre la tradition, un autre th�ologien, Abderrahmane Al-Afredj, a puis� dans un vieux grimoire du d�funt Mohamed Bensalah Al- Oth��mine, saoudien bien s�r. Ce dernier affirme que quiconque attribue la qualit� de �martyr� � un homme, m�me tu� dans un juste combat, r�pondra de ceci au jugement dernier. Voil� encore un bon sujet de d�bat pour le clan d�Ahmadinejad, qui est au wahhabisme ce que la peste est au chol�ra.
A. H.

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