Actualit�s : Me MOKRANE A�T-LARBI AU SOIR D�ALG�RIE :
�Bouteflika est seul responsable du blocage�


La situation politique en Alg�rie conna�t un blocage des plus critiques. Gouvernement en fin de mission mais toujours en place, des r�formes qui n�ont servi qu�� noyer la sc�ne politique et semer la confusion. Des minist�res dans un �tat de vacance, un projet de Constitution dans les limbes, des partis politiques en proie � des dissensions, une inflation croissante et pour finir la grogne populaire qui n�augure rien de bon.
Tous les ingr�dients d�une crise profonde qui convoque un changement imm�diat du syst�me sont r�unis. Dans cet entretien express, Me Mokrane A�t-Larbi est sans �quivoque : le pr�sident de la R�publique qui concentre les pleins pouvoirs entre les mains est seul responsable de ce blocage.

Le Soir d�Alg�rie : L�Alg�rie est dans une situation de statu quo dans tous les domaines, exacerb�e par des col�res populaires durant le mois de Ramadan. Comment l�expliquezvous ?
Me Mokrane A�t-Larbi : Cette situation de blocage est due au fait que le pr�sident Bouteflika n�arrive m�me pas � constituer un gouvernement suite � la d�b�cle �lectorale. Je crois qu�il ne s�attendait pas � cela, pensant peut-�tre que son discours � la veille des �lections l�gislatives allait emballer et mobiliser le peuple. Mais ce dernier n�a pas r�pondu favorablement � son appel. R�sultat, l�actuelle assembl�e est dans l�impasse. C�est le statu quo depuis des mois et rien ne pr�sage que cette situation va trouver une issue dans les prochains jours. Toujours est-il que le pr�sident Bouteflika est seul responsable de ce blocage compte tenu du fait que tous les pouvoirs sont concentr�s entre ses mains. Mais force est de constater qu�il ne fait rien pour d�bloquer la situation et m�me les manifestations des populations et leur col�re contre les institutions ne semblent pas l�int�resser, ni le pr�occuper.

On a annonc� que l�une des plus importantes lois, en l�occurrence celle des hydrocarbures, qui a connu des p�rip�ties du temps de l�ancien ministre de l�Energie et des Mines est actuellement sur la table du Premier minist�re. L�hypoth�se du d�part du gouvernement �tant �voqu�e, quelle lecture faites-vous de cet �tat de fait ?
Je pense que c�est de la poudre aux yeux pour faire croire que ce gouvernement est au travail. Il n�y a plus de gouvernement. y a juste un pr�sident et des secr�taires. C�est lui qui d�cide. Aucun ministre ne d�cide, ni ne peut �mettre un avis, y compris le premier concern� par la loi sur les hydrocarbures. Le sort de cette loi est inconnu. Il faut attendre la formation d�un nouveau gouvernement pour voir un peu plus clair, mais encore une fois personne n�est dans le secret. On ne sait pas quand et qui va �tre dans ce gouvernement. Si le pr�sident ne veut pas pratiquer la fuite en avant, il a int�r�t � dissoudre ce gouvernement et en former un autre. Cependant, il est devant un dilemme. L�actuelle assembl�e n�est pas l�gitime et personne ne lui accorde du cr�dit. Je ne vois pas comment un gouvernement puisse tirer sa l�gitimit� lorsque l�assembl�e n�est , elle-m�me, pas l�gitime.

Des probl�mes d��lectricit�, d�eau, d�ordures ont �maill� tout le mois de Ramadan. A y voir de plus pr�s, ce sont des probl�mes de gestion courante des affaires qui ont surgi de mani�re alarmante, provoquant des manifestations populaires un peu partout dans le pays, donnant l�impression qu�il n�y a aucun interlocuteur en face. Quelle est votre analyse ?
Les responsables ne sont pas �lus par le peuple, donc ils n��prouvent pas le besoin de lui rendre des comptes et encore moins �tre � son �coute, d�o� cette situation d�absence de dialogue. Ces responsables, qu�ils soient locaux ou nationaux ne rendent des comptes qu�� ceux qui les ont plac�s aux postes qu�ils dirigent. Au sommet de l�Etat depuis des d�ann�es, ces probl�mes qui surgissent actuellement li�s � l�eau, l��lectricit�, ordures etc., n�ont �t� consid�r�s que comme des d�tails anodins. Sur le plan s�curitaire, ce qui touche au terrorisme est relativement ma�tris� mais le banditisme et l�ins�curit� sont patents. La v�rit�, c�est que nous n�avons pas eu de gouvernement depuis 1999 capable de r�gler ces probl�mes ou des ministres se r�unissant en Conseil des ministres pour d�battre de leur gestion et proposer des solutions, mais c�est le laisser-aller. Ce qui revient � dire qu�ils ont d�autres pr�occupations.

