Chronique du jour : A FONDS PERDUS
Nouvelles menaces


Par Ammar Belhimer
ambelhimer@hotmail.com

Lundi 27 juin 2011, l�OCDE pr�sentait les conclusions d�un projet men� trois ans durant sur le th�me �Les futurs chocs mondiaux� dans lequel elle identifiait cinq menaces potentielles. Ces chocs dits majeurs et rendus plus fr�quents �avec des cons�quences plus graves sur l'�conomie et la soci�t� sont associ�s � des menaces financi�res, naturelles, technologiques, sociales et politiques. Menaces d�autant plus r�elles et croissantes que l'�conomie mondiale est �troitement imbriqu�e et que les personnes et les biens s�y d�placent � une vitesse de plus en plus grande. Le rapport(*) analyse 5 risques majeurs potentiels pour les ann�es � venir, � savoir :
- une pand�mie (de type SRAS),
- une cyber-attaque visant une infrastructure critique,
- une nouvelle crise financi�re,
- un conflit socio-�conomique (d� par exemple � la rar�faction d'une mati�re premi�re),
- une temp�te g�omagn�tique (d'origine solaire qui paralyserait l'ensemble du r�seau informatique).
Il convient d�interroger chacun de ces risques dans le cas particulier de notre contexte. Concernant la premi�re menace, il est connu que des gouvernements autoritaires et irresponsables, localis�s pour la plupart dans les pays en d�veloppement, rendent parfois une coordination mondiale plus difficile. Par exemple, pendant l'�pid�mie de chol�ra 1970, alors que l'Organisation mondiale de la Sant� (OMS) se d�ployait pour limiter la propagation de la maladie, l'Iran et l'Egypte avaient rejet� le diagnostic, le r�duisant � une �diarrh�e estivale�, tandis que la Guin�e avait d�nonc� les conclusions de l�OMS sur les incidences du chol�ra et s��tait retir�e de l'Organisation. Plus r�cemment, la Chine n�a notifi� l'�pid�mie de SRAS � l�OMS que quatre mois et demi apr�s l��v�nement du premier cas connu. En Alg�rie, cette menace de pand�mie est � prendre tr�s s�rieusement en consid�ration, en raison de la faiblesse des missions de proximit� li�es � la repr�sentation populaire, plus qu�approximative pour ne pas dire virtuelle, d�une part, et de l��tat de d�labrement des structures de sant� en raison de leur gestion chaotique. La menace a d�j� �t� soulign�e avec force par le rapport de la Commission de r�forme des missions de l�Etat qui souligne que �c�est pr�cis�ment dans cette gestion de proximit� que les d�faillances sont les plus perceptibles, les plus attentatoires � la l�gitimit� de l�institution locale parce que c�est tout simplement le citoyen qui en paie le prix. Celles-ci sont nombreuses et vari�es et ont particuli�rement affect� la qualit� des prestations et des services publics, engendrant une d�gradation du cadre de vie de plus en plus prononc�e de nos villes et de nos communes � l�origine du d�veloppement d��pid�mies et de maladies infectieuses et de carences d�passant le seuil du tol�rable dans la gestion administrative et financi�re�. (p. 219). Si les mesures pr�ventives font ainsi cruellement d�faut, de l�avis des plus hautes instances de l�Etat, quid alors des moyens d�intervention en cas d��pid�mie ? Les h�pitaux souffrent de p�nuries r�currentes de m�dicaments depuis plusieurs ann�es. Cela fait des semaines que 200 m�dicaments manquent dans les pharmacies � des milliers d'hypertendus alg�riens sont en danger de succomber puisque le m�dicament r�gulateur n'est plus disponible dans les officines, alors que la F�d�ration nationale des insuffisants r�naux faisait �tat, ce mercredi 27 juillet, de d�c�s de malades � Oran et Constantine en raison de cette p�nurie de m�dicaments �, sans que cela emp�che de dormir le ministre de la Sant�. Une telle situation r�sulte de la volont� du gouvernement de r�duire la facture du m�dicament (deux milliards de dollars par an) qu�il estime trop �lev�e, en interdisant � l�importation des centaines