Culture : Kamel Hamadi : m�moire du patrimoine musical alg�rien

Samedi dernier (5 d�cembre), un concert exceptionnel �tait donn� � la Cit� nationale de l�histoire de l�immigration.

L�association G�n�riques a voulu rendre hommage � un tr�s grand artiste, Kamel Hamadi, qui a marqu� l�histoire de l�immigration alg�rienne par ses cr�ations musicales, par sa contribution � faire exister la musique alg�rienne ici en France et dans le pays et en participant � l�enrichissement du patrimoine musical alg�rien. Le plateau �tait on ne peut plus divers et vari� et regroupait, entre autres artistes autour de Kamel Hamadi, Akli Yahiat�ne, Mohamed Allaoua, Rafik Kortebi... le concert, intitul� �C��tait l�exil�, �tait pr�sent� par Abdelkader Bendam�che. Nous avons rencontr� Kamel Hamadi � deux jours du gala qui lui a �t� consacr�. Tous ceux qui le connaissent et le suivent, depuis de tr�s longues ann�es dans l�immigration, le qualifient d�homme tr�s modeste, malgr� ses 55 ans de m�tier comme musicien, compositeur, interpr�te qui a servi la musique, toute la musique alg�rienne, quelle vienne des montagnes de Kabylie, des Aur�s, de l�Hamri, de La Casbah ou encore des immensit�s d�sertiques. Kamel Hamadi, 74 ans, nous a donn� rendez-vous dans un troquet du 18e arrondissement, un quartier parisien au plus pr�s des compatriotes qui ne ratent pas un de ses galas parisiens. Et s�il fallait une preuve de l�amour et du respect dont il est entour�, elle nous a �t� spontan�ment fournie par des Alg�riens anonymes qui l'ont aper�u dans le caf� et qui ont interrompu notre entretien pour saluer l�artiste ou encore par le chanteur A�t Menguellet qui est venu, lui aussi, en compagnie de son �pouse, embrasser �le v�t�ran� avant de lui donner rendez-vous � la cit� de l�immigration.

Par Khedidja Baba-Ahmed (bureau du Soir � Paris)

Le Soir d�Alg�rie : Vous �tes r�put� comme l�artiste qui a contribu� au patrimoine musical alg�rien et en �tes sa m�moire. Et vous, comment vous d�finiriez-vous ?
Kamel Hamadi :
Je me trouve dans le milieu artistique et j�ai essay� d�apporter ma petite contribution, sans plus.
Et vous continuez � le faire ?

Tant que je vis, je continuerai encore � le faire en essayant d��tre dans de bonnes conditions.
Vous les avez aujourd�hui ces bonnes conditions ?

