Par H. Belkadi
Notre voyage culinaire de cette semaine va nous faire revivre une attitude que nos grands-m�res ont perp�tu�e depuis des g�n�rations et qu�elles ont inculqu�e aux g�n�rations actuelles. C�est un geste humain et noble qui consiste � offrir aux femmes enceintes un repas ou une douceur, un mets quel qu�il soit, dont elles auraient envie en secret. Nous avons choisi pour elles batata fliou.
C�est la veille des noces de Soumeya, et toute la famille a �t� invit�e � la soir�e de l�henna. On attend la famille du mari� qui va arriver incessemment. Les femmes sont par�es de leurs plus beaux atours, toutes habill�es de tenues traditionnelles aux couleurs chatoyantes. Elles se retouvent apr�s de longues dates, et c�est une occasion de donner des nouvelles de leurs familles et de leurs amis. Parmi les convives se trouve Khalti Hmama, une quinquag�n�re, tante paternelle de la mari�e, qui ne cesse de parler. Tout le monde l��coute avec une grande attention, et aucune des femmes pr�sentes ne voudrait perdre un seul mot de ce qu�elle raconte. Cette vieille dame a v�cu toute son enfance et une partie de sa vie de femme � La Casbah d�Alger, dans la grande maison familiale. Elle parle des ann�es qu�elle y a pass�es avec une grande nostalgie et une profonde amertume. Voisins et parents ne formaient qu�une m�me famille, et personne n�avait de secret pour l�autre. On se disait tout et on se confiait du plus petit secret au plus s�rieux. On �tait au courant de tous les �v�nements, heureux ou malheureux, et on les partageait avec beaucoup de sinc�rit�. Khalti Hmama nous raconte une anecdote qui lui est arriv�e et dont elle en rit aujourd�hui. Alors qu�elle attendait son premier enfant, elle avait � peine seize ans, et qu�elle vaquait � ses occupations comme � l�accoutum�e, une odeur de menthe sauvage(flio ou pouliot) lui monta � la t�te et emplit ses narines. Elle ne pouvait sentir autre chose que cette odeur qui envahissait tout son �tre. Ses yeux brillaient d�un �clat per�ant. Elle savait que l�odeur venait de chez la voisine qui habitait ouast eddar et elle cherchait un pr�texte quelconque pour rentrer chez elle. Alors, elle prit une galette qu�elle avait pr�par�e le matin au petit-d�je�ner, la recouvrit d�un torchon propre et suivait l�odeur all�chante qui guidait ses pas. Elle remonta un pan du rideau qui couvrait la porte d�entr�e puis s�annon�a en appelant sa voisine de son pr�nom. Cette derni�re accourut vers elle, et lorsque Hmama lui tendit la galette, elle lui demanda timidement qu�elle �tait l�odeur qui se d�gageait de sa cuisine. Comme tout le monde savait qu�elle �tait enceinte, elle lui prit la main et l�attira dans la cuisine o� la tnidjra fumait encore. Elle la fit asseoir devant la meida et lui servit une pleine assiette de batata fliou dont l�odeur embaumait toute la maisonn�e. Hmama ne se sentit pas de joie et �tait quelque peu g�n�e en m�me temps. Son envie �tait plus forte que tout et elle l�emporta sur sa timidit� et sa r�serve. Elle d�gusta la succulente battata fliou surprise, qui lui paraissait encore plus bonne tant ce n��tait pas elle qui l�avait pr�par� et dont l�envie se faisait sentir depuis d�ja quelques jours. Pour une surprise c�en est une ! Et comme dit l�addage populaire �elle lui est sortie du paradis !�

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