Actualités : PROCÈS EN APPEL DE L’AFFAIRE ALGÉRIE TELECOM DE SÉTIF
Dix années de prison requises contre les accusés


Plusieurs fois reporté, le procès en appel de l’affaire d’Algérie Télécom, où sont poursuivis, pour conclusion de marché contraire à la réglementation en vigueur et négligence ayant abouti au détournement de deniers publics, trois ex-cadres supérieurs, dont les deux anciens P-dg, en l’occurrence, Slimane Kheireddine (60 ans), et Mouloud Djaziri (59 ans) et le DFC, Afadjen Mouloud (57 ans), s’est finalement tenu, mercredi dernier, au niveau de la cour de Sétif et jugé par la chambre pénale.
Notons qu’en première instance, le tribunal correctionnel de Sétif avait condamné Slimane Kheïreddine, à 5 ans de prison ferme, et son successeur, Mouloud Djaziri, à 3 ans d’emprisonnement. Le directeur des finances et de la comptabilité, Afadjen Boualem, a été, lui aussi, condamné à une peine d’emprisonnement de 3 ans. Poursuivis sous les mêmes chefs d’inculpation, Meziani Ahmed (directeur central par intérim) s’est vu infliger une peine d’une année d’emprisonnement, tout comme deux autres cadres, MM. Kehili Ahmed (56 ans) et Meziani Ahmed (55 ans) en l’occurence. L’un des deux associés de l’entreprise privée ayant bénéficié du marché en question avec Algérie Télécom, M. Djamel (52 ans), écopé de deux années de prison avec sursis. Egalement impliqué, son fils, M. Kheireddine (25 ans), a été condamné à 12 mois de prison avec sursis. En fuite, l’autre associé avait été condamné à 10 ans de prison ferme, assortis d’une amende de un million de dinars. La même peine avait été prononcée à l’encontre de son fils, lui aussi en fuite. De lourdes amendes financières ont été décidées à l’encontre de la société Câblerie de Sétif. L’affaire d’Algérie Télécom porte sur plusieurs chefs d’accusation, dont faux et usage de faux dans des documents comptables, passation de marché non conforme à la législation en vue de faire bénéficier autrui des avantages non justifiés, négligence ayant abouti au détournement des finances publiques. La genèse de cette affaire remonte, selon l’arrêt de renvoi du juge d’instruction de la troisième chambre du tribunal de Sétif, au 11 février 2007, quand Algérie Télécom avait lancé un avis d’appel d’offres national et international portant le n° 01/2007 pour l’acquisition de câbles urbains multipaires de moyenne et grande capacité. Six soumissionnaires ont alors déposé leurs offres, l’Entreprise de câble électrique et téléphonique du Portugal, la Société de câble du Liban, la Société de câblerie sétifienne, la société Escablo de Turquie, la Société de câble et télécommunication d’Alger et enfin la société Téléco- Câble de Tunisie. Après l’ouverture des plis et étude des offres par la direction d’Algérie Télécom, le marché a été confié, en date du 10 juillet 2007, à la Société de câblerie de Sétif qui avait présenté l’offre la moins-disante, de plus de cent milliards de centimes (1 027 127 110,93 DA). Le 14 juillet 2007, il a été procédé à la signature et l’approbation du contrat mais pour un autre montant, soit 1 356 545 786,78 DA, un prix qui dépasse celui présenté lors de la soumission et et les offres des autres concurrents. Et c’est le président-directeur général d’Algérie Télécom de l’époque, Slimane Kheireddine, qui approuva le contrat avec ce nouveau montant le 7 août 2007, alors qu’il était en congé annuel. Le lendemain, soit le 8 août 2007, et en vue de s’approprier, le plus vite possible, l’avance de 15% du marché, le gérant de la Société de câblerie sétifienne avait présenté à Algérie Télécom deux documents provenant de la banque Natixis, l’un portant caution de garantie bancaire et l’autre avance forfaitaire et de bonne exécution. Le gérant se verra remettre un chèque de banque d’un montant de plus de vingt milliard de centimes (203 481 868,02 DA), chose non prévue dans le contrat qui stipule que le paiement doit être effectué par virement bancaire sur le compte de la société ouvert à la banque Natixis. Après le retard, dépassant les huit mois, mis pour l’approvisionnement en câbles et sa difficulté à récupérer le montant de l’avance remis à la société, il s’est avéré que les deux documents qui ont permis au gérant de la câblerie sétifienne de prendre possession du chèque sont faux. Chose qui a été confirmée par le laboratoire scientifique de la police scientifique de Constantine après le dépôt de plainte d’Algérie Télécom, ainsi que par la réponse de la banque Natixis qui avait déclaré n’avoir jamais délivré ce genre de documents. Le chèque de vingt milliards a, quant à lui, été encaissé en plusieurs opérations de retrait, la dernière en date remonte au 17 septembre 2007, soit après seulement quarante jours de la signature du contrat. Appelés à la barre pour être interrogés par le président, les prévenus ont tous nié les faits retenus contre eux et chacun a tenté de rejeter la balle sur l’autre. Entourés d’un collectif d’avocats, les accusés, qui se sont succédé à la barre, ont tenté de se disculper en déclarant avoir agi en toute légalité et en respectant la réglementation en vigueur. Les ex-cadres d’Algérie Télécom ont déclaré avoir été tout simplement escroqués par leur partenaire, à savoir la Société de câblerie sétifienne, appartenant aux associés M. Sami et M. Kheireddine. Interrogé en premier par le juge sur le contrat signé avec la Société câblerie de Sétif, dont le montant est supérieur à celui proposé lors de la soumission, Slimane Kheireddine a affirmé, qu’effectivement, il y avait eu révision du prix vu l’augmentation à l’époque du prix du cuivre sur le marché international, un produit nécessaire à la fabrication des câbles. En réponse au juge concernant le chèque remis au gérant de la Société de câblerie sétifienne au lieu d’un virement bancaire, l’ex-P-dg a répondu qu’il ignorait complètement cette opération, qui a été décidée par le directeur de la finance et de la comptabilité, et qu’il n’a jamais donné d’ordre ou d’instruction dans ce sens. M. Mouloud Jaziri a, quant à lui, nié toute implication dans cette affaire, et que sa signature sur le contrat révisé avec la Société de câblerie sétifienne faisait suite à l’accord donné par le Pdg et la commission d’évaluation des marchés. Enfin le DFC, Afajen Boualem, a, quant à lui, affirmé avoir effectivement remis un chèque au lieu d’un virement bancaire au gérant de la Société câblerie de Sétif, et ce en exécution d’un ordre téléphonique du P-dg, Slimane Kheireddine. Pour sa part dans un long réquisitoire, le représentant du ministère public a démontré la complicité des prévenus dans cette affaire d’escroquerie qui a coûté la bagatelle de plus de 20 milliards de centimes à la trésorerie d’Algérie Télécom et requis de lourdes peines, à savoir dix ans de prison assortis d’une amende de un million de dinars chacun. La défense a, pour sa part, essayé de blanchir ses mandants et de faire porter le chapeau aux prévenus en fuite, en l’occurrence M. Zineddine (52 ans) et son fils M. Samy (23 ans). Ces deux derniers font l’objet d’un mandat d’arrêt international lancé le 18 février 2009. L’affaire a été mise en délibéré et le verdict sera rendu mercredi prochain.
Imed Sellami



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