Document : PARTI POUR LA LA�CIT� ET LA D�MOCRATIE (P-L-D) Pour une R�publique Alg�rienne La�que
1. Une modernisation sans
modernit�
D�s l�ind�pendance, les dirigeants du pays refusent de faire la
s�paration entre le politique et le religieux d�o� l�introduction de
l�article 2 dans la premi�re Constitution alg�rienne �Islam, religion de
l�Etat�. Ils se sont ing�ni�s ainsi � instrumentaliser l�Islam pour
l�gitimer leur pouvoir mais aussi et surtout pour emp�cher toute
autonomisation politique de la soci�t�. Les pouvoirs en place se sont
oppos�s farouchement � toute ouverture d�mocratique qui aurait pu mettre
en perspective la construction d�un Etat de droit. Une convergence de
fait a �merg� entre les courants nationaliste et islamiste. Le courant
nationaliste mit en �uvre une politique de modernisation des
infrastructures �conomiques et sociales du pays, mais � aucun moment
cette politique ne s�est accompagn�e par la d�mocratisation de la sph�re
politique. L�aile islamiste s�est ralli�e � l�id�e de modernisation du
pays � condition que celle-ci ne d�bouche pas sur les acquis de la
modernit�, en un mot oui � la modernisation de l�Alg�rie - mais sans
modernit�. Car cette derni�re signifie un �tat de droit, avec des
�lections libres, des libert�s de conscience et d�expression, des
libert�s individuelles et collectives, et une r�elle s�paration entre
les pouvoirs ex�cutif, l�gislatif et judiciaire, etc. En fait, l�id�e
dominante � cette �poque-l� qui a pr�sid� � tous les choix strat�giques
du pays, largement approuv�e par tous les patriotes et le courant
socialisant, est qu�un programme socio�conomique moderne et ambitieux de
d�veloppement assurant une justice sociale v�ritable � lui seul, pouvait
assurer le d�collage de l�Alg�rie au niveau social et �conomique et
permettre dans son sillage l�ancrage du pays � la modernit�. Le summum
de l�alliance entre les nationalistes et les islamistes fut atteint avec
le virage ultralib�ral de l��conomie alg�rienne, � partir de 1980. Mais
les desseins de cette alliance ont �t� fortement contrari�s par la crise
�conomique mondiale avec la chute du prix du baril de p�trole en 1986,
le discr�dit du parti unique et la disparition du bloc socialiste.
L�instauration d�un Etat th�ocratique en Iran a encourag� le mouvement
islamiste d�s le d�but des ann�es 1980. Il a permis l�infiltration de ce
dernier au sein de l�universit� alg�rienne. Les premi�res violences
arm�es ont vu le jour avec le �maquis� de Bouyali. La prise des mairies
en 1990 par le Fis fut une �tape dans la confiscation totale du pouvoir
politique par les islamistes. L�arr�t du processus ��lectoral� en
janvier 1992 a permis de sauver l�Alg�rie. Depuis 1992, l�islamisme
politique est responsable de l�assassinat de dizaines de milliers de
citoyens alg�riens et alg�riennes, dont beaucoup dans des conditions
particuli�rement atroces ; des milliers de bless�s, dont certains
mutil�s � vie ; des centaines de ses jeunes filles et jeunes femmes
kidnapp�es et soumises � des viols collectifs et r�p�t�s, avant d��tre
le plus souvent d�capit�es, quand d�autres ont perdu la raison; des
millions d�habitants pouss�s � l�exode des campagnes vers les villes ou
d�une r�gion vers une autre, fuyant les terroristes ; des centaines de
milliers de ses citoyens, constitu�s principalement de cadres,
d�artistes et d�intellectuels, se sont exil�s; sans compter les
milliards de dollars de d�g�ts dus aux destructions, aux sabotages et
aux incendies commis par les islamistes. Ni la loi sur la rahma, ni
celle de la concorde civile, ni celle de la r�conciliation nationale, ni
le projet d�amnistie g�n�rale ne feront oublier au peuple alg�rien le
g�nocide islamiste. Malgr� cela, nous assistons, � l�instar de tous les
pays musulmans, � la mont�e en puissance de l�islamisme politique dans
toute sa diversit� qui vise � l�instauration d�un Etat th�ocratique plus
in�galitaire et un ordre moral encore plus attentatoire aux libert�s de
conscience et d�expression des musulmans et des croyants des autres
religions, ainsi que des agnostiques et de non croyants. Les islamistes
ne sont toutefois pas les seuls � exploiter la religion � des fins
sordides. Les dirigeants politiques de nos pays font de m�me, pour se
maintenir ind�finiment au pouvoir et continuer � opprimer leurs peuples.
