Soirmagazine : ENQU�TE-T�MOIGNAGES
Les TOC, l�enfer de l�obsession


Par Sabrinal
Toc, trois petites lettres pour un grand mal ; TOC est l'abr�viation de �troubles obsessionnels compulsifs�. Un v�ritable enfer � vivre au quotidien. Se laver les mains 36 fois par jour, quitter son lit douillet plusieurs fois la m�me nuit pour v�rifier que les robinets sont ferm�s, que le gaz est sur �off�, compter et recompter, ranger inlassablement sa chambre, alors que tout est impeccable, c�der au besoin irr�sistible de s�arracher cheveux, cils et sourcils� C'est le v�cu plus ou moins infernal des personnes en proie � ces troubles obsessionnels.
Ces comportements involontaires et irrationnels touchent toutes les cat�gories d'�ge. Jeunes et moins jeunes endurent une vie familiale, scolaire et professionnelle profond�ment perturb�e.
SOS TOC ! Wahid, 40 ans
Il a fallu � Wahid plusieurs ann�es avant de mettre un nom sur son comportement �trange. La r�ponse est venue du m�decin : �Vous �tes atteint d�un TOC�, lui avait-il r�v�l�. C�est lorsque ce quadrag�naire a senti qu�il allait basculer dans la d�mence qu�il s�est enfin d�cid� � consulter. �J�ai comme une calculatrice dans le cerveau. Je compte et recompte tout. A l'�cole, je comptais les lignes et les marges du cahier, plut�t que de me concentrer sur la le�on. Si par exemple, je suis en face d�une personne qui porte une chemise � rayures ou un pantalon � carreaux, je ne peux me focaliser sur rien d�autre que le comptage de ces figures g�om�triques. En grimpant des escaliers, je compte les marches. Dans la rue, je calcule inconsciemment les poteaux, les barreaux, les arbres� Dans ma salle de bains, je rel�ve le nombre des carreaux de fa�ence et les petits ronds sur le rideau de douche. Rien ne peut d�tourner mon attention de cette obsession maladive, de tout compter. Il y a deux ans, j�ai commenc� une th�rapie avec un psy, mais ne voyant aucune am�lioration � mon cas, j�ai tout laiss� tomber�, confie Wahid avec un zeste d�amertume.
Malika, 36 ans, maniaque de la propret�
Les �toqu�s� de l�hygi�ne ont une peur bleue des microbes. Ils sont atteints de la phobie de la salet�. R�sultat des courses, de longues heures � faire le m�nage et � se briquer la peau. Malika (36 ans) est une maniaque de l�hygi�ne et de l�ordre, ce qui lui vaut de fr�quentes disputes avec son �poux Mohamed. Il ne comprend pas pourquoi elle pr�f�re passer ses journ�es avec son balai et sa t�te de loup que de passer un peu plus de temps avec lui. �Elle se l�ve souvent en pleine nuit pour passer la serpilli�re, d�poussi�rer une �tag�re, remettre un bibelot � sa place, ajuster un cadre� Pourtant, tout est parfaitement propre et bien rang�. C�est comme une id�e fixe qui trotte dans sa t�te !� Malika, son �pouse, encha�ne pour en mettre une couche suppl�mentaire : �En une seule journ�e, il m'arrive de me laver les mains plus de cinquante fois. D�s que je touche une poign�e de porte ou un quelconque ustensile, je me sens souill�e. Je dois bien frotter mes doigts apr�s avoir pris soin de laver la savonnette au pr�alable. En soci�t�, mes manies entra�nent naturellement l�incompr�hension des gens, voire leur m�fiance � mon �gard. Je ne serre une main pour dire bonjour que si je suis s�re de disposer d�un lavabo pour me �purifier�.
Au restau par exemple, je fais le va-et-vient entre la table et les sanitaires avec mon savon liquide dans le sac. D'ailleurs, � cause de mes troubles, on sort de moins en moins. Je souffre beaucoup de cette situation.
