Soirmagazine : ATTITUDES
Effluences


Par Naïma Yachir
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Sonia regarde sa montre tout en ajustant les derniers effets dans sa valise qu’elle a du mal à fermer. Elle stresse à l’idée de perdre ses bagages. Elle les compte pour la énième fois. Fayçal, son époux, profite des derniers instants avant de quitter Dubai qu’il découvre, et où il a passé un excellent séjour. Sonia est nerveuse. Ils sont en retard, et pour rien au monde elle ne voudrait rater l’avion. Elle a hâte de serrer son bébé chéri dans ses bras, confié à ses grands-parents, et qu’elle n’a pas vu depuis trois semaines. ça y est, tous les paquetages sont soigneusement rangés, le taxi est au bas de l’immeuble, nos touristes font leurs adieux à leurs hôtes et filent tout droit à l’aéroport. Notre couple a fait la fête avant de retourner au bercail et n’a pas fermé l’œil de la nuit. Six heures de vol, ils auront tout le loisir de récupérer les heures de sommeil perdues, c’est du moins ce qu’ils espéraient. Ils arrivent in extremis à bon port et auront tout juste le temps d’enregistrer leurs bagages avant d’embarquer. Sonia est à bout de nerfs, elle ne voit pas le cabas bleu où elle avait rangé les cadeaux de la petite Camélia, elle panique, Fayçal la rassure :
- Mais tu n’as pas les yeux en face des trous. Le voilà, il est sous ta valise. Sonia, trop fatiguée, ne répond pas. On annonce l’embarquement. Les passagers se dirigent vers l’appareil. Ce dernier est bondé. Sonia et Fayçal n’ont qu’une seule envie : s’affaler sur leur siège et dormir.
Ils s’installent tant bien que mal et tentent de trouver la bonne position pour un somme bien mérité. Mais voilà qu’une odeur répugnante les secoue. Ils se regardent, puis fixent leurs voisins, l’effluence écœurante gagne une bonne partie de l’avion. Les voyageurs, incommodés, se bouchent les narines et s’aspergent d’eau de toilette. Les effluves empestent l’atmosphère. Les hôtesses de l’air ont des haut-le-cœur et affichent malgré tout un sourire jaune. Sonia n’en peut plus. Les relents nauséabonds de chaussettes qui puent le fromage pourri a atteint son paroxysme, et le «coupable», plongé dans sa lecture, ne bronche pas. Sonia est prise de nausées. Elle court aux toilettes, vomit ses tripes. Elle est piégée comme un rat et ne peut changer de place car tous les sièges sont occupés. Elle regagne son fauteuil. Elle est éreintée, lessivée. Ses paupières lourdes se ferment. Elle enveloppe son nez avec une serviette trempée de parfum et sombre dans un profond sommeil, qui aura en fait duré qu’une petite demi-heure.
- Sonia, réveille-toi nous allons atterrir dans quelques instants. Elle ouvre les yeux, regarde son mari et soupire : Enfin ! Le cauchemar est terminé.



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