C�est pourquoi, l�Alg�rie doit tirer toutes les conclusions de cette
exp�rience sanglante et adopter un antidote pour sortir de cette crise.
Notre pays doit pour cela s�inspirer de certaines exp�riences
historiques � valeur universelle et f�condes qui sont parvenues � mettre
fin aux guerres de religions qui ont s�vi plusieurs si�cles. Toutes les
tentatives de musellement de la soci�t� depuis 1962 n�ont fait toutefois
que ralentir, mais non � emp�cher, l�in�luctable marche de notre pays
vers la modernit� et la s�cularisation des institutions officielles et
l��volution des mentalit�s en d�pit de la persistance de l�islamisme
politique dans la soci�t� alg�rienne et de man�uvres au sommet de
l��tat. Gr�ce � leur g�nie, des peuples ont contribu� � des degr�s
divers � la s�paration du politique et du religieux. Mais la plus grande
avanc�e �mancipatrice dans ce domaine est, sans conteste, la la�cit�.
Les militants du Parti pour la La�cit� et la D�mocratie (PLD) sont
convaincus que l�instauration de la la�cit� en Alg�rie est le seul moyen
de se prot�ger des cons�quences des manipulations politico-religieuses,
d�o� qu�elles viennent pour construire une Alg�rie r�publicaine,
d�mocratique, moderne et sociale. Il nous faut cependant pr�ciser le
sens de la la�cit�, pour lever toutes les confusions qui l�entourent
d�autant que ses ennemis la confondent sciemment avec l�ath�isme.
2. Qu�est-ce que la la�cit� ?
La la�cit� est la forme d�organisation politique la plus aboutie,
consacrant le long processus d�autonomie de l�individu par rapport � la
communaut� ; processus enclench�, � partir des XVe- XVIe si�cles en
Occident, et port� intellectuellement pas les philosophes des Lumi�res.
Elle est en ce sens un puissant vecteur de l�affirmation des libert�s
individuelles et collectives. Elle est un ordre juridique d�organisation
de l��tat, fond� sur une s�paration radicale entre les institutions
religieuses et l��tat. Pour autant, la la�cit� n�est pas antireligieuse,
puisqu�elle garantit la libert� de conscience, c�est-�-dire le droit de
chacune et de chacun d�adopter la religion de son choix, d�en changer ou
de n�en croire � aucune. Ceci est �galement valable pour toutes les
opinions politiques, philosophiques, culturelles� De m�me qu�elle
garantit leur libre expression dans la sph�re priv�e. C�est ainsi qu�on
peut �tre tout naturellement la�que et musulman, la�que et chr�tien,
la�que et juif, la�que et bouddhiste, la�que et ath�e� La la�cit� est en
revanche anticl�ricale, dans la mesure o� elle s�oppose � la pr�tention
des religions, dont l�Islam, � vouloir r�genter tous les domaines de la
vie des individus. Elle assure de ce fait la primaut� de la citoyennet�
sur l�appartenance religieuse ou communautaire. Voil� pourquoi, elle
bannit les religions et les particularismes de la sph�re publique, tout
en garantissant leur libre expression dans la sph�re priv�e.
3. Qu�entendons-nous cependant par sph�re publique et sph�re
priv�e ?
