Chronique du jour : LETTRE DE PROVINCE
Mirage des stades, mis�re d�un peuple


Par Boubakeur Hamidechi
hamidechiboubakeur@yahoo.fr
Encore heureux qu�il y ait encore le football pour �gayer nos maussades horizons. Une utopie bienvenue qui permet � cette jeunesse de gamberger dans la t�te afin d�exorciser la malvie et le mal-�tre dont elle souffre.
Faute de mieux, elle a aujourd�hui de bonnes raisons de d�cr�ter que le seul drapeau qui vaille la peine de se mettre au garde -�- vous en face serait celui qui est tiss� dans les maillots de l�armada de S�adane. Une consolation au rabais au temps de la canicule, du d�s�uvrement et de la d�mission de l�Etat face � l�immensit� de la demande de cette cat�gorie de sujets. C�est justement � cause de l�indiff�rence du palais que cette masse de laiss�-pour-compte a choisi d��lire, le temps d�une aventure, S�adane comme gourou capable de soigner le �blues� collectif. Bienvenue donc � ce sorcier des stades et � ses magiciens grands faiseurs de f�te au moment o� tout est d�solation dans ce �polygone �troit�. Il est vrai que ce pays n�a que trop �soup� de toutes ses d�convenues sportives qui le rabaissent dans sa propre estime. D��chec en d�route, n�a-t-il pas �t� enclin � croire � toutes les d�raisonnables mal�dictions ? Cette mystique de la damnation qui conjugue le terrorisme, le ch�mage et la faillite des stades pour nous convaincre que nous ne sommes que des bons � rien. Mais voil� que tout � coup un peu de lumi�re �claire cette longue nuit. L�Egypte en fait les frais et nos rues deviennent riantes. Feux de joie qui ont �videmment un sens cach�. Celui qui ass�ne un redoutable constat pour ceux qui dirigent ce pays. La riposte patriotique de la foule d�filante que l�on a longtemps m�pris�e et m�me accus�e qu�elle a perdu ce sentiment. En peu de mots, ces petits Alg�riens sans avenir aiment leur pays sauf qu�ils ex�crent leurs dirigeants. Telle est la morale de ce fugace bonheur le soir du 7 juin. Aujourd�hui (samedi) ses ambassadeurs de l�honneur national joueront une redoutable carte � des milliers de kilom�tres de la maison. Mais qu�importe : le Zamb�ze de l�-bas vaut mieux que toutes les foutaises d�ici. Et c�est de cet ailleurs qu�ils esp�rent recevoir le bon oracle quand les palais officiels d�ici leur sont herm�tiquement hostiles. En somme il ne reste que la magie du foot pour se r�concilier avec soi- m�me. Mais est-ce possible que l�illusion des stades nous soit chaque fois favorable ? C�est qu�il y a des moments o� il faut redevenir raisonnable en redescendant sur terre, comme l�on dit. En effet, l�affaire zambienne n�est gu�re facile � n�gocier. L��pisode �pique face � l�Egypte n�est-il pas �minemment extraordinaire pour ne pas se renouveler ? Pour avoir perdu le go�t de la victoire, toute exception ne confirme-t-elle pas la r�gle ? Voil� qui invite � la prudence. Depuis que l��quipe alg�rienne se d�bat dans le marasme et les crises de confiance, on a souvent parl�, � tort ou � raison, de faillites psychologiques, d�erreurs impardonnables, puis de nouveau climat, de d�part � z�ro, etc., nous n�allons pas reprendre � notre compte la rengaine. Ce Onze alg�rien a une histoire ancienne et a connu des hauts et des bas, plus de bas que de hauts d�ailleurs. D�sormais, il se retrouve � une autre �tape puisqu�il vient d�affirmer une conscience claire et nette de l�enjeu non seulement sportif mais aussi psychologique pour cette communaut� nationale � genoux. C�est dire l��tendue de l�investissement qu�il est appel� � fructifier. Vainqueur, cette �quipe pourra faire r�ver une soci�t� tortur�e par le doute ; vaincue elle restera, non seulement, sur la berge des grandes courants internationaux, et pire, ajoutera une couche de d�sespoir � la... d�sesp�rance g�n�rale. Et c�est sur ce double challenge que S�adane est interpell�. Une immense responsabilit� � l�issue de laquelle il ne sera pas certainement �pargn�. Condamn� � la sanctification ou � la stigmatisation, son r�le va au-del� des aspects techniques. Appel� � rafistoler le moral d�une nation il est, � son corps d�fendant, d�sign� comme le coach psychologique d�une soci�t� malade de ses �checs. L� commence le travail de cet entra�neur. Lui qui a h�rit� d�une charge lourde n�a sans doute pas accept� la responsabilit� qu�apr�s avoir pris en consid�ration ce param�tre extra-sportif. Dans une formation qui a eu beaucoup de rat�s, la t�che n�est pas particuli�rement ais�e. Autant demander � un capitaine de prendre possession de son navire en pleine temp�te. Il pr�f�rerait de loin les eaux calmes d�une baie. Mais Sa�dane est un homme qui n�est pas rebut� par la difficult�. Il a pris l��quipe nationale en plein doute et l�a remise sur pied. Aujourd�hui, on lui demande une qualification. C'est-�-dire devenir alchimiste et transformer un mirage en r�alit�. Certes, il a d�j� r�alis� l�exploit face � un redoutable adversaire, l�Egypte leadership du football africain, mais est-ce sens� d�exiger de lui qu�il revoie � la hausse l�objectif initial ? Il est vrai que Sa�dane n�attire pas l��chec. C�est appr�ciable pour une �quipe d�j� assaillie par la malchance et dans le m�me temps insuffisant pour r�ver � un grand destin. Le bon sens commande s�rement de refreiner de trop grandes ardeurs en se contentant de positiver tout de suite sur une qualification africaine � notre port�e et ne consid�rer la possibilit� d�une participation au mondial que comme un bonus. Cela nous vaccinera par avance contre la d�sillusion. Tant il est vrai que le g�nie ne court pas les rues chez nous, mais il n�est pas �galement une denr�e rarissime. Consolons-nous imm�diatement de l�Afrique, ce n�est d�j� pas mal pour un pays rel�gu�, depuis 6 ans, aux oubliettes de ce continent.
B. H.

Nombre de lectures :

Format imprimable  Format imprimable

  Options

Format imprimable  Format imprimable