Soci�t� : CARNET DE VOYAGE � BORD DU RAPIDE D�ORAN
En voiture !


Gare ferroviaire de l�Agha, au centre de la capitale, en cette matin�e d�avril anormalement humide pour la saison, Alger est d�j� r�veill�e. Il est 7h30. Comme chaque matin, le fameux Rapide d�Oran s�appr�te � quitter le quai num�ro 2 de la gare � 7h45 pr�cises pour rallier la capitale de l�Ouest en quatre heures et demie.
Sur le quai, les derniers voyageurs se h�tent billets et bagages en main pour rejoindre leur place dans le train. Devant chaque voiture, un agent de la SNTF en tenue r�glementaire oriente les passagers vers leur si�ge r�serv� d�s l�achat du billet. A l�int�rieur, sous un fond de musique classique, une h�tesse, souriante, se charge de �placer� les voyageurs suivant le num�ro inscrit sur le ticket. A quelques minutes du d�part, une voix annonce le d�part imminent du train. Le coup de sifflet de l�agent � quai retentit et le train d�marre. Apr�s quarante minutes, le rapide entre en gare de Blida. Une courte halte, juste le temps de prendre d�autres voyageurs, avant de reprendre son chemin vers l�Ouest. Dans le calme et le confort tr�s correct de la premi�re classe, les passagers des trois derni�res voitures ont droit � des services nettement diff�rents de ceux des passagers de la seconde classe o� le d�cor est compl�tement diff�rent.
Th� et journaux : �un cadeau de la maison�
Poussant son chariot, l�h�tesse propose boissons chaudes et fra�ches, biscuits, gaufrettes et autres friandises. Le th� et les journaux sont offerts gratuitement. �C�est un cadeau de la maison�, plaisante-t-elle. �Les prestations de services se sont beaucoup am�lior�s ces derni�res ann�es�, nous apprend un jeune Oranais habitu� du rapide d�Oran. �Le train reste le meilleur moyen de transport pour les longs trajets. Contrairement au bus ou � la voiture, dans le train, on peut se d�gourdir les jambes et disposer des sanitaires � tout moment�, poursuit ce grand voyageur. Un avis qu�il partage avec Habiba, une autre cliente fid�le du rapide. �Il n�est pas question pour moi de prendre un avion � chaque fois que je veux me rendre � Oran pour voir mes parents�, assure-t-elle. Native d�Oran, Habiba travaille � Alger depuis plusieurs ann�es. �A 2 300 DA l�aller-retour en premier classe, le choix du moyen de transport n�est pas difficile � faire quand il s�agit pour moi de me rendre chez mes parents. En avion �a revient � 7 400 DA�, poursuit-elle encore. Pas seulement, puisque la s�curit� et la ponctualit� du train sont �galement � l�origine de la fid�lit� sans faille de Habiba pour le train. Depuis quelques ann�es en effet, les descentes inopin�es des �l�ments de la Gendarmerie nationale effectu�es r�guli�rement dans le train ont permis de s�curiser ce moyen de transport qui, autrefois, �tait un lieu de pr�dilection pour les d�linquants de tout acabit. A l�instar de notre interlocutrice, pour nombre de voyageurs, le train rapide est une v�ritable aubaine et un moyen de transport tout indiqu�, particuli�rement pour ceux oblig�s de faire plusieurs allers-retours. Les efforts de la SNTF, allant dans le sens de l�am�lioration du service, sont d�ailleurs grandement salu�s dans le livre des dol�ances mis � la disposition des voyageurs � la caf�t�ria du wagon-restaurant g�r� par la filiale de la SNTF, Restau-Ra�l. Un wagon resto qui, il faut bien le noter, s�pare les deux classes du train. L� encore, caf�, th� et sandwichs sont propos�s aux clients mais � des prix que certains jugent �lev�s. Un caf� � 50 DA, un capuccino � 40 DA et des sandwichs � 120 DA. Cela reste tout de m�me inaccessible pour les petites bourses qui constituent la majorit� de la client�le. Comme un serpent, le train suit une ligne sinueuse et �gr�ne les kilom�tres. A travers les vitres en plexiglas, hameaux, villes et villages se succ�dent. A mesure que les minutes passent, le train fend les paysages verdoyants. Les montagnes du Zaccar et de la Mekkera d�filent dans cette profonde Alg�rie. Difficile de croire que ces r�gions avaient �t� le th��tre des pires atrocit�s quelques ann�es auparavant. Des champs de pommes de terre de A�n Defla aux oliveraies de Sig, en passant par les vignobles de Mascara, les paysages sont aussi vari�s que pittoresques � l�image de ces petites gares des localit�s.
Il mendie en racontant des blagues
Fait surprenant, Alouani, un mendiant originaire de Chlef, a trouv� le moyen de mendier en faisant rire les �mes charitables. Il raconte des blagues sur� les �Mascar�ens�. Handicap� moteur, une poliomy�lite mal soign�e selon lui, c�est un habitu� du rapide. A peine le train avait quitt� la gare de Chlef qu�il fait irruption dans les voitures de premi�re classe. Et d�s les premi�res aum�nes, il est rappel� � l�ordre par le contr�leur, qui lui intime l�ordre de quitter les lieux illico-presto et �d�aller mendier ailleurs�. �Je vous ai d�j� dit de ne pas pousser la porte de la premi�re classe. Allez dans la seconde classe et mendiez � votre guise�, lui dit-il. Le mendiant, tout sourire, ob�it sans mot dire avant de revenir � la charge apr�s le passage du contr�leur. Il est une nouvelle fois rabrou� par ce dernier mais entre-temps, il aura racont� une dizaine de blagues, d�croch� des rires � plus d�un voyageur et ramass� un p�cule avant de descendre � Oued Tlelat. Comme pour les gares de Chlef et Relizane, la voix de l�h�tesse de train r�sonne � nouveau pour annoncer l�entr�e en gare de Oued Tlelat. Derni�re halte avant Oran-ville. Une correspondance y est assur�e pour les passagers voyageant pour Sidi Bel-Abb�s ou Tlemcen. Ceux-ci sont d�ailleurs invit�s � descendre du train. Casquette r�glementaire et moustache roul�e, le contr�leur sillonne, une derni�re fois, les voitures, l�outil de compostage en main. D�un passager � l�autre, il v�rifie la validit� des titres de voyage. Gare � celui qui resquille. �L�amende est de 200 DA si le payement se fait sur place�, nous indique-t-il. Sinon, elle passe � 400 DA, voire des poursuites judiciaires en cas de retard. Le sifflet du cheminot retentit et le rapide quitte la station de Oued Tlelat continuant son parcours vers El-Bahia. Quelques kilom�tres plus loin, le mont Murdjadjo et la citadelle de Santa-Cruz, surplombant la ville d�Oran, se rapprochent. A 12h30, apr�s quatre heures et demie de voyage et 400 km parcourus, le train entre en gare au quartier du Plateau. Etrangement, la station n�est pas annonc�e par la fameuse voix de l�h�tesse. On l�aura compris, c�est le terminus ! Tout le monde descend.
Lotfi Merad

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