La sph�re publique, c�est l�espace de la puissance publique. C�est,
autrement dit, l��tat et les collectivit�s territoriales (wilaya,
commune). Elle ne doit �tre r�gie ni par les lois religieuses ou
d�inspiration religieuse, ni par les particularismes de quelque nature
que ce soit, mais par des lois positives, modernes et communes � tous
les citoyens, au-del� de ce qui les particularise en tant qu�individus
(religion, irr�ligion, sexe, langue, couleur de peau�) C�est pour cette
raison que cette sph�re est soumise au principe de neutralit�. Il faut
comprendre ce principe dans le sens d�indiff�rence de la puissance
publique envers aussi bien les religions que les diverses opinions et
appartenances existant dans la soci�t�, afin d��tre en mesure de traiter
sur un pied d��galit� tous les usagers, en leur qualit� de citoyens,
tout en faisant abstraction de leur qualit� d�individu. Cette neutralit�
s�applique aux lois et r�glements qui r�gissent le fonctionnement de
cette sph�re, ainsi qu�� ses rapports avec ses citoyennes et citoyens ;
� son personnel, qui ne doit afficher, conform�ment � sa mission de
service public, aucun signe d�appartenance ; et � ses locaux o� ne doit
s�afficher aucun symbole, en dehors de ceux de la R�publique, qui sont
des valeurs communes � tous les membres de la nation. Elle s�applique
aussi aux �l�ves des �tablissements scolaires primaires, moyens et
secondaires de l�enseignement public, qui sont des �tres en formation,
des sujets en voie de constitution. Quant � la sph�re priv�e, elle se
compose de deux espaces : public (rue, mosqu�e, entreprise commerciale
ou industrielle, lieu de loisir, local syndical) et de l�espace
personnel (domicile). La libert� n�est toutefois pas absolue dans les
sph�res, aussi bien publique que priv�e. Elle s�exerce dans les limites
du respect du principe de l�ordre public, qui n�est pas non plus
r�ductible � la notion de trouble de l�ordre public, bien que cette
derni�re en fasse partie. Ce titre g�n�rique inclut ce que les juristes
intitulent les lois imp�ratives. Le respect de ce principe s�impose au
citoyen et au chef de l��tat. Par s�paration radicale entre la sph�re
publique et la sph�re priv�e, il faut entendre l�autonomie entre ces
deux sph�res. Chaque sph�re ne doit pas s�ing�rer dans le fonctionnement
de l�autre. C�est pourquoi, c�est un abus de langage que de qualifier
par exemple de la�cit�, l�anti-religion, voire l�ath�isme militant, dans
l�ex-URSS. Certes, L�nine avait promulgu� la loi du 23 janvier 1918,
relative � la la�cit� de l��tat sovi�tique, en s�inspirant de la loi
fran�aise du 9 d�cembre 1905 qui stipulait que tout citoyen est �libre
de professer le culte de son choix ou de n�en professer aucun�. Mais
l�implication de l��glise orthodoxe russe aux c�t�s de la
contre-r�volution int�rieure et les �tats imp�rialistes, et les graves
menaces qu�ils avaient fait peser sur la survie de la jeune R�publique
des Soviets, oblig�rent les bolcheviques � d�clencher de violentes
repr�sailles contre elle, jusqu�� la soumettre au nouveau pouvoir. Ce
qui a signifi� la mort de la la�cit� dans ce pays, car il fut port�
atteinte � la libert� de culte et � l�autonomie du religieux par rapport
au pouvoir politique. Bien plus tard, la libert� de culte fut r�tablie,
mais non l�autonomie du religieux envers les pouvoirs publics. Il en est
de m�me de ce qu�on appelle improprement en Turquie, la la�cit�, alors
qu�elle s�apparente � la s�cularisation qui s�est effectu�e � sens
unique, puisque la religion est plac�e sous l�autorit� du pouvoir
politique. Il s�agit en effet d�une la�cit� �bancale�, d�s la tentative
de sa mise en place de fait, en 1923, avec l�abolition du syst�me
th�ocratique, incarn� par le califat. Elle a consist� �galement en la
nationalisation des mosqu�es et des �coles coraniques, de la prise en
charge de la formation des imams et celles des th�ologiens � la facult�
d�Istanbul, ainsi que le contr�le du culte, par la cr�ation, en 1924,
d�un minist�re des Affaires religieuses. L�abrogation, en 1928, dans la
Constitution de l�article �L�islam est religion d��tat� n�eut aucun
effet pour la r�tablir. Dans les ann�es 1970, le pouvoir �la�que� turc
enseignera l�islam dans les �coles, comme cela s�est pass� dans tous les
pays musulmans, croyant couper ainsi l�herbe sous le pied des
islamistes. Aujourd�hui, la �la�cit� en Turquie est � la crois�e des
chemins avec un pr�sident et un gouvernement islamistes, ainsi qu�une
Assembl�e nationale majoritairement islamiste. Le risque de la d�rive
vers un �tat th�ocratique n�est pas � �carter.
