Soirmagazine : L�ENTRETIEN DE LA SEMAINE
Melle HADJIRA CHIBANE, PSYCHO-P�DAGOGUE, AU SOIR MAGAZINE
�Il est imp�ratif de mettre en place des structures adapt�es pour enfants surdou�s�


Par Fatma Houari
Absence de structures pour les accueillir, programmes scolaires inadapt�s, les enfants surdou�s sont marginalis�s et ne b�n�ficient d�aucune prise en charge au sein du secteur de l��ducation, � l�instar d�autres pays, occidentaux, notamment, qui ont compris l�int�r�t d�une telle d�marche pour le d�veloppement des sciences et des technologies. La psychop�dagogue Hadjira Chibane nous confie dans cet entretien qu�elle nous a accord� que ces enfants m�ritent une attention particuli�re et qu�il est temps de penser � mettre en place des entit�s sp�ciales afin de les encadrer et suivre leur �volution.
Le Soir d�Alg�rie : A quoi reconna�t-on un enfant surdou� ?
Hadjira Chibane : En r�gle g�n�rale, ce sont les cliniciens qui appliquent des tests dits d�intelligence pour d�terminer si un enfant est surdou� ou pas, mais cela reste difficile sans �tablir un diagnostic. Chez nous, il y a des d�faillances dans ce domaine. L'enseignant de l��ducation n'est pas form� pour reconna�tre ce type d'enfant en comparaison avec un autre enfant d'une intelligence moyenne. G�n�ralement, l'enfant surdou�, qui n�est pas d�tect� � temps, passe pour un enfant en difficult� scolaire. Il pr�sente les m�mes signes qu�un enfant qui n'arrive pas � suivre normalement le cursus scolaire. Et au fur et � mesure que les ann�es passent, il peut se retrouver en �chec scolaire au m�me titre qu'un enfant m�diocre ayant de faibles r�sultats scolaires, pr�sentant des probl�mes socioculturels, ou qui vient d�un milieu d�favoris� ou encore qui a carr�ment un l�ger retard mental. On peut voir en lui un enfant d�sint�ress� des �tudes et d�motiv�. Il peut �galement pr�senter des troubles du comportement en soci�t�. Ce n'est pas parce qu�il a des difficult�s d�ordre cognitif ou d�assimilation mais il s'ennuie en classe. Il cherche quelque chose d'un niveau plus �lev�. Souvent, il passe pour un enfant paresseux, qui n'aime pas travailler et qui ne comprend pas les le�ons. Et m�me l'enseignant le plus alerte peut �tre dup�. Il n'y a pas vraiment de moyens efficaces pour d�tecter un enfant surdou�. Seule possibilit� est que les parents consultent un psychologue s�ils voient que leur enfant pr�sente des dons et qu'il est vif en priv�. A l'�tranger, il existe des psychoth�rapeutes capables de rep�rer et d�identifier les enfants surdou�s car ils ont de gros moyens � leur disposition. Cela fait partie de leur politique de l��ducation. Malheureusement, en Alg�rie, nous ne disposons pas des moyens n�cessaires ni m�me de classes sp�ciales pour cette cat�gorie d�enfants. Certains, mal encadr�s, finissent en �chec scolaire et peuvent m�me tomber dans la d�linquance. Il est vrai qu�on peut d�celer des signes d�intelligence chez des enfants lors d�une discussion mais sans une prise en charge efficiente, on ne peut pas leur accorder une pleine attention � m�me de les aider � s��lever � des niveaux sup�rieurs. Ils peuvent �tre tr�s vifs dans la vie de tous les jours mais m�diocres en classe. On peut dire qu'un enfant surdou� est souvent bon dans la communication, dans les arts, les choses en rapport avec les math�matiques et les technologies. On remarque souvent la vivacit� de ce genre d'enfant d�s sa prime enfance. Il malm�ne ces jouets, il les d�membre, les d�sarticule, rien que pour le plaisir de les r�parer, et il y arrive sans difficult�, on pourrait dire, presque par instinct et sans que personne lui montre. L�enfant surdou� vous taraude de questions, s'int�resse sur plusieurs sujets � la fois, per�oit certaines choses de fa�on diff�rente qu'un enfant ordinaire. S'il �choue dans sa scolarit�, ce n�est pas parce que le programme scolaire est difficile, mais parce qu�il ne lui convient pas et n'est pas adapt� � ses capacit�s intellectuelles. On peut certes d�pister l�hyper-intelligence d'un enfant gr�ce � des tests psychologiques. Cela peut donner une id�e sur les pr�dispositions de l'enfant mais il faut toute une �quipe pour le suivre. L�autre �cueil qui emp�che un enfant surdou� de s��panouir en Alg�rie, c�est que malgr� le fait qu�on puisse le d�tecter � travers des tests d'intelligence pour l��valuation de son quotient intellectuel (QI), ces tests restent n�anmoins inadapt�s � notre environnement socioculturel. Les recherches dans ce domaine n�ont pas �t� faites. On se restreint � appliquer int�gralement les tests calqu�s sur ceux des pays europ�ens. Il y a un organisme priv� qui forme des psychologues mais cela reste insuffisant. Ce probl�me doit �tre pris en charge de fa�on s�rieuse par l�Etat et � l��chelle nationale. Les tests doivent �tre diff�rents suivant l��ge de l�enfant. Ce sont g�n�ralement des items, des formes g�om�triques de niveaux diff�rents.
