Culture : THÈME D’UNE ÉTUDE COMPARATIVE DE OMAR TARMLIT, DOCTORANT EN LITTÉRATURE COMPARÉE À PARIS VIII
L’oppression politique et sociale dans le Procès de Kafka et les Vigiles de Djaout


L’oppression politique et sociale dans Le Procès de Kafka et Les Vigiles de Djaout est une étude comparative menée par Omar Tarmlit, un jeune doctorant en littérature comparée à l’université Paris VIII.

Le mémoire soutenu sous la direction de Zineb Ali Ben Ali, une spécialiste en littérature comparée et de la littérature maghrébine d’expression française, vient de faire l’objet d’une édition à Paris chez Mon Petit Éditeur. Omar Tarmlit tente de comprendre comment se décline le thème de l’oppression dans ses variantes politique, sociale et psychologique dans les Vigiles de Tahar Djaout et le Procès de l’écrivain tchèque Frantz Kafka. D’emblée, le jeune chercheur prévient que son souci «n’est pas de faire l’inventaire de tous les comparables possibles» entre les deux productions littéraires des deux romanciers que rien ne rapproche, a posteriori, du point de vue de l’expérience scripturaire et dont les romans, en dehors de leur caractère universel d’œuvre littéraire, n’entretiennent pas de relation de voisinage sur les plans historique, culturel et linguistique. «Ce travail s’inscrit plutôt dans une dynamique de recherche, d’investigation, de tâtonnement, de repérages de points de connexion pouvant fonctionner comme une chaîne de signifiances entre ces deux productions littéraires», dira O. Tarmlit. Ces précautions méthodologiques qui président à la mise en route de sa recherche mises en avant, l’auteur s’est employé à détricoter la problématique de l’oppression immanente aux deux romans et qui s’élabore avec «les singularités » propres au contexte de production de chacune des deux œuvres. D’un côté, il y a, dans le procès de F. Kafka, une justice bridée par un système totalitaire, oppresseur et injuste dans un contexte politico-idéologique du système communiste dominant à l’époque décrite (dans Le Procès de F. Kafka) et, de l’autre, nous avons dans les Vigiles de T. Djaout un ordre oppresseur d’un autre type imposé par une armada de vigiles corrompus et cupides tapis dans une administration omnipotente. «Cette continuité thématique supposée entre les deux œuvres se laisse saisir à un autre niveau, celui de la symbolique des personnages, les Vigiles chez Djaout et les Inspecteurs chez Kafka. Dans Le Procès, l’écrivain tchèque nous met aux prises «avec un homme, Joseph K., fondé de pouvoir dans une banque, qui, un beau matin, voit arriver chez lui deux gaillards, qui lui stipulent qu'il est arrêté. Lui est innocent, du moins, c'est ce qu'il dit. Mais l'est-il vraiment ? Pour quel motif est-il arrêté ? Nul ne le dit, mais «la loi», le sait, et ses voies sont impénétrables, elles aussi. Son procès commence mais nul ne sait où, pourquoi ni comment, ni sur quels documents, ni qui en sont les acteurs judiciaires». Dans les Vigiles de Tahar Djaout, beaucoup d’indices et d’ingrédients narratifs sont mis en scène pour créer une ambiance semblable à celle du Procès de Kafka. Jeune inventeur, Mahfoud Lemdjad, le personnage principal de les Vigiles met toute son intelligence et son talent pour tenir la promesse qu’il s’était faite depuis son enfance : ressusciter le métier à tisser, l’instrument héritage de sa grand-mère et qui perpétue le souvenir du visage et les gestes de son aïeule. Toutes ses démarches entreprises auprès de l’administration pour obtenir son passeport afin de se rendre à la foire aux inventions qui se trouve dans un pays d’Europe pour faire breveter son invention se heurte aux obstacles dressés sur son passage par les représentants d’un ordre bureaucratique absurde et autoritaire qui impose au personnage qui de simple requérant de documents administratifs se retrouve le jouet d’un système administratif omnipotent dont le premier représentant se trouve à la mairie : le planton ainsi décrit : «Un homme d’âge mûr (…), l’un de ces anciens combattants qui cumulent une pension de guerre, une retraite anticipée, un fonds de commerce et un boulot assis» et qui impose sa loi au jeune inventeur qui se soumet à l’exercice fastidieux et surréaliste d’expliquer les détails techniques de son invention au préposé au guichet de l’accueil qui est analphabète mais fort de son statut de planton et de sa légitimité d’ancien combattant. En face, Mahfoud Lemdjad dont le savoir et l’intelligence ne lui sont d’aucun secours devant le sentiment d’anéantissement et de culpabilité qui naîtra de l’affrontement inégal qu’il devra mener, à son corps défendant, contre une machine bureaucratique qui symbolise la toute puissance d’un pouvoir absurde, arrogant et oppresseur. Voici revisités, grâce et à travers l’étude d’Omar Tarmlit, deux romans majeurs dont les auteurs ont marqué leur époque. Les thèmes qui y sont abordés sont d’une brûlante actualité. Dans le Procès de F. Kafka, comme dans les Vigiles de T. Djaout, c’est une satire sociale qui nous est livrée. Chacun à sa façon et suivant leur époque, les deux auteurs posent un regard sur la société, en se jouant de la façon dont le pouvoir est exercé via les différents appareils de l’Etat et ses représentants. Par l’entremise de la satire et de l’ironie, l’on est invité à s’interroger avec gravité sur les notions du pouvoir, de la liberté et de la loi.
S. Ait Mébarek





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