Chronique du jour : CE MONDE QUI BOUGE
Maghreb, ce ne sera pas le mod�le islamique turc !


Par Hassane Zerrouky
En moins d�une ann�e, trois dirigeants arabes � Ben Ali, Moubarak, Kadhafi � ont �t� balay�s. Un quatri�me, le Y�m�nite Abdellah Saleh, a choisi, sous la pression des monarchies du Golfe, de quitter les lieux dans les mois � venir. En Tunisie, au Maroc, ce sont les islamistes dits mod�r�s, notion invent�e par les Etats-Unis � des fins de strat�gie g�opolitique apr�s le 11 septembre 2001, qui ont gagn� les premi�res �lections d�mocratiques. Ce sera, sans aucun doute, le cas dans les mois qui viennent en Egypte et au Y�men, alors qu�en Libye, ils sont d�j� au pouvoir gr�ce � l�Otan, au Qatar et � Bernard- Henri L�vy.
En Syrie, �a sera peut-�tre un peu plus compliqu� mais le changement de r�gime semble in�luctable. En Alg�rie, o� il est permis de penser que rien ne s�oppose d�sormais � ce que les islamistes les plus ferm�s culturellement du Maghreb acc�dent �d�mocratiquement� au pouvoir, une partie d�entre eux �tant d�j� bien install�e dans les rouages du r�gime, ce n�est peut-�tre qu�une question de temps. Une chose est s�re, en Alg�rie, ce ne sera pas le mod�le turc qui s�imposera, car ce dernier � chacun peut aller le v�rifier en Turquie � reste la�que dans le fond et la forme : en Turquie, l�Islam n�est pas religion d�Etat. Et si Ennahda et le PJD marocain se r�f�rent au mod�le turc, c�est par simple tactique, afin de rassurer les capitales occidentales. C�est la raison pour laquelle les islamistes tunisiens ont nou� des alliances avec des formations non religieuses, exemple qui sera suivi au Maroc. Apr�s avoir accept� la d�mocratie qu�ils rejetaient auparavant, ils viennent de faire l�exp�rience qu�ils n�auront jamais cette majorit� absolue leur permettant d�exercer seuls le pouvoir et d�instaurer l�Etat islamique id�al. Il serait faux de croire que l�islam politique a chang�, qu�il s�est converti � la d�mocratie. Ni Ennahda en Tunisie, ni le PJD au Maroc et, encore moins, les Fr�res musulmans en Egypte, beaucoup plus conservateurs et r�actionnaires que leurs fr�res tunisiens et marocains, n�ont renonc� aux fondamentaux religieux qui sont leur raison d��tre. Il faut �tre franchement na�f pour croire qu�un parti se r�f�rant ouvertement � la religion se pr�sente aux �lections, seulement pour gouverner et non pour appliquer ses id�es de nature religieuse. Quel serait son int�r�t ? Sur le statut de la femme, par exemple, aucun de ces partis ne pr�ne ni dans son programme ni dans le discours le renoncement � la polygamie ou le renoncement � la r�pudiation. La femme reste fondamentalement une non-citoyenne. La d�mocratie � laquelle les islamistes maghr�bins et arabes se r�f�rent n�en est pas une car elle comportera n�cessairement des limites aux libert�s individuelles et, partant, ouvrira grand le champ politique aux religieux les plus extr�mistes. Qui plus est, l�Occident, que certains d�mocrates ne cessent d�interpeller, acceptera au nom du droit � la diff�rence culturelle, voire au nom � la diff�rence de civilisation, ce concept fumeux invent� pour faire avaler n�importe quoi aux peuples domin�s, l�arriv�e au pouvoir de partis islamistes dit mod�r�s ! En v�rit�, � d�faut de mod�le turc, ce sera plut�t un mod�le fondamentalement r�actionnaire et conservateur, celui inspir� et port� par la mouvance des Fr�res musulmans, un mod�le �loign� seulement dans la forme du wahhabisme salafiste. A ceux qui ont oubli� le discours du Caire de Barack Obama en juin 2009, rappelons que le projet islamiste, comme alternative aux r�gimes en place, est inscrit dans la strat�gie am�ricaine. C�est cela que pr�conisent les Etats-Unis pour les pays arabes et maghr�bins parce que selon les strat�ges de Washington, gr�ce � l�appui politico-financier des monarchies du Golfe, des r�gimes arabes stabilis�s par des islamistes dociles, sachant concilier l�Islam et les affaires, sauront pr�server l��quilibre r�gional n�cessaire � la s�curit� d�Isra�l. Formul� ainsi, cela para�t �norme, mais c�est malheureusement vrai. Sinon comment interpr�ter cette soudaine sympathie envers l�islam politique, d�fendu publiquement par le chef de la diplomatie fran�aise Alain Jupp� ?
H. Z.

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