Vox populi : L'artiste et le mulet

Un riche collectionneur, sentant sa mort proche rassembla toute sa richesse de timbres poste, l��quivalent d�un tr�sor identitaire qui se constituait d�enveloppes illustr�es et de timbres de toutes les �poques qu�a connues l�Alg�rie avant et apr�s l�ind�pendance, oblit�r�s et non oblit�r�s, les timbres dans toutes les formes et caract�ristiques existants, timbres circulaires, timbres triangulaires, les surcharg�s, les non dentel�s et toutes sortes de documents philat�liques pour enrichir des panneaux d�exposition.
Aussit�t dit aussit�t fait. Il prit tout son barda philat�lique, classeur, album photos et il est parti � la rencontre de ses bienfaiteurs de la fonction culturelle qui l�attendaient dans ces lieux qui symbolisent l�imagination, l�intelligence et l�intellectualit�, au tournant d�un couloir des pas perdus et des bureaux somnolents, fief de l�endormissement et des fins cajoleurs r�unis pour la circonstance de la carence et de l�inertie dans ce contenant de la culture de l�esprit. Voil� qu'il leur dit : c�est une bonne occasion que de vous rencontrer tous ensemble et puisque vous �tes tous r�unis ici dans ce bureau agr�ablement climatis�, je viens solliciter de votre part la gentillesse et la faveur de votre grande et large s�r�nit� le responsable de l�inculture de bien vouloir m�inscrire sur votre liste artistique des artistes postulants � participer � vos prochaines manifestations. Ensuite dans la foul�e, il a voulu leur mettre plein la t�te et les yeux avec ses histoires philat�liques. Et il a sorti tout ce qu'il avait emmagasin� dans sa cervelle comme histoires du timbre poste dans le monde et sp�cialement en Alg�rie avec toutes ses r�f�rences et son exp�rience dans ce hobby ; ils �taient l� et ils semblaient fatigu�s � l��couter d�biter des �neries, devaient-ils se dire tous, surtout le petit trapu en face de lui (ekssir ou emdehdeh) avec une mine patibulaire qui ne m�riterait pas d��tre �timbrifi�e� et qui n�inspirait pas le sentier de la culture. Et � lire son rictus, il devait se dire dans sa tronche que cet artiste devait �tre un d�bile s�rement et compl�tement timbr� � force de r�der r�guli�rement du c�t� de la poste � la recherche de ces petites vignettes. Il devait se poser la question et se dire : comment un grand gar�on comme lui continue-t-il � cet �ge avanc� � jouer � rassembler des timbres poste pour le plaisir de voir des images align�es sans raison valable dans un album, sans plus ? Alors l'artiste c'est dit bof, il faut ignorer ces pr�jug�s et essayons de convaincre cette �djema� � de meilleurs sentiments et peut-�tre qu�ils ne sont pas aussi mauvais que �a ? Et que ce sont de bons partisans des activit�s culturelles toutes confondues � voir leurs faces d�ange. Vous savez, leur a-t-il dit, quand j��tais petit, je me rappelle que ma m�re me disait toujours qu�il faut partager avec les autres (mes fr�res et s�urs) tout ce que l�on a et qu�il ne faut pas cacher les bonnes choses pour les garder ou manger tout seul, autrement �edessa� (plaque dermique) vous para�tra sur le visage pour vous punir. Tout cela pour vous dire et vous �clairer, chers Messieurs sur la pratique de la philat�lie, qui demeure un loisir et une passion �ducative au m�me titre que les autres activit�s culturelles. Ainsi apr�s avoir dit toutes ces belles choses sur la philat�lie et sa promotion, avec � l�appui des photos, des documents et des coupures de journaux, et citer des blogs d�di�s � la philat�lie, il attendait la r�action de ces �sp�cialistes� de la culture. Il faut faire une demande �crite avec tous vos �tats de services qu�il lui dit le zigoto, qui jouait le chef du jury auquel il �tait confront�, et attendre la d�cision de la commission, la seule habilit�e � se prononcer � ce sujet. Mais Messieurs, vous connaissez d�j� mon travail et je suis connu localement dans cette activit� que j�ai toujours remplie convenablement � travers toutes mes expositions que ce soit � la poste, au centre culturel ou � la biblioth�que de la wilaya, et j�ai m�me particip� avec vous � l��change culturel entre Chlef et Constantine, et j�ai toujours donn� pleine satisfaction. Vous savez cela fait plus de dix sorties que vous organisez et c�est toujours les m�mes personnes qui sont invit�es et qui font partie du voyage sans formuler de demande �crite. Et vous conviendrez avec moi que ce que vous faites est injuste car comment se fait-il que vous choisissez trois artistes peintres pour le m�me voyage et que vous refusez un philat�liste ? En face de lui, la personne � qui il s�adressait semblait plus int�ress�e par son t�l�phone portable qu�au d�bat. Alors il s'est dit peut-�tre qu�il �tait temps de partir et de continuer � vivre et � aimer ses timbres en cachette comme il l'a toujours fait depuis quarante ans�
Hamid Dahmani

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