4. La la�cit� : un combat d�mocratique
La lutte pour la la�cisation de l��tat alg�rien n�est ni une utopie, ni
une question qui doit �tre pos�e dans un horizon lointain, dans le
meilleur des cas. Nous pensons, au contraire, que ce combat est plus que
jamais d�actualit�, car la s�paration des religions et de l��tat en
Alg�rie constitue l�une des options fondamentales pour sortir notre pays
de son marasme. La la�cit� est une t�che de nature nationale et
d�mocratique, car elle est conforme � l�int�r�t de grande majorit� de
notre peuple et de notre pays. Elle prot�ge la religion, dimension
spirituelle essentielle du musulman, de tous les charlatans. Elle r�pond
en effet � un besoin patent chez certains et latent chez beaucoup
d�autres. Ses partisans seront encore bien plus nombreux, lorsqu�ils
prendront progressivement conscience des liens �troits entre la�cit� et
r�alisation de plusieurs de leurs aspirations profondes et l�gitimes,
telles que l��largissement du champ de leurs libert�s individuelles et
collectives, le droit aux libert�s d�expression et de pens�e, la
lib�ration du carcan de traditions conservatrices �touffantes, l�acc�s �
l��galit� totale en droit et en dignit� entre les Alg�riennes et les
Alg�riens. Ceci d�autant plus que nous sommes conscients du caract�re
anachronique, liberticide ou misogyne, de plusieurs lois et pratiques
qui r�gissent notre �tat et notre soci�t� ; et contre lesquelles il nous
faut continuer � lutter pour les abroger. Il s�agit avant tout de
l�article 2 de la Constitution alg�rienne qui stipule que : �l�Islam est
religion d��tat�, ainsi que de toute loi ou disposition analogues. Car
elles sont en contradiction avec la d�mocratie et le droit moderne qui
accordent la libert� de critiquer tous les dogmes, notamment leurs
dimensions misogynes et attentatoires aux droits de l�Homme, sans
craindre pour sa vie ou sa libert�. Il en est de m�me du code de la
famille, fond� sur des pr�ceptes de la Charia, qui bafoue la dignit� et
les droits de femmes, et qu�il faut remplacer par des lois civiles. Il
faudrait que dans les �coles, le cours d�instruction civique fond� sur
la critique des savoirs et l�impr�gnation par les valeurs humaines
universelles soit inscrit dans le programme scolaire.
5. La la�cit� en Alg�rie : une utopie r�aliste
En d�pit de la mont�e de l�islamisme politique, ainsi que de la r�gression
partielle et temporaire qu�il a impos�e aux peuples et aux �tats
musulmans, nous observons n�anmoins, surtout depuis la d�colonisation,
des progr�s de la s�cularisation dans nos soci�t�s et nos �tats. Les
deux processus de s�cularisation et de modernit� entra�neront
immanquablement l�all�gement croissant du poids des religions, des
particularismes nationaux, ethniques ou linguistiques, ainsi que des
pouvoirs politiques sur les libert�s individuelles, collectives, et sur
les choix de vie des femmes et des hommes. Cette �volution est appel�e �
s�acc�l�rer avec la mondialisation et la r�volution scientifique et
technique en cours, surtout pour ce qui est des technologies de la
communication et des moyens de transport. Conjugu�s � d�autres
dimensions de cette r�volution, ils r�duiront davantage les distances
entre les pays, entre les continents et les peuples. Ces derniers seront
alors incit�s � partager des valeurs humaines communes et � faire
reculer encore plus leurs pr�jug�s respectifs. Nous ne voyons toutefois
aucunement cette �volution comme un processus uniforme et univoque. Mais
comme une tendance, avec ses avances, ses stagnations et ses reculs sur
les court et moyen termes, mais avec des progr�s in�luctables sur le
long terme. Nous sommes �galement attach�s � une conception mat�rialiste
et dialectique de l��volution des soci�t�s humaines, � savoir que ce
sont les conditions mat�rielles des Hommes, qui, en derni�re analyse,
d�terminent leurs consciences, cela ne fait pas de nous pour autant les
adeptes d�un d�terminisme social, qui minore le r�le des �tres humains
dans la lutte pour la transformation de leurs conditions d�existence et
leur �mancipation. L�instauration de la la�cit� dans notre pays est une
�uvre de longue haleine, les la�cs alg�riens ne doivent pas moins
s�atteler, d�s aujourd�hui, � en poser les jalons. C�est en tout cas
l�une des raisons d��tre essentielle de la cr�ation du Parti pour la
La�cit� et la D�mocratie.
Vive la R�publique Alg�rienne La�que, D�mocratique, Moderne et
Sociale !
Alger le 5 juillet 2010,
P/ le Bureau National.
NB : Toutes les remarques, critiques et enrichissements doivent �tre
adress�s � l�adresse suivante : Mail : <[email protected]>
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