Chronique du jour : KIOSQUE ARABEE
Laissez-nous Cheb Mami !
Par Ahmed Halli
halliahmed@hotmail.com


Show � l�am�ricaine, pl�biscite � l�alg�rienne : tel est le pitoyable spectacle que le pays a offert jeudi dernier � partir de la Coupole du 5-Juillet. On a fait mieux au stade de Madagascar en d�pensant peut-�tre moins d�argent. Il est vrai qu�il y a longtemps que les Alg�riens ne sont plus aussi attentifs � leur rang dans le tableau des nations d�favoris�es.

C�est � peine si quelques irr�ductibles optimistes s�int�ressent encore au classement de la FIFA qui offre l�hospitalit� de ses profondeurs � notre �quipe nationale de football. Comme dirait notre ami Madjid Merdaci, �a ne tourne pas rond dans le monde du �ballon rond�. Des ballons, il y en avait aussi au 5-Juillet, gonfl�s p�niblement � l�orgueil national et plus s�rement � l�h�lium. Comme le pain traditionnel que proposent des barbus qui font mine de rien mais qui pourraient arborer cette enseigne : �Retour du maquis avec l�aide de Dieu�. Voyez comme ils sont si peu reconnaissants ! C�est � peine s�ils laissent une place au portrait de leur bienfaiteur terrestre, entre le �Verset de la Chaise� et l�ind�tr�nable ex-voto : �Ceci est un privil�ge de Dieu�. Comme les Alg�riens ont une peur bleue, couleur des ballons sous la Coupole, de ce qu�il y a apr�s la mort, Dieu est toujours l� pour combler les lignes laiss�es en pointill�s. Ils savent, les bougres, qu�il reconna�tra fatalement les siens mais � l�heure des �omras� de fin de semaine, il n�est pas interdit d�esp�rer. Parole de bretteur : � la fin du mandat je touche. Reste � savoir qui du peuple et du monarque r�publicain aura le dernier mot. Je serais � la place du peuple qui croit sans jamais prier vraiment, je ferais mien ce slogan : �Offrezlui une chance de rentrer chez lui, donnez- lui une majorit� �crasante� d�abstentions !�. Il n�aura quand m�me pas le culot de d�noncer une fraude �lectorale massive, avec des urnes translucides et des bulletins transparents. En attendant, il faut admirer la fa�on dont il a remerci�, ou plut�t cong�di�, les tristes coalis�s qui lui ont fait la courte �chelle. Une fois hiss� sur le fa�te du mur, il s�est empress� de proclamer sa libert� et son ind�pendance. �Merci, Messieurs, d�avoir si bien exprim� l�engouement populaire envers ma modeste personne. Vous avez su habilement capter et canaliser cette volont� populaire devant laquelle je m�incline. Je serai candidat mais pas le v�tre. Je serai un candidat ind�pendant. Ce qui veut dire qu�il ne faudra pas compter sur moi pour vous repasser la rhubarbe. Et si je n�obtiens pas une majorit� �crasante, malheur � vous, ou malheur au peuple selon votre aphorisme pr�f�r� : je m�en vais et je vous laisse � vos jeux de scoubidous.� Voil�, en substance, les vraies paroles, re�ues comme un message subliminal, par les trois paires d�oreilles coalis�es. Cela dit, tout le monde n�a pas appr�ci�, dans ce show �obamatique�, le r�le d�Aretha Franklin confi� au Cheb Mami. Bien s�r, il n��tait pas l� en personne, � moins qu�il ne se soit d�guis� mais sa voix a retenti sous la Coupole. Notre confr�re Slimane Boussoufa a jug�, dans un article intitul� �La grande all�g�ance�, que le proc�d� �tait d�un go�t douteux. �Je salue, �crit-il dans le magazine Elaph, les conseillers du Pr�sident car ils ont choisi le jeudi 12 de ce mois pour organiser la f�te et non pas le vendredi 13. Je sais que le Pr�sident a horreur des signes noirs qu�incarnent certaines dates et certains lieux. Et le vendredi 13 est consid�r� comme un jour funeste par les esprits superstitieux. Cependant, je ne comprends pas pourquoi le Pr�sident a fait son entr�e dans la coupole blanche accompagn�e par une chanson de Mami. Ceci, sachant que la justice fran�aise a engag� des poursuites contre lui pour avoir drogu� et fait avorter une jeune femme. Il est donc consid�r� comme un fuyard et recherch� en tant que tel. Il appartient donc aux conseillers du Pr�sident de faire attention � ce genre d�erreur. D�autant plus que nous sommes dans une c�r�monie de grande all�geance qui ne tol�re pas ce type de d�rapage, conclut Slimane Boussoufa. Il y a cependant une autre lecture que l�on peut faire de cette pr�sence, en chanson, de Cheb Mami. Il s�agissait simplement d�adresser aux autorit�s fran�aises ce message tr�s clair : �Laissez-nous Cheb Mami, nous vous laissons le vieux Hass�ni !