Chronique du jour : Les choses de la vie
30 degrés en février ! Nous gèlerons en juillet...
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Comme
pour lui rappeler qu’il reste un être extrêmement fragile et démuni face
à ses brusques et ravageurs sursauts, la nature réserve à l’homme de
bien funestes surprises qui, parce qu’elles sont inattendues, causent
des préjudices immenses. Ainsi en est-il de ce qui pourrait être l’une
des plus grandes sécheresses de tous les temps et qui se dessine
progressivement sous nos yeux, en cet hiver anormalement chaud !
Impuissant devant le réchauffement climatique qui embrase la planète, le
Terrien ne peut que constater les dégâts, tout en se culpabilisant quant
aux effets néfastes de son action contre la nature. En effet, on sait
aujourd’hui avec exactitude que c’est le développement économique mal
maîtrisé qui est la principale cause de ces dérèglements climatiques.
Et ce monde qui applaudit aux stupéfiantes avancées de la technologie
moderne, qui envoie des sondes à des centaines de millions de kilomètres
de la Terre pour explorer les abysses intergalactiques, qui fait marcher
un engin motorisé sur la planète Mars ; ce monde qui crée des puces
microscopiques pouvant contenir des milliards de fichiers informatiques
et qui recule, chaque jour un peu plus, les limites de la découverte
scientifique ; ce monde est subitement incapable d’assurer la protection
de la nature et, partant, la bonne marche des saisons !
En fait, la formidable avancée technologique qu’a connue notre planète
ne s’est pas faite en conformité avec ses besoins réels pour une plus
juste répartition des moyens de surveillance et de protection des
catastrophes naturelles. Cette avancée profite à une minorité de riches
dont les besoins sont sans cesse renouvelés pour les orienter vers une
consommation excessive de produits de toutes sortes. Ainsi, à peine un
produit technologique est-il sur le marché qu’on en invente un autre qui
le rendra évidemment obsolète mais qui n’apportera rien de nouveau, si
ce n’est un léger plus qui est souvent un plus de… coquetterie !
Prenons l’exemple du téléphone mobile, l’une des plus grandes inventions
de ces dernières décennies. Son arrivée a bouleversé la vie des humains
dans de très nombreux pays mais aussi fouetté le marché des nouvelles
technologies, apportant beaucoup d’argent dans les poches des sociétés
de fabrication. Mais personne ne pouvait prévoir la tournure des
événements : si la vocation première du téléphone mobile est de
permettre aux gens de communiquer à partir de n’importe quel point, sans
être obligé de recourir à une ligne «fixe», il n’était pas évident du
tout que cet appareil allait servir à… chatter ! C’est-à-dire à revenir
à une vieille méthode de la communication, largement dépassée, et qui
est celle de l’écriture ! Mais une écriture qui n'a plus besoin de la
poste pour parcourir des centaines, voire des milliers de kilomètres. Et
en quelques secondes, le message arrive à destination, avec une réponse
immédiate !
Ainsi dévoyé de sa mission initiale, le téléphone mobile peut faire
n’importe quoi ! L’essentiel étant qu’il s’enrichisse de fonctions
nouvelles qui le rendront toujours plus cher et qui feront paraître
celui que l’on possède bien désuet et dépassé sur tous les plans. Un
téléphone mobile n’est pas un appareil photo et pourtant ! On en créera
un qui prendra des documents photographiques de plus en plus
sophistiqués ! Mais l’appareil avec caméra coûtera plus cher et attirera
les consommateurs qui ont déjà payé pour un appareil sans caméra ! Et,
comme la photo ne suffira pas à engloutir les ambitions pantagruéliques
des constructeurs, on ajoutera quelques mois plus tard, une caméra vidéo
! Tiens, dépassé déjà l’appareil photo ? Oui, il faut le changer…
Maintenant, il y a la télévision. On peut la regarder à travers son
smartphone (le nouveau nom du téléphone mobile «enrichi»). Elle est
d'excellente qualité et couvre certaines chaînes que l'on paye pour voir
sur écran TV ou que l'on pirate chez nous !
Dans cette inlassable quête de perfectionnement technologique, mue par
de gros intérêts financiers, l’homme prouve qu’il est un être
extrêmement intelligent puisque ces découvertes restent quand même de
belles prouesses scientifiques qu’il convient de saluer, au-delà de
leurs motivations mercantiles. Et c’est là où le bât blesse ! Car cet
extraordinaire effort dont les résultats sont si probants reste confiné
aux laboratoires sophistiqués des grandes multinationales, et pas
seulement celles qui fabriquent du matériel de téléphonie mobile. Car
les exemples cités plus haut peuvent être appliqués à pas mal
d’innovations qui n’ont d’autres objectifs que de créer des besoins
nouveaux chez les consommateurs. Imaginons un instant que le 1/1000e des
sommes pharamineuses attribuées à l’avancée des «technologies de la
consommation» soient allouées à l’aide et au soutien des peuples
déshérités dans tous les domaines de la vie, afin de réduire l’écart
entre riches et pauvres et de rendre le monde vraiment meilleur. Une
partie de cet argent pourrait servir à financer un système d’alerte des
tsunamis qui pourrait aider des pays sous-développés ou en voie de
développement à réagir à temps, pour sauver des dizaines de milliers de
vies et empêcher les vagues mortelles de tuer à nouveau. Cela est
possible et a été démontré scientifiquement. Mais c’est l’argent qui
manque ainsi qu’une réelle volonté politique d’agir efficacement pour un
développement durable de l’humanité. Cependant, une telle orientation
demeurerait utopique tant que les puissances occidentales ne se
départissent pas de leur politique impérialiste, expansionniste et
usurpatrice qui rafle les richesses du tiers-monde, refusent — pour
certaines d'entre elles — de signer les accords de protection de
l’environnement, encouragent la rapine et la corruption à une large
échelle et soufflent sur les conflits locaux quand elle ne les
provoquent pas.
Pour sauver le monde, l’humanité a besoin d’une autre Amérique, d’un
autre Japon, d’une autre Corée du Sud et d’une autre Europe, moins
pollués par l’argent et le profit et plus sensibles aux souffrances qui
les entourent. Des pays riches qui n’ont pas besoin des grandes
catastrophes pour montrer leur générosité mais qui agiraient presque au
quotidien pour alléger le lourd fardeau de la pauvreté, de la maladie et
de l’ignorance dans le monde. Quant à nos pays, ils doivent se
débarrasser en urgence du joug de la dictature, de l'injustice et de la
corruption.
Puissions-nous un jour comprendre que la planète Bleue ne peut continuer
avec ces politiques suicidaires qui font peser de graves dangers sur son
avenir... Rêvons à une humanité qui aura le courage de se débarrasser de
tout ce qui est superflu, tout ce qui est nuisible à la nature, tout ce
qui privilégie la consommation; une humanité qui comprendra la nécessité
impérieuse de concilier avancée technologique et véritables besoins de
l’homme.
M. F.
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