Actualit�s : INITIATIVE POLITIQUE DES DISSIDENTS DU FFS
Samir Bouakouir s�explique


Entretien r�alis� par Sofiane A�t Iflis
Apr�s avoir anim� durant plusieurs semaines une protestation contre la direction du FFS, Mustapha Bouhadef et Djamel Zenati ont sign�, au nom de leurs camarades dans le mouvement de fronde contre les responsables du FFS, une d�claration-annonce d�une initiative politique. Partie prenante du projet, Samir Bouakouir, candidat malheureux � la d�putation lors des derni�res �lections l�gislatives, d�voile, dans cet entretien, les grandes lignes de l�initiative. Fondamentalement, clame-t-il, elle poursuit � non pas mettre du mouvement dans le statu quo mais � le casser. Une perspective, donc, fonci�rement �loign�e des choix tactiques du FFS.
Le Soir d�Alg�rie : MM. Mustapha Bouhadef et Djamel Zenati viennent d'informer du lancement prochain d'une initiative politique. En quoi consiste-t-elle et implique-t-elle l'ensemble des militants et cadres du FFS qui contestent la ligne politique suivie par l'actuelle direction du parti ?
Samir Bouakouir :
Les ��lections l�gislatives�, de par l�ampleur de l�abstention, ont mis � nu le gouffre qui s�pare un syst�me politique obsolescent et finissant de la soci�t� r�elle. Le pays se trouve en situation, non pas de mauvaise gouvernance, mais de non-gouvernance qui accentue la tendance structurelle � l�enlisement et le chaos. Ces derni�res ann�es, notamment depuis l�intronisation de Bouteflika, le pays n�en finit pas de vivre au rythme infernal de la r�pression polici�re, de l�arbitraire judiciaire, d�une corruption institutionnalis�e et d��meutes r�currentes. La responsabilit� du chef de l'Etat dans le processus de d�litement politique et institutionnel, d'affaissement moral et civique est engag�e. Isol� � l�int�rieur, discr�dit� � l�ext�rieur, m�me s�il b�n�ficie d�une certaine complaisance, le pouvoir alg�rien se �bunkerise�, enferm� dans l�illusion que la manne p�troli�re le met � l�abri de toutes les temp�tes. Sur le plan �conomique, sans programme, sans vision, le pays navigue � vue. L�inflation galopante paup�rise de plus en plus la population, poussant les p�res de famille vers la d�brouille pour boucler les fins de mois. Pour leur part, les jeunes n�ont aucune visibilit� sur leur avenir et cherchent par tous les moyens, parfois au p�ril de leur vie, � fuir le pays. Ce ne sont certainement pas les d�clarations volontaristes de ce �nouveau� gouvernement, au profil �technocratique� douteux, qui r�tablira la confiance avec les citoyens. Faut-il rappeler que la majorit� des ministres ont particip� � la descente aux enfers que conna�t le pays ? Plus grave encore, les Alg�riens ont appris que l�ancien chef du gouvernement, qui plus est a accept� ce fait, n�avait m�me pas la possibilit� de r�unir ses ministres. C�est en toute conscience de l�extr�me gravit� de la situation, que nous avons d�cid� d�agir et de lancer un appel � la mobilisation de tous les patriotes alg�riens pour sauver notre nation d�un chaos programm�.
Vous vous tracez une nouvelle voie et vous vous d�finissez de nouvelles perspectives politiques, alors que l'apr�s-l�gislatives vous a vu entreprendre une tentative de repositionnement du FFS sur sa ligne de conduite originelle. Estce- l� un d�laissement de votre premier engagement ?
Non. Il n�y a pas de discontinuit� dans la d�marche. Je ne d�sesp�re pas, mes camarades non plus, de voir le FFS se repositionner comme une force politique inscrite dans un changement radical et pacifique. Il appartient aux militants de ce parti, pr�curseur de la r�sistance d�mocratique en Alg�rie, d�isoler en son sein les individus aux commandes, coupables de compromission. Notre initiative s�inscrit dans une perspective historique qui d�passe le �sort� d�un parti politique. C�est de l�Alg�rie qu�il s�agit. Au lendemain des �lections, cette dynamique du rassemblement a trouv� un �cho positif aupr�s de l�opinion et a suscit� de grands espoirs au sein de la soci�t�. Forts de cet enthousiasme, nous avons d�cid� d�aller � la rencontre des jeunes, des universitaires, des militants politiques, des syndicalistes, des acteurs de l'�conomie productive et cr�atrice de richesses, des femmes, des hommes de m�dias et de la culture qui r�cusent la fatalit� et qui r�sistent avec dignit� et courage. Une plate-forme qui d�finira le contenu et la m�thode de notre d�marche politique sera propos�e dans les prochains jours. C�est certes une �uvre difficile et sem�e d'emb�ches, mais c�est la seule voie de salut pour notre pays. Il faut sortir des logiques d�appareils qui ont st�rilis� le d�bat et provoqu� le d�sengagement citoyen. Il faut faire preuve d�imagination pour r�inventer de nouvelles formes de lutte et d�organisation, promouvoir la culture d�mocratique en bannissant les comportements autoritaires et sectaires, en opposant l�argument � l�insulte et � l�invective.
L'id�e d'un mouvement transpartisan mais qui implique fondamentalement la soci�t� civile ne se suffit certainement pas � elle-m�me. Elle doit n�cessairement �tre port�e par des actions. Lesquelles pensez-vous sont les plus � m�me de lui donner un prolongement pratique ?
Longtemps la �classe politique� a tourn� le dos au peuple alg�rien. Les choix et les grandes d�cisions qui engagent le pays se sont toujours faits dans l�opacit� la plus totale � l�exclusion du peuple alg�rien. Notre mouvement s�inscrit en rupture totale avec ce qui s�est fait depuis l�ind�pendance. Contrairement � d�autres initiatives, nous avons fait le choix de la transparence la plus totale. Nous proposons de rendre le pouvoir au peuple, c�est pourquoi nous avons opt� pour une dynamique politique et non pas pour un parti. Le mouvement que nous projetons de construire n�a pas vocation � participer aux �lections ni � prendre le pouvoir. Ceux qui souhaiteront participer aux �ch�ances �lectorales seront libres de le faire dans un cadre autre que ce mouvement. Le cadre que nous proposons est ouvert et pluriel. L�adh�sion se fait � titre individuelle par l�acceptation d�une charte ou plateforme d�mocratique et ne rentre pas en contradiction avec les structures existantes. Notre d�marche est partie du constat unanime que les r�sistances qui s'expriment pacifiquement dans le pays demeurent h�las dispers�es et politiquement d�sarticul�es. Cette segmentation traduit une certaine incapacit� � transformer toutes ces luttes en un projet alternatif et constitue une source de d�mobilisation populaire. Notre objectif est donc de faire converger toutes les �nergies, au sein de la soci�t� et des institutions, afin de d�gager de nouvelles perspectives politiques �conomiques et sociales pour notre pays et d'�uvrer, par la mobilisation populaire pacifique, � cr�er le rapport de force n�cessaire � la fondation d'une deuxi�me r�publique.
Vous conviendrez que l'aboutissement d'un projet de mouvement large et rassembleur suppose quelques d�cantations politiques pr�alables. Y en a-t-il de perceptibles aujourd'hui sur la sc�ne politique ?