�(1). Ceci, en r�ponse au message cod� des autorit�s judiciaires fran�aises, qui dit � peu pr�s ceci une fois d�crypt� : �Remetteznous le v�ritable assassin de Mecili qui est en Alg�rie et nous vous rendrons Mohamed Ziane Hass�ni !�(2). C�est vrai que le bon peuple qui croit toujours plus aux signes de la foi qu�aux vertus des pri�res, se retrouve un peu perdu dans tout ce tintamarre organis� pour qu�il aille voter. Le bon peuple qui aime les urnes pleines et les t�tes vides craint surtout les repr�sailles du gouvernement. Mais il ne faut pas h�siter � brandir au-dessus de sa t�te la menace de la col�re divine qui frappe toujours au ras du sol, comme le montre l�exp�rience. Vous verrez alors comment le pouvoir et la mosqu�e peuvent faire bon m�nage lorsqu�il n�y a pas de Palestiniens pour brouiller les cartes. Il suffit, en effet, de presque rien, quelques roquettes de trop, pour ramener Ghaza au centre de nos d�bats et sous les nefs de nos mosqu�es. Le monde arabe est ainsi fait, constate encore la sociologue syrienne exil�e aux USA, Wafa Sultane. Apr�s un silence prolong�, d�, selon elle, � un virus qui a bloqu� sa bo�te email, Wafa Sultane raconte comment elle s�est retrouv�e avec un volumineux courrier, traitant de la situation � Ghaza. Elle a r�solu d�y r�pondre sur son blog o� elle fait un sort, d�entr�e, au Hamas. Le mouvement est qualifi� de �s�cr�tion islamiste et terroriste qui ne parvient pas � se hisser au niveau d�un gouvernement capable d�assumer ses responsabilit�s � l��gard de son peuple avec sagesse et moralit�. Evoquant les motivations des internautes qui sollicitent ses avis, �sans doute pour lui faire tenir des propos qui serviront � la condamner�, Wafa Sultane interpelle � son tour : �Celui qui r�prouve ce qui s�est pass� � Ghaza, au nom de son attachement aux valeurs humaines, aurait d� m�interroger aussi chaque fois qu�un �v�nement quelconque mena�ait ces valeurs. Un quart de million d�Alg�riens ont �t� tu�s par des islamistes, leurs propres fr�res, et de la plus cruelle des fa�ons mais aucun lecteur musulman n�a sollicit� mon avis sur cette boucherie. Selon un rapport diffus� r�cemment sur le site �Afak�, des femmes viol�es par les groupes islamistes ont racont� que leurs violeurs priaient et invoquaient leur proph�te avant de s�attaquer � leurs proies. Beaucoup de musulmans ont lu ce rapport, note Wafa Sultane, mais aucun ne s�est interrog� sur ces m�urs barbares. Alors, pourquoi me demandent-ils mon avis sur les �v�nements de Ghaza ?� Ce ne sont l� que quelques extraits de la longue r�ponse de Wafa Sultane � ses lecteurs et � ses d�tracteurs. Ils constituent un autre �l�ment de r�ponse � ceux de mes lecteurs pour qui les crimes isra�liens � Ghaza excusent tout le reste.
A. H.
 

1) Il y a si longtemps que l�affaire dure que certains l�ont peut-�tre oubli�e : Hass�ni, c�est ce haut fonctionnaire alg�rien des AE qui est mis en examen par la justice fran�aise dans le cadre de l�enqu�te sur l�assassinat de Ali Mecili. Depuis le 14 ao�t 2008, Mohamed Ziane Hass�ni n�a pas le droit de quitter le territoire fran�ais.
2) En fait, il semble certain que le pauvre Hass�ni ne p�serait pas bien lourd dans la balance, au cas o� un hypoth�tique �change avec Cheb Mami serait envisag�. Pour reprendre l�expression de cet ancien confr�re sportif : �Ils ne boxent pas dans la m�me cat�gorie�.

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