J�ai toujours travaill� comme j�ai voulu. Je n�ai d�rang� personne. J�ai essay� de faire plaisir � tous les amis et copains avec qui j�ai eu � travailler. Jusqu�� aujourd�hui, el hamdoulillah, je ne me plains pas.
Vous avez compos� et interpr�t� en kabyle, en arabe et en fran�ais. Que repr�sente pour vous ce passage ais� d�une langue � l�autre : l'universalit� de l�art musical ou autre chose ?
Bien avant la chanson, j�ai aim� le th��tre. J�ai �crit et jou� dans cette forme d�expression et continue � le faire. J�ai eu le plaisir de rencontrer, dans le th��tre comme dans la musique, des artistes de toutes expressions linguistiques, que j�ai admir�s, qui sont devenus mes amis, mes professeurs comme, entre autres, Slimane Azem, Ahmed Ouahbi, Allaoua Zerrouki, Mohamed El Djamoussi, Abderrahmane Azziz et tant d�autres. De mon temps, j�ai sillonn� l�Alg�rie. Je suis n� en Kabylie, je suis fier d��tre Kabyle. Je respecte ma langue et je veux que les gens la respectent, mais en Alg�rie l�on parle arabe, fran�ais, kabyle, le parler alg�rien et c�est l� une richesse. J�ai v�cu � Alger, � Oran, j�ai eu la chance de fr�quenter Blaoui El Houari, Benzerga, Ahmed Saber, Ahmed Ouahbi. J�ai travaill� avec tous ces artistes et j�ai par ailleurs un grand amour pour El Melhoun, pour la po�sie bedouine et notamment Khelifi Ahmed, Abdellah Kriou, Ababsa et d�autres d�un autre genre musical, tels que A�ssa El Djermouni, Fergani, Ahcen El Annabi. Ces artistes sont toute l�Alg�rie et, moi, je suis Alg�rien. Je fais de la musique en m�int�ressant � toutes ses expressions du Nord au Sud, de l�Est � l�Ouest. Notre pays est un tr�s grand pays, riche en musique, en po�sie, en m�lodie, en rythme et il est de mon devoir de m�int�resser � toute la musique de chez moi. Je consid�re que j�ai eu la chance de fr�quenter tous ces grands artistes qui exer�aient avant moi.
Vous qui �tes dans la musique depuis plus d�un demi-si�cle, comment qualifierez-vous l��volution des musiques alg�riennes durant ces derni�res ann�es et plus globalement, pensez-vous que les autorit�s alg�riennes apportent leur soutien � organisationnel, financier et autres � aux artistes alg�riens ?
Les temps changent. De mon temps, on enregistrait sur une seule piste. On r�p�tait beaucoup, les musiciens connaissaient leurs chansons. Maintenant, ils enregistrent sur plusieurs pistes et il y a beaucoup de choses qui sont arriv�es. Je ne suis ni pour ni contre. J�ai l�habitude, quant � moi, de travailler selon l�ancienne �cole : s�il n�y a pas un orchestre derri�re moi, s�il n�y a pas la tonalit�, le rythme, je ne peux pas chanter. Ceci dit, je comprends qu�aujourd�hui les mani�res de faire soient diff�rentes. C�est le monde qui se modernise et pas seulement dans la musique, en toutes choses.
Vous avez �t� d�cor� cette ann�e en France de la m�daille de Chevalier de la L�gion d�honneur : que repr�sente pour vous cette d�coration et pour ce qui est de votre pays, l�Alg�rie, consid�rez-vous que les autorit�s vous ont rendu l�honneur que m�rite le travail que vous effectuez, depuis 55 ans, dans votre domaine � la musique � et notamment tout ce que vous avez produit dans le domaine du chant patriotique, qui a marqu� votre r�pertoire ?

Je remercie d�abord ceux qui ont pens� � moi, tout simplement parce que �a fait 50 ans que je travaille pour l�immigration et c�est ce travail-l� qui a �t� r�compens� ici en France. Mais il faut que je vous dise que je ne suis absolument pas l�s� dans mon pays. Chaque fois il y a eu des d�corations en Alg�rie, pour les anciens ou les artistes actuels, j�ai fait partie de ces gens que le pays honorait.
Vous n�avez donc pas �t� oubli� comme on le dit �a et l� ?

Non, certains le disent, mais j�affirme que non, j�ai toute ma place dans mon pays. Derni�rement, � la Journ�e de l�artiste, j��tais � Tizi-Ouzou et dans mon village natal on a fait une grande f�te en mon honneur. Plus g�n�ralement, lors de chaque honneur rendu � des v�t�rans, j�ai fait partie de cet honneur et j�en suis tr�s heureux.
Un journaliste alg�rien, Mohamed Berkani, r�alise actuellement un documentaire qui vous est consacr�. Comment percevez-vous ce travail ? Une cons�cration ? Un hommage ? Une action contre l�oubli ?
Je ne pense pas du tout qu�il y ait oubli. Vous savez, la seule chose qui compte pour moi est la cons�cration que me fait le public. Je crois beaucoup au public. Si l�on fait un gala et que les gens ne viennent pas, c�est que l�on n�int�resse personne. Or, j�ai fait des galas avec A�t Menguellet, avec Nora (son �pouse), avec Driassa et tant d�autres et l�on a toujours fait le plein. Si vous jouez bien, le public vous le rend bien et si vous jouez mal, il vous siffle et ne vient plus � vos spectacles. Tout �a pour vous dire que le public est la meilleure des cons�crations. Maintenant, tout le reste participe naturellement � �crire l�histoire de la musique et l�on ne peut que s�en f�liciter.
K. B.-A

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