
Chronique du jour : ICI MIEUX QUE LA-BAS Comment dit-on fable en politique ?
Par Arezki Metref
arezkimetref@free.fr
Dimanche 26 juin : Franchement, Bouteflika plutôt que Belkhadem
La question du nombre de mandats revient à la faveur des
«consultations» qui, ici, possèdent le sens donné habituellement aux
séances chez la voyante. Il est fort à craindre, au demeurant, que
l'ouverture sur mesure de la Constitution pour que Bouteflika puisse
avoir autant de mandats que le permettent les lois biologiques soit la
seule chose qui restera de lui. Une régression ! Il est vrai que, grisés
par l'étendue des pouvoirs qu'il a pu arracher, les fidèles du «clan
présidentiel », pour citer Chakib Khelil, à leur tête l'ineffable
Belkhadem, notre Talleyrand national, ont pensé le moment idéal pour
signer à blanc un bail pour l'éternité. Du coup, la seule bonne chose
qui ait été faite lors de ces années de violence, la limitation des
mandats à deux par la Constitution de 1996, a été supprimée avec fracas.
Belkhadem justement et toutes les caravanes qui «pélerinent» pour le
président ont crié haut et fort que la présidence à vie, et une
succession dynastique à la clé, c'est ce que veut le peuple et c'est ça
la démocratie. Mais voilà que l'immolation du jeune Bouazizi en Tunisie
vient changer les plans de tous les présidents à vie du coin. Pas de
raison que le nôtre soit épargné, encore qu'il s'en tire bien pour ce
qui le concerne. Mais là n'est pas la question. Elle est dans ce
revirement à la limite du supportable des courtisans qui, hier encore,
nous la jouaient impérieuse cette présidence à vie et qui commencent,
aujourd'hui, à jouer pour euxmêmes. Pour ma part, je préfère encore
Bouteflika président à vie que Belkhadem président trente secondes. Le
choix ne s'arrête pas là ? Heureusement ! Mais il faut aller chercher
l'alternative !
Lundi 27 juin : Azzazga encore !
Abattre un citoyen et l'exhiber comme un trophée, la lutte
anti-terroriste n'a-t-elle pas le dos un peu trop large ? C’est
visiblement la question que se posent en termes infiniment plus
virulents les citoyens qui ont manifesté à Azzazga contre ce qui est au
mieux une bavure. Au pire ? Un acte arbitraire d'armée d'occupation, de
ceux qui pourraient mener droit aux tribunaux internationaux ! Le doute
jouant en dépit de l'arbitraire exubérant des éléments de l'ANP sur
place, ce serait un signe de respect envers tous les habitants de la
région que de porter à leur connaissance les conclusions d'une enquête
qui devrait aboutir à la sanction des coupables. A moins que... A moins
que cette bavure ne soit un élément de plus dans la chaîne de provoc qui
aurait Dieu sait quels buts !
Mardi 28 juin : CPI
Justement, Kadhafi entre dans le club des clients de marque de la
CPI (Cour pénale internationale). Celle-ci vient de lancer un mandat
d'arrêt contre le despote de Tripoli. Moreno Ocampo, procureur en chef
de la cour de La Haye, a lancé un mandat contre Mouammar Kadhafi et son
fils Seïf El Islam. Le mandat concerne aussi nommément Abdellah
Senoussi, chef des renseignements. Chefs d'accusation : «Crimes contre
l’humanité» et autres joyeusetés. Bien entendu, on peut parler de
complot impérialiste mu par la convoitise du pétrole libyen. On peut
aussi se marrer, comme le fait un grand quotidien américain, le
Bookforum de New York pour ne pas le nommer, de ce que la France ait été
embarquée dans cette aventure par l'aventurisme du philosophe
Bernard-Henri Lévy alias Tintin au pays des diplomates. On connaît la
suite : la France embarque à son tour l'Otan dans la carlingue ! Mais
tout cela n'efface pas la cruauté de Kadhafi et le danger couru par
«son» peuple devant le pouvoir démesuré et irrationnel qu'il tient dans
ses mains. Doit-on fermer les yeux sur un massacre systématique sous
prétexte que c'est un moindre mal devant l'agression impérialiste ? Non
! C'est comme si on nous demandait de choisir entre le fait que les
forces occidentales profitent du pétrole libyen ou bien le laisser au
seul profit du clan Kadhafi. Dans les deux cas, le peuple libyen est le
dindon de la farce.
Mercredi 29 juin : Boudiaf !
Dix-neuf ans depuis le baiser de Judas ! Une histoire simple et
tragique ! Un des révolutionnaires les plus propres de ce pays est tiré
de sa retraite forcée pour qu'on lui confie le destin d'un pays
convulsif, poussé à ses derniers retranchements par les luttes pour le
pouvoir avec lesquelles il n'avait rien à voir. Il arrive et il tend la
main. On lui coupe la tête. On nous a sorti la fable de l'acte isolé.
L'assassinat de Boudiaf est un acte aussi isolé que celui d'Abbane
Ramdane, Krim Belkacem, Khider... La vérité ne fait que du bien même si
elle fait mal. On ne construit pas une nation sur le sang des ses fils
et sur le mensonge.
Jeudi 30 : Gharbi !
Pourquoi le ministre de la Justice ne reçoit-il pas le collectif
«Libérez Mohamed Gharbi»? Pourquoi envoie-t-il au-devant de ses membres
des subordonnés ? A défaut d'éléments qui permettraient de construire
une réponse, on peut spéculer comme le fait du reste Khaled Babaci, un
des membres moteurs du collectif. «Tayeb Belaïz doit nous recevoir, il
doit nous donner une date précise pour la libération de Mohamed Gharbi.
Si Mohamed Gharbi n’est pas libéré à l’occasion du 5 Juillet, nous
organiserons une conférence de presse. Nous ferons en sorte que les
médias étrangers soient présents. Ils verront que les gens du FLN, à
commencer par Belkhadem, font tout pour que les terroristes soient
libres, tandis que Mohamed Gharbi, qui est un véritable enfant du FLN,
croupit en prison.» Voilà qui est clair !
Vendredi 1er juillet : DSK !
Coup de tonnerre : DSK est libéré sur parole. La gentille femme de
ménage noire que l'ogre blanc assuré d'impunité agresse a vécu ? Le
bureau du procureur a découvert que l'ange a derrière lui des mensonges
de démon et que, quelque part, il y a une sorte de plan pour soutirer du
fric à DSK. Aucune leçon de morale à tirer de cette histoire à ce
niveau, sauf qu'il n'est jamais judicieux de voir le monde en noir et
blanc. Ça manque cruellement de nuances !
A. M.
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