Culture : LES ENFUMADES DU DAHRA EN 1845
Un �pisode douloureux


Mohamed Tiab, dipl�m� de l'ENA et cadre dans une soci�t�, est un historien �m�rite et surtout passionn� par la r�sistance qu'a men�e le peuple alg�rien face � l'occupant fran�ais.
Il a d�j� publi� plusieurs ouvrages � ce propos : Chronologies alg�riennes, Chronologies ch�lifiennes, Voyage en diligence Chlef- T�n�s en 1895. Il a particip� activement � la cr�ation d'un site d'histoire pour faire conna�tre tous les vestiges des �poques ph�nicienne, romaine et ottomane de la r�gion. Lundi dernier, � la biblioth�que de Chlef, l�historien a pr�sent� son nouvel ouvrage traitant d'un �pisode douloureux de l'histoire de notre pays. Il a �clair� d�une mani�re crue et sans concession cet acte ignoble et inhumain qui d�passe tout entendement et que le monde civilis� a condamn� avec fermet�. C'est � la date du 20 juin 1845 que le malheur a donn� rendez-vous � des Alg�riens innocents, dont la plupart �taient des femmes et des enfants. L'�v�nement se d�roule au niveau des Sbeahs, dachra nich�e au c�ur de l'imposante cha�ne montagneuse du Dahra, au nord de la wilaya de Chlef. Laissons plut�t la parole � Tiab Mohamed. �Il est bon de savoir qu'en octobre 1839, l��mir Abdelkader reprend les armes contre la France, apr�s la violation du trait� de la Tafna par les autorit�s fran�aises, trait� qui devait assurer � Abdelkader l'autonomie des deux tiers du territoire alg�rien. Durant cette ann�e, le soutien du Maroc lui est acquis. Le g�n�ral Bugeaud est nomm� chef d'�tat-major en 1842. Sous son impulsion, la guerre change de nature, l�Emir est battu par le duc d'Aumale qui s'empare de la Smala et la transforme en une ville de 30 000 �mes en 1843. Le conflit se d�place vers le Maroc o� s'est r�fugi� Abdelkader. � la suite des bombardements de Tanger et Mogador, les troupes de Abderahmane, fils du sultan du Maroc, sont d�faites � la bataille d'Isly en 1844. � partir d'avril 1845, le r�sistant Boumaza est d�termin� � continuer la lutte, appuy� par la tribu des Ouled Riah. Il d�fait la tribu des Sendjas, collaborateurs des fran�ais et �limine leur agha. Le g�n�ral Bugeaud r�agit : il envoie cinq colonnes en diff�rents points du territoire concern�s par l'insurrection. Ces colonnes infernales s�meront la d�solation. Le g�n�ral d'Abouville de la colonne de S�tif, le g�n�ral Marey, commandant les troupes de M�d�a, auxquelles s'ajoutent trois colonnes d'Orl�ansville (actuelle Chlef) confi�es aux colonels Ladmiraut, P�lissier et Saint Arnaud. Le colonel Pelissier dirige sa colonne en vue de la r�pression des Ouled Riah, alli�s irr�ductibles du grand chef de la r�sistance Boumaza. Les combats sont d'une rare violence en regard des moyens mat�riels et humains dont disposent les troupes fran�aises. Les populations n'ont d'autre choix que de se r�fugier dans des grottes. Alors le colonel Pelissier charge des pl�nipotentiels arabes d'�tablir un dialogue avec les chefs tribaux pour n�gocier un retrait en �change de la soumission des Ouled Riah pour isoler le chef de l'insurrection Boumaza. Les �missaires essuient un refus. C'est alors que Pelissier ordonne d'amasser des mati�res combustibles devant l'ouverture des grottes, en application des recommandations du g�n�ral Bugeaud : �Si ces gredins ne se retirent pas des grottes, enfumez-les comme des renards.� Le lendemain, une compagnie d'hommes du g�nie et des tirailleurs p�n�trent dans ces grottes pour y mettre le feu. � l�entr�e, des animaux sont � moiti� calcin�s. Un t�moin rapporte la vision d'une m�re asphyxi�e au moment o� elle d�fendait son enfant contre la rage d'un taureau, dont elle saisissait les cornes. Ailleurs, les cadavres rendent encore le sang de la bouche et par leurs attitudes t�moignent des derni�res convulsions et des cadavres de nouveau-n�s gisant parmi les provisions. Enfin, �� et l�, des masses informes se rejoignent en une immense bouillie humaine. Pr�s d'un millier de femmes et d'enfants ont �t� ainsi extermin�s par le feu en ce triste 20 juin 1845. Ce livre a le m�rite de d�noncer les m�thodes barbares de l'arm�e fran�aise, surtout lorsque l'on sait que ces enfumades ont �t� r�it�r�es en 1959, dans les grottes de djebel Bissan, non loin de l�.
Medjdoub Ali
sabrinal_lesoir@yahoo.fr

Nombre de lectures :

Format imprimable  Format imprimable

  Options

Format imprimable  Format imprimable