de m�dicaments depuis 2008, sans parvenir � leur substituer des produits fabriqu�s localement. Le lobby des importateurs a encore une fois impos� sa logique ! Lorsqu�on sait que seule une dizaine de barons du syst�me se partagent la facture du m�dicament et qu�ils peuvent l�importer et le distribuer en Alg�rie, tout en traitant leur moindre petit bobo aux frais du contribuable � Paris, on a envie de rejoindre les �meutiers des quatre T : de Tamanrasset � Tizi-Ouzou et de T�bessa � Tlemcen � pour reprendre une expression si ch�re � feu Mahfoud Nahnah ! Aux Etats-Unis, la protection des r�seaux, au m�me titre que la lutte contre le terrorisme, au rang des priorit�s nationales, si l�on croit le National Intelligence Strategy (NIS), document am�ricain de r�f�rence qui arr�te les menaces � surveiller comme le lait sur le feu. Les intrusions que constituent ces menaces proviennent pour 36% des Etats-Unis, 33% de Chine et 12% de Russie. La France, l�Iran et Isra�l restent �galement sources potentielles de cyber-attaques. Au chapitre socio-�conomique, le rapport rappelle la catastrophe de 2010 lorsque des feux de friches avaient d�truit un cinqui�me de la r�colte de bl� de la Russie, provoquant une envol�e des prix sur les march�s alimentaires mondiaux. C�est � cette incidence qu�on attribue souvent l�origine des conflits sociaux au Moyen-Orient, notamment les �meutes de la faim. Ces �meutes sont la cons�quence indirecte d�une r�action impr�visible des autorit�s russes face � un risque de p�nurie alimentaire (en l�occurrence l�interdiction des exportations), qui s�est conjugu�e avec des inondations en Australie et au Canada pour provoquer des hausses de prix inattendues dans le monde entier. Aujourd�hui encore, plus de 11 millions d�habitants d�une autre r�gion du monde, la corne de l�Afrique, affect�e par la s�cheresse, l�une des pires en 60 ans. La famine g�n�ralis�e, les d�c�s et la perte de r�coltes et de b�tail de subsistance qui se produisent sous nos yeux sont, encore une fois, la cons�quence d�une hausse des prix des denr�es alimentaires et de la d�t�rioration des prix du b�tail. Aux yeux de l�OCDE, ces menaces invitent les dirigeants du monde � anticiper et � adopter une nouvelle approche reposant sur une am�lioration de la coop�ration et de la coordination internationales, car les planifications de l'action publique, habituellement mises en �uvre seront insuffisantes. L'OCDE invite les responsables des politiques publiques � :
- une mise en commun de l�information : en redoublant d'efforts pour acqu�rir et partager des donn�es et mettre au point divers mod�les de simulation afin de mieux anticiper et �valuer les chocs potentiels ;
- une veille plus �troite : par un accroissement des ressources affect�es � la surveillance et au suivi des risques et aux syst�mes d'alerte rapide ;
- l�installation de sortes de �coupe-menace � : en adoptant une approche coordonn�e au plan international, de mani�re � r�duire ou � lever les menaces avant qu'elles ne se propagent dans le monde entier ;
- un renforcement de la coop�ration internationale et des incitations pour promouvoir la diversit� des syst�mes critiques ;
- une intensification des partenariats faisant intervenir de multiples parties prenantes, le partage d'informations, les consultations, le d�veloppement des capacit�s, les tests de r�silience et les exercices de s�curit�.
Quant aux laboratoires pharmaceutiques, ils sont invit�s � intensifier leurs recherches sur les nouvelles bact�ries et virus afin d'�laborer de nouveaux antibiotiques. �Des incitations fiscales et une acc�l�ration de la d�livrance des brevets pourraient encourager les entreprises � investir, �tant donn� le co�t �lev� de la mise au point de nouveaux antibiotiques�, estime l'OCDE.
A. B.
(*) www.oecd.org/futures.

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