Chronique du jour : LETTRE DE PROVINCE
Cr�dit des m�nages, discr�dit d�un gouvernement
Par Boubakeur Hamidechi
hamidechiboubakeur@yahoo.fr


��Moi, si j��tais le gouvernement� � C�est ce que l�on entend souvent dans les caf�s en guise de r�crimination. N�emp�che que nous aussi si nous �tions d�inconditionnels partisans de ce gouvernement, nous serions cette fois-ci extr�mement perplexes apr�s la promulgation de cette fameuse (fumeuse) loi de finances compl�mentaire. Interdire d�un trait de plume et � la sauvette le cr�dit � la consommation des m�nages constitue, � l��vidence, un acte politique r�dhibitoire en ce sens qu�il alourdit un climat social d�j� tendu.
Plus qu�une erreur de gestion, une telle mesure est d�ores et d�j� interpr�t�e comme une atteinte � la dignit� de milliers de salari�s. Une nouvelle source qui irriguera l�impopularit� d�j� notoire du pouvoir. Le vent du boulet se l�vera s�rement dans quelques semaines quand les cat�gories sociales concern�es sauront, par elles-m�mes, ce que cachent les �bonnes intentions � de ce gouvernement. Elles, � qui l�on a expliqu� qu�il y allait de l�assainissement des finances publiques et de la pr�servation du pouvoir d�achat des m�nages en leur �vitant le surendettement, d�couvriront alors que l�aust�rit� � laquelle elles sont �convi�es� est non seulement s�lective � leurs d�pens mais discriminatoire au regard du train de vie de l�Etat dont les d�penses somptuaires scandalisent par leur inutilit�. Dans une tribune libre publi�e par un journal alg�rien( 1), un �conomiste constatait avec justesse que �� l�application de cette mesure est une preuve de plus de l�invisibilit� � long terme, l�absence de planification et l�incoh�rence des orientations �conomiques dans le pays�. Dans les faits, cela revient � instruire un proc�s en incomp�tence d�un gouvernement ruineux. C�est donc ce vent du boulet social qui guette d�sormais un Premier ministre maladroit dans ses arbitrages et l�argentier de l�Etat se r�v�lant sous les traits d�un technocrate obtus. Car il va de soi que ce tandem est en train de faire l�unanimit� contre lui, le pla�ant dans l�inconfortable situation de clarifier une d�marche dont les experts les plus prudents la trouvent intempestive par son impact psychologique et peu r�mun�ratrice pour la sant� financi�re de nos banques. Chiffr� � environ un milliard de dollars, le cr�dit � la consommation ne co�te finalement qu�un peu plus que ce qui a �t� d�pens� par un festival Panafricain rat� et d�autres festoiements au rabais. L�on pourrait m�me pousser la comparaison jusqu�� demander � Ouyahia � quelle hauteur l�argent public a servi � arroser les r�seaux d�all�geance au 3e mandat. Toujours dans le chapitre du m�contentement provoqu� par cette loi de finances compl�mentaire, l�on d�c�le �tonnamment les coups de boutoir d�une partie du patronat (la Cipa) et qui sonnent comme le d�saveu d�un alli� du pouvoir. Une critique sans d�tours de la part d�une conf�d�ration jusque-l� consid�r�e comme le socle et le relais des options lib�rales du r�gime. Dans l�autre versant de la soci�t�, l� o� nichent les classes pauvres, l�on continue � lui reprocher ses mauvaises approches des probl�mes de l�emploi et des bas revenus. D�un c�t� comme de l�autre, les proc�s d�intention se multiplient. De la part du patronat, l�on retient contre lui sa frilosit� face � un syst�me bancaire bancal quand chez les salari�s l�on souligne que l��chelle des revenus n�a jamais �t� autant in�galitaire. Enfin pour mieux forcer le trait et caricaturer l�incomp�tence de ce gouvernement, ces derniers lui rappellent incessamment que l�imp�t sur la fortune et le patrimoine, dont il se gausse, n�est qu�une immense plaisanterie. C'est-�-dire de la rh�torique de politiciens destin�e tout juste � anesth�sier la contestation. A la v�rit� la liste des inqui�tudes, porteuses des germes de la grogne et du d�senchantement, est tellement longue que m�me les courants hostiles au chef de l�Etat ne souhaitent pas moins, de nos jours, qu�il sorte de sa r�serve, abr�ge son cong� et vienne peser de son autorit� pour que son gouvernement revoie sa derni�re copie. C�est qu�en ces temps incertains o� la confusion r�gne en ma�tresse, l�inaptitude minist�rielle constitue la pire maladie pour le pays. Tout en craignant le pire, les Alg�riens savent parfaitement ce que valent les comp�tences de certains de ces ministres. A dire les choses avec mesure, l�on serait enclin � �tre moins s�v�re avec Ouyahia tant il est vrai que dans son r�le d�intendant g�n�ral dans un syst�me fond� sur les castes et des lobbies d�int�r�t, ses arbitrages sont loin de la raison d�Etat et plus pr�s du �t�cheronage � quasi mafieux. Tout comme son pr�d�cesseur Belkhadem, dont il a d�ailleurs h�rit� de la grande majorit� de l�Ex�cutif, son action se r�sume � des petits compromis internes. Ratant ce premier examen post-troisi�me mandat, en choisissant de p�naliser une partie des Alg�riens afin de d�samorcer la crise qui s�annon�ait avec l�Union europ�enne au sujet de la r�troactivit� de la loi portant obligation d�ouverture du capital �tranger au patronat national, il nous donne une curieuse d�finition du �patriotisme �conomique �. Certes la fin du cr�dit � la consommation va en grande partie ass�cher les fili�res commerciales �trang�res mais pourquoi veut-il ignorer qu�il pose dans le m�me temps un grave probl�me � ses compatriotes sans possibilit� d��pargne et qui n�ont d�autre recours que la petite dette chronique pour changer de qualit� de vie. L�aust�rit� n�est vertueuse que lorsqu�elle est �quitablement r�partie. Or elle ne l�est pas chez nous quand la gabegie dans la gestion de l�argent public profite exclusivement aux grandes fortunes. Le Premier ministre Ouyahia est un habitu� de ce genre de provocation politique. D�j� en 1996, sous la pr�sidence de Zeroual, n�a-t-il pas �t� l�auteur de la plus impopulaire ponction sur les salaires ? En ce temps-l�, il trouva en face de lui un syndicaliste de grande conviction morale pour le menacer d�une gr�ve g�n�rale. H�las n�est pas Abdelhak Benhamouda qui le veut et moins encore son successeur actuel dont on n�a pas encore entendu le moindre commentaire sur cette mesure choquante parce qu�elle est �minemment injuste. Dans deux semaines, au plus, les vacances prendront fin. Et ce sera alors le moment pour Ouyahia de venir devant l�opinion s�expliquer sur cette �trange feuille de route.
B. H.
(1) Lire l�analyse de Mohamed Chabane, chercheur au Laboratoire d��conomie et de science sociale de Rennes (France), publi�e par Le quotidien d�Oran en date du 6 ao�t.

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