Au restau par exemple, je fais le va-et-vient entre la table et les sanitaires avec mon savon liquide dans le sac. D'ailleurs, � cause de mes troubles, on sort de moins en moins. Je souffre beaucoup de cette situation. Et puis, je culpabilise pour tous ces moments g�ch�s. Mes enfants et mon mari en p�tissent aussi, indirectement.� Ce mal induit une v�ritable souffrance. C�est une maladie � prendre au s�rieux et qui n�cessite une prise en charge et un suivi th�rapeutique. La souffrance de ces �toqu�s� est double. Non seulement, ils doivent affronter leurs obsessions, mais ils se heurtent en plus � l�incompr�hension de leur entourage. Souvent catalogu�s de fous ou d'extravagants, ils se renferment sur eux-m�mes, limitant au strict minimum le contact avec les autres.
Il y a TOC et TOC !
Les TOC frappent sans distinction d��ge ni de sexe, les enfants non plus n��chappent pas � ce ph�nom�ne. Il est souvent recommand� aux parents de redoubler de vigilance, notamment en cas de conduite �bizarre� chez leur petit.
A�cha, 39 ans, a tout de suite d�cel� des anomalies chez sa fille de 11 ans
�Maya pr�sentait quelques troubles alimentaires et refusait surtout de fermer l'�il avant d�avoir v�rifi� une bonne dizaine de fois que la porte d�entr�e de la maison �tait ferm�e � double tour et que tous les boutons de la gazini�re �taient �teints. J'ai d'abord pens� � un exc�s d'angoisse ou � une simple peur d'enfant, mais m�me les soirs o� tout allait bien et qu'elle montrait des signes de d�contraction totale, c'est pareil. La r�gle est la m�me. Intrigu�e par son comportement, pour le moins anormal, j�ai pris aussit�t rendez-vous chez une psychologue qui, apr�s quelques s�ances, a diagnostiqu� des troubles obsessionnels compulsifs. En tout cas, je n'ai pas regrett� ma d�marche lorsque son m�decin m'a expliqu� les difficult�s et les risques potentiels sur le comportement et le d�veloppement de l'enfant, de la relation parent enfant et de la vie de famille. Aujourd'hui, Dieu merci, suite � un suivi psychoth�rapeutique, ma fille semble beaucoup moins obs�d�e par ses rituels du coucher, entres autres. J�esp�re que tout finira par rentrer dans l�ordre et que Maya m�nera une vie tout � fait �quilibr�e.�
Nabila, 21 ans, �tudiante
Arracher d�un coup sec ses tifs, ses cils et ses sourcils, apr�s avoir jet� un bref coup d��il autour de soi afin de s�assurer que personne n�est t�moin de cette sc�ne insolite, c�est pratiquement le quotidien de Nabila. D�s que les examens approchent ou qu�une tuile lui tombe sur la t�te, cette �tudiante de 21 ans se d�plume le cr�ne et ses corollaires. Elle d�dramatise un peu pour nous raconter son calvaire, mais prend soin de nous montrer la plaque clairsem�e, qu�elle tente de dissimuler tant bien que mal, sous une m�che soign�e au brushing. �Certains grillent cigarette sur cigarette, d�autres se rongent les ongles jusqu�aux sangs. Pour moi, il n�y a qu�un geste qui apaise mes angoisses. Tirer sur mes cheveux, mes cils et mes sourcils. Bien s�r, sur le plan esth�tique, c�est la catastrophe, mais c�est plus fort que moi. Pendant les p�riodes de crise, mon m�decin me met sous anxiolytiques. Mes toc prennent alors quelques vacances, laissant un petit r�pit � mes poils capillaires qui en profitent pour sortir de leur bulbe. Mais � la moindre pression, je reprends mes mauvaises manies. Je ne veux pas d�pendre de m�dicaments toute ma vie, alors je pense � investir dans l�achat d�une belle perruque�, conclut notre toqu�e avec humour. Aujourd'hui, mieux comprendre la complexit� du syst�me nerveux et mieux le traiter est, semble-t-il, le souci majeur des scientifiques. Comme aiment � le r�p�ter ces hommes en blouses blanches : �Nous n'avons plus le droit de souffrir de quoi que ce soit au XXIe si�cle !� Et TOC pour le syst�me de sant� publique nationale !

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