Il y a une esp�ce de d�confiture et de d�composition de la sc�ne politique. Les partis politiques classiques sont en butte � des crises internes et � des dissensions alors que d�autres partis ont vu le jour, comment expliquer cet �tat ?
On est actuellement � 45 partis politiques � qui on a accord� un agr�ment � un mois des �lections l�gislatives et on en a accord�, il y a quelques jours, � certains et on va encore en agr�er d�autres. On va se retrouver avec une soixantaine de partis qu�on va voir uniquement � l�occasion de rendez-vous �lectoraux. Il n�y a pas de v�ritable vie politique qui suppose projets, d�bats d�id�es, mobilisation etc. C�est la cons�quence directe des r�formes lesquelles, au final, n�ont pas abouti � une d�cantation saine mais au contraire elles ont sem� plus de confusion. Je constate que pendant dix � douze ans, le gouvernement a refus� d�agr�er des partis et voil� qu�on a droit � un v�ritable d�luge de formations politiques en un temps record. Le pouvoir vise l�affaiblissement de l�action politique, ni plus ni moins.

Les droits de l�homme sont en recul en Alg�rie. On l�a vu avec les marches qui sont toujours interdites, les militants des droits de l�homme qui sont inqui�t�s et malmen�s, les journalistes qui sont harcel�s, les syndicalistes qui sont sanctionn�s, en d�pit de la lev�e de l��tat d�urgence cens�e r�tablir les citoyens dans l�exercice de leurs droits et de leur libert�. Pourquoi ce recul ?
A propos des marches, il n�existe aucune loi les interdisant, c�est une instruction Premier ministre qui l�a instaur�e et qui est curieusement toujours en cours. La loi permet tout simplement une proc�dure, en cas d�atteinte � l�ordre public. Le wali peut prendre un arr�t� d�interdiction, c�est du cas par cas. Toujours est-il qu�on ne peut parler droits que dans un �tat de droit o� la loi est respect�e et appliqu�e mais les pouvoirs publics travaillent en dehors des textes. Ils font ce qu�ils veulent. Il faut ajouter � cela le fait que la justice n�est pas ind�pendante et devant cet �cueil taille, le syndicaliste, le journaliste, le militant et le citoyen en g�n�ral n�a aucun moyen de recours. La seule issue et alternative possible reste le changement du syst�me. Il faut donner la parole au peuple. Il faut lancer un d�bat, �couter les Alg�riens. Abolir une loi et en promulguer une autre, changer un ministre et le remplacer par un autre ne m�nent � rien, on ne fera que tourner en rond.

Un flou entoure le projet de r�vision de la Constitution et jusqu�� l�heure actuelle, c�est le black-out. Qu�en pensez-vous ?
Il n�y a aucune surprise, le pr�sident Bouteflika, dans son discours du 15 avril 2011, a parl� de la cr�ation d�une commission pour un projet de texte de Constitution. dit dans le m�me discours qu�il aura la d�cision finale. Et personne n�a �mis la moindre contestation, ni m�me les partis politiques. Et jusqu�� pr�sent, il n�ya pas eu de commission. Il n�y a eu ni d�bat ni concertation. C�est le vide mais je dirais qu�apparemment cette situation arrange tout le monde : pouvoirs publics comme partis politiques. L�argent, ce n�est pas ce qui manque et chacun fait ce qu�il veut car le changement veut dire rendre des comptes. Et qui veut vraiment rendre des comptes dans ce pays ?
F. H.

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