A l’heure où les mandataires d’Oran ruent dans les
brancards interpellant les autorités locales quant à leurs défaillances
dans l’éradication de l’informel qui parasite les circuits de
distributions des fruits et légumes, au même moment la Société des
centres commerciaux d’Algérie (SCCA) annonce le lancement des travaux du
mégaprojet d’un second centre commercial.
Ces deux informations qu’il faut bien rapprocher, non pas seulement
parce qu’elles ont pour lieu la commune d’Es-Senia (wilaya d’Oran), mais
parce qu’elles sont les deux facettes d’une évolution importante dans le
mode de consommation des Algériens. Les mandataires se trouvant au
nouveau marché de gros d’El Kerma paient déjà les conséquences de
l’anarchie en matière de gestion d’un secteur sensible qu’est le
commerce, et de l’application des dispositions réglementaires du
ministère du Commerce variant d’une wilaya à une autre. Les mandataires
font les frais, également, des conséquences de l’existence
d’organisations professionnelles concurrentes et rivales au même sigle
pourtant, et qui noient la parole des vrais commerçants.
A terme pourtant, c’est la quasi-faillite des mandataires dans leur
mentalité et fonctionnement actuel ainsi que celui du petit commerce qui
risque de se produire avec l’apparition du modèle «hypermarché et centre
commercial».
Ainsi, la SCCA, après son fameux centre commercial de Bab Ezzouar,
poursuit son développement en ne s’appuyant plus seulement sur la caste
des nantis du régime et de leurs familles. Ces dernières années, la
vague d’une classe moyenne algérienne retrouvée et au pouvoir d’achat
requinqué vient ainsi doper le modèle de consommation à l’occidentale de
l’époque des «30 glorieuses», qui s’impose en Algérie aussi.
Le principe des grands centres commerciaux est d’offrir sur un même lieu
des services et espaces dédiés entièrement à la consommation avec des
offres de produits de biens de consommation d’importation. Mais dans le
même temps pour fixer et attirer la clientèle, il y a aussi le
développement d’offres de produits de consommation dits culturels et de
loisirs.
Cette évolution du consommateur algérien, du moins d’une partie,
s’accompagne de profondes et irréversibles mutations de la société
algérienne même s’il est encore difficile de les appréhender : famille
nucléaire, pouvoir d’achat, entrée de la femme dans le monde du travail,
mondialisation, libre-échange, etc. Dès lors, rien de plus surprenant
d’apprendre que la SCCA compte accroître, par rapport à celui de Bab
Ezzouar, la superficie de son deuxième grand centre commercial qui sera
implanté près d’Oran. L’on parle ainsi d’une superficie totale de
32 000 m2 consacrés à des hypermarchés, bowling, fitness, crèche,
restaurants, etc. 29 000 m2 auraient déjà été octroyés via des contrats
de location à des clients.
Mais à l’heure où les incertitudes politiques, régionales et
sécuritaires mais aussi et surtout économiques planent avec le risque de
choc pétrolier ou énergétique algérien, la SCCA a-t-elle misé sur le bon
modèle ?
Fayçal M.