Chronique du jour : LETTRE DE PROVINCE
2010 : l�ann�e de tous les scandales


Par Boubakeur Hamidechi
hamidechiboubakeur@yahoo.fr
L�ann�e 2010 s�achemine vers sa fin sur un autre scandale. Celui d�une rocambolesque affaire de quotas de p�che perdus apr�s une �nigmatique absence lors d�une n�gociation internationale. Elle se cl�t, en quelque sorte, comme elle a commenc� dans l�impr�voyance, voire le chaos au sommet de la gouvernance.
Apr�s les r�v�lations de l�existence de pots-de-vin astronomiques lors de l�octroi des march�s de l�autoroute, puis celles relatives aux connivences � haut niveau dans la pr�dation � Sonatrach et enfin sa d�faillance juridique vis-�-vis de l�op�rateur Orascom, peut-on encore se fier � ses praxis jusque-l� caract�ris�es par la dilapidation l� o� il aurait d� y avoir des gains ? Pourtant, ce sont toujours les m�mes personnes, install�es sur le pont de l�Etat, qui dissertent sur les contraintes et trouvent mati�re � se montrer irr�prochables. �Gouverner est l�art du possible�, aiment-ils � r�p�ter en guise de parade. La formule par sa subtilit� sp�cieuse n�est en fin de compte qu�une pirouette dans le discours afin de se d�fausser sans proc�s de leurs fautes. Ne souhaitant jamais �tre appr�ci�s par l�opinion, � partir de leurs actes de gestion ne pr�f�rent-ils pas le recours aux sentences morales ? Or, la multiplication des turpitudes, plus ou moins en rapport avec leurs responsabilit�s, vide de tous sens ce genre de rh�torique. Face � un pays et une soci�t� revenus sur l�estime qu�ils leur portent, ces dirigeants s�ent�tent � refaire les m�mes erreurs de communication. Car, enfin � quoi a-t-il servi le r�cent �oneman-show� d�un Premier ministre lors de ses passages dans les deux chambres du Parlement ? Mais pardi � faire des gorges chaudes dans les chaumi�res ! Car c�est dans ces derni�res que se trouve le v�ritable �talon de sa gestion. La crainte de faire de la communication politique autrement et, plus encore, la peur panique de se �frotter� aux questions et aux critiques des administr�s les confinent dans l�esbroufe. Apr�s 11 ann�es d�une m�me pr�sidence dont, avait-on dit, qu�elle fut consensuelle aupr�s des sph�res d�cisionnelles, l�on se prend d�sormais � s�interroger gravement sur ce mandat de trop � la suite de constats alarmants relatifs � la d�liquescence galopante de l�appareil d�Etat. Sauf que ceux qui en font l�examen dans ses multiples aspects et ses hypoth�tiques implications avouent leur perplexit�. Bien avant eux, un homme du s�rail a essay� de r�soudre ce dilemme sans y parvenir, �videmment, sinon intellectuellement. �� Je ne crois pas que son d�part constitue une solution. Mais toute solution qui va dans le sens de l�histoire passe par son d�part�(1). A l��poque, cette litote exemplaire posait implicitement la question de l�avenir du pr�sident. De nos jours, il s�agit du devenir de l�Alg�rie sachant que le destin de l�homme est d�j� accompli apr�s plus de deux mandats. Bien avant la seconde reconduction et l�entame du troisi�me mandat, le �bouteflikisme� en tant que style de gouvernement et m�thode d�approche des grandes questions posait d�j� des probl�me et fut abondamment critiqu�, mais y a-t-on tenu compte avant que n�intervienne l�impensable op�ration chirurgicale sur la constitution en novembre 2008 ? Evidemment que non, et ce, pour plusieurs raisons � l�exception de la principale : la r�gle constitutionnelle de l�alternance et, ce faisant, le droit imprescriptible de l��lecteur de d�signer ses dirigeants et ses repr�sentants. Au-del� de tous les inventaires n�gatifs que l�on pouvait ais�ment imputer aux deux mandats l�gaux, ce qui a endommag� gravement l�image du pouvoir depuis 18 mois est l�irrespect de l�opinion et l��pouvantable d�sordre qui r�gne dans bon nombre de secteurs et vis-�-vis desquels l�on pr�f�re garder le silence dans une sorte de morgue de monarque. En effet, un chef de l�Etat qui observe un mutisme suspect, lui dont la r�putation de contradicteur prolixe �tait v�rifi�e tout au long de son premier mandat, pose effectivement probl�me. Substituant la d�robade muette � l�exercice de tribun, qui fut le sien, comment peut-il croire qu�il demeure en phase avec les pulsations du pays en usant d�une telle hauteur ou plut�t d�une pareille distance ? A travers ce paradoxe typiquement alg�rien o� la parole officielle est plus rare que la col�re sociale, l�on mesure effectivement le hiatus qui s�pare les acteurs du r�gime de leurs administr�s. Car, de la forteresse du pouvoir, les Alg�riens n�apprennent que les timides activit�s d�un fantomatique gouvernement feignant d�appliquer avec la vigilance n�cessaire des programmes et un plan quinquennal dans un environnement social qui en ignore tout de ses objectifs. Ici et l�, des ministres voyagent � travers les provinces afin de donner l�illusion que �tout baigne�. Fugaces missions, qui s�effectuent en cort�ges, prot�g�s sciemment des v�ritables interlocuteurs. Telle est la photographie en �noir et gris� que nous renvoie 2010 d�une gouvernance al�atoire que racontent d�sormais les feuilletons � scandales publi�s par les journaux. Une ann�e� scandaleuse qu�il faut clore sans regrets.
B. H.
(1) Les droits d�auteur sur la formule appartiennent � Mouloud Hamrouche qui l�aurait �nonc�e en 2001 lors d�une interview.

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