Voxpopuli : CHRONIQUE DE PARIS
Je n'ai pas vot� parce que je n'�tais pas int�ress� par la chasse au tr�sor


Borchtch et Mariiouchkine sont de vieux cosaques campagnards qui avaient chacun un pied dans la tombe et qui s'appr�taient � en mettre le second, lorsque la tch�ka, plus puissante et plus rapide que la mort, les interpella en 1945 et d�cida d'inclure deux escales � leur imminent voyage dans l'Au-del�.
La premi�re, � quelques milliers de kilom�tres de l� o� ils vivotaient, est � Moscou o� le plus s�rieusement du monde, on ouvrit une instruction concernant leur lutte contre le pouvoir sovi�tique en... 1919 (soit un quart de si�cle plus t�t). On les accusera d'actes visant � renverser le pouvoir ouvrier et paysan des Soviets (comment donc ?), d'irruption arm�e (tiens, tiens !), d'avoir �t� au service de gouvernements contre-r�volutionnaires (dont ils ignorent jusqu'� l'existence) et, pince sans rire, d'avoir pr�t� leur concours � la bourgeoisie internationale (qu'ils n'avaient vue ni d��ve ni d'Adam). Et du coup, les vieillards grabataires tombaient sous le poids et la rigueur du code p�nal adopt� en... 1926 (c'est-�-dire 7 ans apr�s les faits suppos�s). La seconde consistait plut�t en un transfert de leurs reliques au c�l�bre goulag des Boutyrki. Voil� ce que me rappela subitement l'insultante accusation du ministre de l'Int�rieur, Daho Ould Kablia, � l'�gard des 12 millions et demi d�abstentionnistes dont le patriotisme le fait douter. Je ne comprends cependant pas cette demi-mesure qui se limitait � ce seul chef d'accusation. Mais o� sont donc pass�s les �supp�ts du colonialisme, leur financement par les r�gimes imp�rialistes, l'espionnage au profit du sionisme, les pr�paratifs pour une intervention �trang�re, les ennemis de notre jeune R�publique, les jaloux des acquisitions r�volutionnaires...?� Ou on est stalinien � part enti�re et on l'assume ou on ne l'est pas ! Comme il appartient � l'accusation de prouver son innocence (comme l'exige l'usage), je prouve la mienne. Je n'ai pas vot� Monsieur le Ministre parce que je n'�tais pas int�ress� par la chasse au tr�sor qu'organise p�riodiquement votre cabinet minist�riel. Je ne voulais surtout pas la cautionner. Lorsqu'un d�put�, qui ne repr�sente du reste que lui-m�me ou tout au plus sa tribu, se voit attribuer un salaire mensuel hallucinant de 300 000 dinars (excusez du peu), avantages en sus, ce n'est plus une r�mun�ration, c'est une ran�on ! Etymologiquement, le mot ministre du latin minister signifie serviteur du peuple. Secr�taire d'Etat, gardien des secrets de l'Etat. Lorsqu'un ministre facture ses services � 350 000 dinars mensuels � avantages toujours en sus � il ne sert plus le peuple: IL SE SERT ! Il est donc plus (+) question de sinistre que de ministre. Et lorsqu'avec tout cela, on n'est m�me pas capable de g�rer les ordures m�nag�res qui avilissent nos villes et villages mais qu'on a fini par adopter, fatalit� oblige, le peuple n'attend plus rien de �ses� �lus et de �ses� gouvernants. L'abstention reste sa r�action la plus �light�. Le message est fort. Il doit �tre entendu. Le patriotisme, c'est d'abord cela. Continuer � occulter les vrais probl�mes du pays risque de provoquer une explosion qui nous co�tera, malheureusement, tr�s cher et nous propulsera 50 ans en arri�re. Pour solutionner un probl�me, il faut commencer par l'identifier. On en est loin! Le g�n�ral de Gaulle (encore lui) disait que le plus difficile n'est pas de sortir de polytechnique, mais de l'ordinaire. Pour notre tr�s grand malheur et pour celui de tout un pays, vous ne sortez ni de polytechnique ni de l'ordinaire. Cordialement.
Yahia Ouazib
Paris 14e

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