En l�absence de structures et de prise en charge, quel est le r�le des parents ?
Cette question est tr�s importante. Le r�le des parents est primordial, mais cela d�pend du milieu socio-culturel dans lequel �volue l'enfant. On sait qu'un enfant surdou� pose beaucoup de questions, il est tr�s curieux, il bouge beaucoup, sans pour cela qu�il soit hyperactif ou instable. Si les parents ne supportent pas ses questions ou sont incommod�s par son �nergie d�bordante, l'enfant peut se recroqueviller sur lui-m�me. Il peut devenir timor� ou se sentir �touff�. Si par contre ses parents le comprennent, le soutiennent, apaisent sa curiosit�, l'orientent, prennent en charge ses hobbys, lui r�servent son espace et lui accordent une certaine libert� de mouvement, il peut s��panouir dans cet environnement favorable. Par contre, il peut �tre inhib� dans un environnement qui lui est hostile. Cela d�pend bien s�r du niveau d'instruction et culturel des parents. Il ne s'agit pas de mettre de grands moyens � la disposition de l'enfant surdou�. Il a juste besoin de compr�hension, de suivi, de patience et de valorisation.
Songe-t-on � cr�er des classes sp�ciales pour enfants surdou�s ?
Malheureusement, il n'existe pas de classes sp�ciales ni de structures pour ce genre d'enfants. Il y a juste des �coles pour des enfants qui sont dans les normes ou pour les enfants qui ont un retard mental. Cependant, c'est bien de soulever cette question, car c'est une demande pressante. On peut m�me dire que finalement les enfants surdou�s ont besoin d�avoir leur propre structure, car, malheureusement, leur intelligence devient presque un handicap. Il est urgent de se pencher sur ce probl�me, car il est malheureux que ces enfants surdou�s, qui sont en r�alit� une v�ritable richesse pour la soci�t�, soient marginalis�s et ne disposent d�aucune prise en charge. Il est imp�ratif de mettre en place des structures, former les enseignants, �tablir des programmes pour cette cat�gorie d'enfants. Cela doit se faire d�s les premi�res classes primaires.
D'apr�s votre exp�rience, quels sont les centres d'int�r�t des enfants surdou�s ?
G�n�ralement, les enfants surdou�s s'int�ressent pratiquement � tout et surtout � des choses qui d�passent leur �ge. Ils s'int�ressent beaucoup aux technologies, aux arts, � la politique, souvent aux choses qui sont du domaine des adultes. Certains sont capables de r�parer un ordinateur, � jouer d'un instrument de musique, � monter ou d�monter un appareil, � analyser les faits politiques de fa�on pertinente. Ce sont autant de signes qui renseignent sur une grande intelligence. Ils peuvent �tre brillants dans plusieurs disciplines. Souvent, ils ma�trisent les langues, excellent dans le sport. En fait, ils ont une pr�disposition � l'excellence dans ce qu�ils entreprennent. L�enfant surdou�, quand il est dans une p�riode de recherche de soi, peut donner l'impression d'�tre anarchique, avoir plusieurs centres d'int�r�t ; on peut croire qu'il est instable alors qu'il est en train de bouillonner d'�nergie. Il a juste besoin d'�tre soutenu et orient� pour atteindre la r�ussite. Il ne faut pas croire que l�enfant surdou� se trouve uniquement dans les �coles. Celui qui se trouve en �chec scolaire peut tr�s bien finir dans la d�linquance et user n�gativement de son intelligence faute d'avoir �t� int�gr� dans la soci�t�.
Dans leur comportement, sont-ils plut�t extravertis ou timides ?
Le probl�me avec les surdou�s, c'est qu'ils peuvent �tre timides car ils �prouvent des difficult�s d'adaptation ; ils peuvent �tre solitaires, ils ont conscience de leur diff�rence, ils se sentent incompris, car il ne rentrent pas dans le moule et ne collent pas � la norme. Cela donne parfois des complications relationnelles avec autrui. Il peut m�me d�velopper des troubles psychologiques sauf dans le cas s�rieusement pris en charge et o� son environnement lui apporte une aide pr�cieuse.

Nombre de lectures :

Format imprimable  Format imprimable

  Options

Format imprimable  Format imprimable