Chronique du jour : CE MONDE QUI BOUGE
Une élection présidentielle pour quoi faire ?


Par Hassane Zerrouky
Saïd Sadi n'a pas tout à fait tort quand il affirme que Bouteflika a constitutionnellement le droit de se représenter. Reste que l'image que donne le chef de l'Etat en postulant à sa propre succession, alors que chacun sait qu' en raison de son état de santé le mieux pour lui est de se retirer et de se reposer, n'est pas bonne pour le pays. La plupart des pays ou presque sont gouvernés par des chefs d'Etat jeunes, à commencer par les trois plus grandes puissances militaires de la planète, les Etats-Unis, la Russie et la Chine. Xi Jinping, le chef d'Etat du pays le plus peuplé de la planète, a 60 ans ; Barack Obama 52 ans et Vladimir Poutine 61 ans ! La chancelière allemande Angela Merkel, que le Premier ministre Abdelmalek Sellal a citée, est âgée de 59 ans ! Tous, en raison de la Constitution de leur pays, ne resteront pas chefs d'Etat à vie !
En Algérie, ceux qui veulent nous convaincre qu'il n'y a pas d'autre solution que celle de voir Abdelaziz Bouteflika reconduit pour un quatrième mandat invoquent comme argument massue, la stabilité ! C'est dans la solidité des institutions, la démocratie et les libertés constitutionnellement garanties que réside la stabilité d'un pays et non l'inverse. Et des institutions solides et fortes ne sauraient se confondre avec l'autoritarisme. Il suffit de voir avec quelle facilité des pouvoirs autoritaires — c'est vrai pour la Tunisie et l'Égypte — qui ont confondu Etat fort avec Etat autoritaire incarnés par des hommes imbus d'eux-mêmes, des potentats, se sont effondrés sous la poussée populaire.
Autre argument massue, ce sont tous ces ministres, chefs de partis et d'organisations de masse, qui se sont découvert une âme de médecin et veulent convaincre les Algériens que le chef de l'Etat est en bonne santé. Mais au regard du court extrait télévisé que des millions d'Algériens ont regardé lundi dernier, il est quasi certain qu'hormis les hommes du pouvoir et tous ceux qui gravitent autour ou à proximité, les Algériens qui auraient été convaincus par la diffusion de ces images doivent se compter sur les doigts d'une main! Abdelaziz Bouteflika n'a prononcé qu'une phrase. Et encore d'une voix à peine audible. Personne ne l'a vu marcher ou se mettre debout. C'est un constat que chaque Algérien a pu faire.
Troisième argument frappant, ces quatre millions de signatures déposées par le Président-candidat au Conseil constitutionnel ! Avec un si grand nombre de signataires, alors que ses adversaires peinent à récolter les 85 000 sigantures exigées par la loi, autant dire que l'élection présidentielle est déjà pliée ! S'il y en a autant, pourquoi dès lors organiser une élection présidentielle ? Ne vaut-il pas mieux faire l'économie de ce scrutin, financièrement coûteux, et passer à autre chose ?
Enfin, terminons par cette image de ces députés du FLN, du RND, du TAJ, du MPA et d'autres laissant éclater leur joie dans l'hémicycle, scandant sans retenue «one, two,three, viva Bouteflika», comme dans un stade de football, qui restera dans les annales de l'histoire du pays. Depuis l'indépendance du pays, même sous le parti unique, on n'avait jamais vécu une telle scène.
Au final, en attendant que le FFS se détermine, avec le retrait de candidats tels Ahmed Benbitour ou Soufiane Djilali et le renoncement de Mouloud Hamrouche, qui du fait de leurs profils et parcours pouvaient donner une certaine crédibilité à cette élection présidentielle, que reste-t-il ? Quelle image se font de l'Algérie, pays majoritairement jeune, ses voisins et ses partenaires ?
H. Z.





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