Crise diplomatique sans précédent parmi les
monarchies du Golfe arabique. Par son comportement, le Qatar a fait se
liguer contre lui trois de ses voisins : l’Arabie Saoudite, les Emirats
arabes unis et le Bahreïn. Le Conseil de coopération du Golfe (CCG),
sorte de communauté politico-économique des monarchies du Golfe,
connaît, du coup, sa première profonde fissure.
Pleine, la coupe a fini par déborder. Doha a tellement exagéré ses
ingérences directes ou indirectes dans les affaires intérieures des
capitales voisines que ces dernières ont réagi de la manière forte.
L’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis et le Bahreïn ont décidé,
hier mercredi, de rappeler leurs ambassadeurs au Qatar. Une première
dans les annales diplomatiques de la région, en tout cas depuis la
création du Conseil de coopération du Golfe en 1981.
Le rappel, qui pourrait en appeler à une totale rupture des relations
diplomatiques, a fait suite à une réunion, à Riyad, qualifiée de
houleuse, des ministres des Affaires étrangères du CCG. Une réunion
durant laquelle, l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis et le
Bahreïn, faisant cause commune, ont vainement tenté de faire entendre
raison à leur voisin le Qatar, à leurs yeux coupable d’une excessive
ingérence dans les affaires de pays tiers, les leurs au premier chef.
Selon l’agence de presse saoudienne SPA, « les pays du Conseil de
coopération du Golfe ont tout fait auprès du Qatar pour s’entendre sur
une politique unifiée (…) garantissant la non-ingérence de façon directe
ou indirecte dans les affaires de chacun des pays membres».
Précisément, le Qatar a été sommé par ses voisins de ne plus s’adonner,
comme il le fait, aux actions de nature à menacer la sécurité et la
stabilité des Etats membres du CCG. En cause, le redoutable instrument
de propagande qu’est la chaîne Al Jazeera. Cette sommation intervient
après que l’émir du Qatar, Cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani, eut manqué à
l’engagement qu’il avait pris lors d’un précédent mini-sommet du CCG,
regroupant outre l’émir du Qatar, ceux de l’Arabie Saoudite et du
Koweït. En dépit du rappel à l’ordre, le Qatar a continué à soutenir les
mouvements islamistes qui activent dans les contrées voisines, menaçant,
lorsqu’ils recourent aux violences terroristes, les régimes
monarchiques.
Par ailleurs, la conduite à observer par rapport à la situation en
Égypte a été également un point de discorde entre la «ligue des trois»
et Doha. Le Qatar soutient ouvertement le président Morsi déchu et les
Frères musulmans. Ceci pendant que le reste des monarchies du Golfe ont
apporté leurs soutiens politiques et financiers au nouveau régime qui a
déposé Morsi. Ce qui a fait que la discorde soit profonde. Le petit
émirat du Qatar est mal perçu par ses voisins pour ce qu’il entretient,
par ailleurs, comme coopération soutenue avec la Turquie, aux dépens du
CCG, notamment par rapport à la crise syrienne.
L’axe Doha-Ankara fait trembler notamment Riyad qui a tout à perdre dans
cette alliance géostratégique.
S. A. I.