L�apr�s-10 mai a plong� le pays dans une impasse int�grale. Ce scrutin aurait pu constituer une opportunit� pour favoriser une �volution politique positive en renouant avec le processus d�mocratique � partir d�une institution parlementaire r�habilit�e. En entravant cette possibilit�, le pouvoir a cr�� les conditions d�une rupture politique violente. L�incons�quence et l�irresponsabilit� politiques vont forc�ment provoquer une plus grande radicalisation qui prendra fatalement des formes extr�mes, populistes, voire n�o-fascistes. Cet aveuglement � vouloir g�rer le statu quo � travers des r�am�nagements internes au pouvoir est donc suicidaire pour le pays et rend d�autant plus urgente l��mergence d�une grande force politique pacifique alternative en mesure d�emp�cher une nouvelle restructuration interne au syst�me, � l��ch�ance de 2014. Or, le changement n�attendra pas 2014. Il serait illusoire de penser que la situation �conomique, politique et sociale qui pr�vaut actuellement dans le pays permettra � ce pouvoir de se maintenir jusqu�� cette date. De plus, on ne peut accepter que le chef de l�Etat actuel proc�de � une nouvelle r�vision constitutionnelle qui privera de nouveau les Alg�riens de leur droit � l�autod�termination. Aujourd�hui, il ne s�agit plus de mettre du �mouvement dans le statu quo�, mais de le casser !
S. A. I.

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