Le secrétaire général du Front de libération
nationale ne s’estime pas «directement concerné» par les accusations
contenues dans la lettre du président de la République. Pour Amar
Saâdani, ce message n’est qu’une étape avant l’annonce officielle de la
candidature de Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat.
Tarek Hafid - Alger (Le Soir)
Amar Saâdani refuse de reconnaître qu’il est la principale cible de
la mise au point de Abdelaziz Bouteflika.
Le patron du FLN l’a encore une fois répété, hier, dans une déclaration
au site électronique Tout sur l’Algérie. Il estime ne pas être «concerné
directement» par la teneur de ce message. Pourtant, les accusations du
chef de l’Etat sont très claires : «Des déclarations irréfléchies de
certaines hautes personnalités publiques, relayées par des commentaires
de tous bords, ont donné matière, aux médias nationaux et étrangers, à
des commentaires et des supputations attentatoires à l'unité de l'Armée
nationale populaire. Les adversaires, occultes et déclarés, exploitent
cette situation préjudiciable pour tenter d'imposer la thèse du conflit
interne au sein de l'Armée nationale populaire en présentant le
Département du renseignement et de la sécurité (DRS) comme une structure
agissant en violation des règles qui régissent ses missions et
attributions. Cette perception des réalités dénuée d'objectivité impose,
à tous les responsables, un effort urgent et efficient pour qu'il soit
immédiatement mis fin à cet état de fait.» Il est utile de revenir sur
les propos tenus par Amar Saâdani dans l’entretien accordé à TSA le 3
février pour confirmer qu’il est bien l’auteur de la première salve
contre les militaires et le chef du Département du renseignement et de
la sécurité, le général-major Mohamed Mediene.
«Belayat dit à son entourage qu’il est mandaté par “Si Ali” qui est le
général Toufik. Belayat travaille sous les ordres de Si Toufik. Ce
dernier est impliqué dans cette tentative de
déstabilisation qui vise le parti et son secrétaire général.
Personnellement, lorsque j’ai évoqué l’opportunité de séparer le DRS du
politique, j’ai visé principalement le département de la sécurité
intérieure et j’ai épargné les deux autres départements du DRS qui sont
la sécurité militaire et la sécurité extérieure. Il faut savoir que
c’est le département de la sécurité intérieure qui a gardé toujours un
lien et une proximité avec la classe politique, la presse et la justice.
J’ai dit et je le répète, ce département a interféré dans le travail de
la justice, des médias et des partis politiques. Pour le FLN, des
colonels ont approché des membres du Comité central pour me destituer.
La sécurité intérieure ne peut pas nier qu’elle agit sous les ordres du
général Toufik. Ce département outrepasse ses prérogatives.»
Mais ses principaux griefs, Saâdani les a concentrés sur des dossiers
relevant de la sécurité de l’Etat. «Ce département avait failli dans la
protection et la sécurité du président Mohamed Boudiaf. Il n’a pas su
protéger Abdelhak Benhamouda, ni les moines de Tibehirine, ni les bases
de pétrole dans le Sud, ni les employés des Nations unies en Algérie, ni
le Palais du gouvernement. Cette direction n’a pas su bien protéger le
Président Bouteflika à Batna où il avait été la cible d’une tentative
d’assassinat. A mon avis, Toufik aurait dû démissionner après ces
échecs», a déclaré Saâdani.
Ce à quoi Bouteflika répond : «Nul n'est en droit d'attenter aux
fondements de l'édifice républicain ni aux acquis. Nul n'est en droit,
quelles que soient ses responsabilités, de se placer au-dessus des
dispositions de la Constitution et des lois de la République. Nul n'est
en droit de régler ses comptes personnels avec les autres au détriment
des intérêts suprêmes de la nation tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Ces quelques rappels ont pour objectif de réaffirmer clairement que,
contrairement aux allégations et aux spéculations rapportées par voie de
presse au préjudice de la stabilité de l'Etat et de l'Armée nationale
populaire, le Département du renseignement et de la sécurité reste
pleinement mobilisé pour la bonne exécution des missions qui lui
incombent, à l'instar des autres composantes de l'Armée nationale
populaire.»
Hier, dans sa déclaration à TSA, Amar Saâdani a tenté de tourner la
situation à son profit. Ainsi, cette lettre incendiaire «précède, en
fait, l’annonce de sa candidature à la présidentielle». De nouvelles
réactions sont attendues aujourd’hui puisque le secrétaire général du
FLN a convoqué une réunion du Bureau politique.
T. H.