Culture : MADAME LA FRANCE DE MAISSA BEY AU CCF
Les �bienfaits de la colonisation� racont�s par les enfants !


C��tait le 14 juin 1830. Au petit matin. Le g�n�ral de Bourmont d�barque � Sidi Ferruch (aujourd�hui Sidi-Fredj) avec 30 000 hommes, arm�s de canons et de fusils � ba�onnette. �L�enfant est debout sur un promontoire recouvert de lentisques et de lauriers roses transperc�s d��pineux. Il regarde la mer.�
Soudain, toutes les lumi�res s��teignent et trois personnes entrent en sc�ne. Ce sont des com�diens venus au Centre culturel fran�ais d�Alger pour pr�senter Madame la France, une pi�ce th��trale de l�auteure alg�rienne Ma�ssa Bey et mise en sc�ne par Jean-Marie Lejude. Debout sur sc�ne, ces com�diens regardent loin, tr�s loin devant eux. Comme cet enfant, ils regardent la mer. Des navires avancent et d�versent sur une plage au sable dor� une cohorte d�hommes arm�s pr�ts � tout. Sur le chemin de la conqu�te, ils massacrent hommes, femmes et enfants. Derri�re eux, �elle avance. Droite, fi�re, toute de morgue et d�insolence, v�tue de probit� candide et de lin blanc, elle avance. C�est elle, c�est bien elle, reconnaissable en ses atours. Tout autour d�elle, on s��carte. On s�incline, on fait la r�v�rence. Elle avance Madame La France.� Elle est venue civiliser un peuple �barbare�, apprendre � des enfants aux visages d�guenill�s, aux cheveux hirsutes et au pieds nus comment l�aimer. Cach� au fond d�un trou noir, qui ressemble � une grotte et qui a �t� creus� par les siens, cet enfant entend un �trange bruit dehors. C�est le bruit des armes, des chevaux qui p�n�trent dans des villes et des villages pour les br�ler, les d�truire et d�poss�der leurs habitants de ce qu�ils ont de plus cher : leur terre. �Sur des chemins pav�s de mensonges et de serments viol�s, elle avance.� L�enfant est toujours l�, regardant Madame La France avancer. Cach� derri�re son p�re, il avait terriblement peur. �Que sont-ils venus faire ici tous ces hommes arm�s de fusils et de canons ?� se demanda-t-il d�un air innocent. �Nous sommes venus vous apporter culture et civilisation�, lui r�pondent-ils. D�sormais, apprenez � dire : �J�aime mon pays : la France�, insistent-ils. Mais il se refuse d�aimer tout autre patrie que la sienne : l�Alg�rie. Cet enfant qui assiste � 132 ans de colonisation fran�aise de l�Alg�rie assistera aussi � la disparition de son p�re. Au nom du principe de la libert�, de l��galit� et de la fraternit�, il verra son p�re encha�n�, le dos inclin�. Cet enfant, resta l�, debout, choqu� par ce qui venait de se passer. �Mais, il ne pleure pas�, raconta Ma�ssa bey qui a v�cu la m�me douleur lorsqu�elle �tait enfant. Elle avait � peine huit ans quand son p�re meurt sous les tortures des soldats fran�ais. C��tait durant la guerre de Lib�ration nationale qui d�buta en 1954 pour se terminer sept ans plus tard, en 1692. Mais avant cette guerre, c��tait la d�portation des Alg�riens en Nouvelle- Cal�donie, les massacres collectifs du 8 mai 1945 � S�tif, Guelma et Kherrata. Cet enfant verra tout et conna�tra la famine, r�sultat de la politique de la terre br�l�e. Il est toujours l�. Il avait peur �mais il ne pleure pas�. Quand vint la guerre, il �tait encore l�. Du haut de cette colline, il verra le feu qui consuma plaines et for�ts. C��tait le napalm. Dans cette pi�ce, Ma�ssa Bey �voque aussi les belles femmes de La Casbah d�Alger, install�es dans un d�cor mauresque, pr�tes � offrir leurs �baisers� aux visiteurs. Un peu plus bas, dans les rues d�Alger, cet enfant est oblig� de travailler pour nourrir sa famille. Il fera ce travail jusqu�� l�ind�pendance du pays en 1962. �L�enfant est debout sur un promontoire recouvert de lentisques et de lauriers roses transperc�s d��pineux. Il regarde la mer.� Cette foisci, il voit des bateaux qui arrivent mais vides. Des hommes amass�s sur le port attendaient pour embarquer. Ils quittent d�finitivement l�Alg�rie. La France avait �t� �branl�e et divis�e, abandonnant son �uvre colonisatrice de l�Alg�rie. A la fin de la pi�ce, une m�re demanda � son enfant ce qu�il avait compris. �Il n�y a jamais de bienfaits de la colonisation maman�, r�pond-t-il.
Ly�s Menacer



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http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2009/01/28/article.php?sid=78729&cid=16