
Actualités : LE PORT D’ARME BLANCHE S’INSTALLE EN FORCE DANS LES MŒURS ALGÉROISES Ces jeunes qui font couler le sang !
Si faire couler le sang ou transpercer la chair est devenu, pour certains, chose banale, pour d’autres, le port d’armes blanches est plus une manière d’être dans l’air du temps qu’un moyen d’agression physique. Le constat émane de la police elle-même qui tire la sonnette d’alarme. Le phénomène s’installe en force dans les mœurs algéroises.
Mehdi Mehenni - Alger (Le Soir) - Les Algérois ne se battent plus à
mains nues. Pour un détail, un motif banal, un léger malentendu ou un
regard jugé hostile, on brandit le canif. Si ce n’est pas toujours tout
le monde qui va jusqu'à commettre l’irréparable, beaucoup par contre
n’hésitent pas à le manier. Ce fléau de société qui ne cesse de se
banaliser devient de plus en plus inquiétant pour le citoyen et
hautement préoccupant pour les services de sécurité. Rien que dans la
nuit du 14 au 15 du mois en cours, la police a récupéré dans la capitale
25 armes blanches prohibées dont cinq ont été utilisées pour des
agressions physiques. 73 individus ont été différés devant la justice
durant la première quinzaine de ce mois d’août, toujours à Alger, pour
différents motifs, mais le plus fréquent pour port d’arme blanche. Selon
le chargé de la communication de la Sûreté de la wilaya d’Alger, Khaled
Kadaoui, 43 affaires d’agression physique avec préméditation suivie de
vol ont été traitées durant le mois de juillet. Dans 25 cas, les
agresseurs ont été pris en flagrant délit. «Si la victime oppose une
quelconque résistance, l’agresseur n’hésite pas à donner des coups de
couteau », s’indigna-t-il. Faire couler le sang est devenu un jeu
d’enfant, voire un reflexe naturel pour certains. Il y en a même qui
vantent leur abominable palmarès, à savoir qui a donné le plus grand
nombre de coups de couteau et qui a fait le plus grand nombre de
victimes. «Pourquoi échanger des coups de poing lorsque un coup de
couteau dans le dos ou de préférence à la jambe peut résoudre le
problème », dira un jeune délinquant.
Ces jeunes qui n’existent que par le couteau
Mais ce qui semble le plus bouleversant selon la police est que les
jeunes Algérois ne portent plus seulement des armes blanches dans le but
d’agresser des personnes à fin de les dépouiller de leurs biens
matériels, mais aussi et surtout pour être dans l’air du temps. Comme
les moustaches à une certaine époque, celui qui ne porte pas aujourd’hui
de couteau «ne serait pas un homme», pour reprendre le langage
populaire. Les jeunes gens rivalisent et se jalousent même sur la taille
et la marque de ce symbole de puissance. Tel poignard est américain, tel
autre est thaïlandais, alors que les sabres japonais demeurent les plus
convoités. Celui qui en possède un est le plus craint dans le quartier.
Souvent ces jeunes qui brandissent le couteau pour quelque futile motif
le font juste pour se donner en spectacle. Histoire de se faire
remarquer et d’être à la une. Pour les uns, cela concède une certaine
position dans la société, pour les autres, cela donne un sentiment de
sécurité, voire de supériorité. De toute manière, cela reste, pour la
plupart, une véritable «marque de société». Des jeunes gens qui
n’existent désormais que par le couteau. Et ce ne sont pas que des
jeunes personnes qui se laissent tenter par ce terrible fléau. Si le
canif fait parfois de l’effet sur les moins de 15 ans, des
quadragénaires et même plus, ne sont pas exemptés de pareille attitude.
Certains n’éprouvent pas de malaise à le manier en public.
M. M.
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