Par Na�ma Yachir
naiyach@yahoo.fr
Il est � peine 10h, et l�on se bouscule d�j� dans les all�es du march�. Yassine, les yeux rouges et gonfl�s, une liste � la main, balaie des yeux les �talages garnis de toutes sortes de produits que les vendeurs arrosent d�eau fra�che.
Yassine n�a pas beaucoup dormi, il s�est empiffr� de bouraks au s�hor et se sent tout barbouill�. Il en a encore des naus�es. Il se dirige vers la boucherie pour choisir un bon gigot. En chemin, il croise un voisin encore assomm� par une nuit blanche apr�s des salamalecs et un �change de formules de politesse, on se dit au revoir et l�on n�oublie surtout pas l�incontournable saha f�tourek m�me si la rupture du je�ne est dans 9 heures. Yassine regarde les morceaux de viande dispos�s sur le pr�sentoir et a un haut-le-c�ur : �Encore de la viande pour ce soir, je n�ai pas encore dig�r� celle de la veille !� Il prend machinalement son gigot et, sans aucun commentaire, paye la marchandise, empoche la monnaie, remercie le boucher qui ne manquera pas de lui souhaiter bon app�tit avec un large sourire. Yassine, visiblement agac�, lui lance un merci � peine audible. C�est au rayon l�gumes que notre quidam se trouve � pr�sent. Carottes, pommes de terre, courgettes, tomates, aubergines, poivrons et salade. Tout y est. Il remplit son couffin, r�cup�re sa monnaie, et pour ne pas changer, aura droit � son saha f�tourek, �10h30. Cette fois, pour seule r�ponse, il se contentera d�un salem. Yassine poursuit sa vir�e culinaire et se dirige cette fois vers le vendeur d�olives et autres condiments. Il ach�tera ses olives noires, vertes, violettes, ses piments, ses variantes, quelques petits oignons blancs marin�s, et le tour est jou�. Il jette un coup d��il � sa liste, et lance un ouf de soulagement. �Plus que les diouls et le pain et j�aurai termin�. Vivement mon lit douillet pour un bon somme jusqu�au f�tour.� Il ajuste ses provisions, les r�gle et se farcira encore la bouille du vendeur presque heureux de lui souhaiter bon app�tit. Cette fois, exc�d�, Yassine ne r�pondra pas. �Mais bont� divine, qu�ont-ils tous ces je�neurs � penser d�j� au d�ner alors qu�ils n�ont pas encore dig�r� celui de la veille ! On dirait qu�il n�y a pas autre chose � souhaiter durant la journ�e que celle de bien se goinfrer d�s l�annonce de la rupture du je�ne. A ce point nous sommes r�duits, un mois durant, � d�affreuses panses.� Yassine, horripil�, jura par tous les saints de ne plus faire ses emplettes � 10h. N�en d�plaise � sa ch�re �pouse !

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