Contribution : ALERTE AU CHIKUNGUNYA
Un virus transmis par un moustique
Par Kamel Sanhadji*
«Moustique : plus dangereux que n’importe quelle bête 0féroce.»
(Gustave Flaubert, 1821-1880,
Ecrivain,
Dictionnaires
des idées reçues)
Le virus chikungunya fait de nouveau parler de lui. Il sévit
actuellement aux Antilles françaises. Il se propage à une allure
épidémique aux îles voisines. Le virus transmis par des moustiques, en
tant que vecteurs, a contaminé 62 000 personnes dans les Caraïbes depuis
décembre. Et il circule.
Le chikungunya, célèbre depuis l'épidémie de la Réunion en 2005, se
caractérise par une fièvre élevée et brutale, d'intenses douleurs
articulaires, des maux de tête et des courbatures. En l'absence de
médicament curatif, le seul traitement consiste à soulager la douleur
avec du paracétamol. Il arrive toutefois que la maladie évolue vers une
forme chronique marquée par des douleurs articulaires persistantes et
invalidantes.
Le virus du chikungunya, transmis à l’homme par des piqûres de
moustiques du genre Aedes, provoque chez les patients des douleurs
articulaires aiguës. La maladie est endémique principalement en Asie du
Sud et en Afrique. En 2005, une importante épidémie de chikungunya a
touché les îles de l’Océan indien et notamment l’île de La Réunion, avec
plusieurs centaines de milliers de cas déclarés. En 2007, la maladie a
fait son apparition en Europe, où le moustique vecteur Aedes albopictus
s’est établi.
Les premiers cas autochtones en France ont été recensés en 2010. Les
traitements existants sont uniquement symptomatiques.
L’épidémie s’installe et se propage
Alors qu'on signalait sa présence inédite sur l'île de Saint-Martin,
début décembre, l’autorité de veille sanitaire alerte depuis quelques
jours sur une recrudescence de cas. Plusieurs départements et
collectivités d'outre-mer des Antilles sont concernés par l'épidémie
(Saint-Martin, Saint-Barthélemy, la Martinique et la Guadeloupe).
En effet, Saint-Martin est l'île la plus touchée, enregistrant 1 025 cas
cliniquement évocateurs, 601 cas probables ou confirmés et un décès
enregistré. L’île a été depuis placée en état d’épidémie généralisée car
la circulation du virus reste généralisée avec une stabilisation du
nombre de cas cliniquement évocateurs. C'est finalement par l'île
française de Saint-Martin, 37 000 habitants, que le virus a fait son
entrée sur le continent américain, le 6 décembre dernier. Pour
schématiser, un voyageur est arrivé malade sur l'île, où il a été piqué
par un moustique local sain, qui à son tour s'est trouvé porteur du
chikungunya, qu'il a transmis à d'autres humains en les piquant, et
ainsi de suite. Et une fois que le virus est installé, il est impossible
de revenir en arrière. L'installation du virus chikungunya sur le
territoire américain via les Antilles cet hiver n'a pas surpris les
experts. Ce n'était qu'une question de temps. Toutes les conditions sont
réunies depuis plusieurs années pour que ce virus africain, qui a déjà
conquis l'Asie et le Pacifique, prenne ses aises outre-Atlantique. La
présence des deux principaux vecteurs (les moustiques Aedes aegypti et
Aedes albopictus), une température et une humidité adaptées à leur
prolifération, une forte densité humaine en milieu urbain et de nombreux
cas «importés» de voyageurs arrivés malades sur le territoire.
A Saint-Barthélemy, la progression de l'épidémie reste modérée et ce
territoire reste classé un cran en dessous de Saint-Martin en situation
épidémique, avec 215 cas cliniques et 83 cas probables ou confirmés et 3
décès. En Martinique, en revanche, la circulation du virus s'intensifie
avec près de 1 480 cas cliniquement évocateurs ont été recensés, et 518
cas probables ou confirmés et 9 décès. Le nombre de consultations en
médecine de ville continue sa progression, preuve de l'extension de
l'épidémie.
En Guadeloupe, on assiste à une augmentation de la circulation virale où
18 communes sont maintenant concernées. Le département est toujours en
phase de transmission autochtone modérée. Dans l'île, 790 cas
cliniquement évocateurs ont été recensés et 175 autres cas probables ou
confirmés et un décès.
De là, le virus, qui est rarement mortel, s'est déployé sur l'ensemble
des Caraïbes (Antilles françaises, Haïti, République dominicaine…), pour
atteindre le continent sud-américain par la Guyane. Selon le dernier
bulletin de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), près de 62 000
cas ont été recensés sur la zone, causant 13 morts, essentiellement des
personnes affaiblies par une autre maladie. Tous les décès sont à
déplorer sur le territoire français, où 48 636 malades ont été recensés.
Aux Antilles françaises, les voyants sont passés au rouge. Si la
situation se stabilise à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, l'épidémie
s'accélère en revanche en Martinique et surtout en Guadeloupe, où la
progression est fulgurante. Le nombre de nouveaux cas hebdomadaire
atteint désormais les 4 500. En Guyane, le nombre de cas autochtones
reste comparativement faible (environ 120), mais la situation se dégrade
fortement depuis 15 jours. Sur place, on se prépare au passage au stade
épidémique en pleine saison des pluies. La prévention consiste en
priorité à éloigner les moustiques, en détruisant leurs gîtes, à savoir
les réserves d'eau proches des habitations comme les plantes en eau,
pneus usagés, épaves de voiture, gouttières bouchées… Quand une zone
sensible est repérée, on distribue aux alentours des moustiquaires
traitées, des répulsifs et on recommande le port de vêtements longs.
L’autre préoccupation concernant l'épidémie caribéenne ; c’est qu’elle
va alimenter la dispersion du virus à travers le monde via les
voyageurs. On s'attend à un accroissement des cas importés cet été dans
le sud de la France, et à l'arrivée du virus au Brésil, surtout à Rio,
où les rassemblements liés à la Coupe du monde alliés au climat
pourraient accélérer le processus.
A l’origine de l’épidémie
La première épidémie due au virus chikungunya a été décrite en Tanzanie
en 1952. L’infection par le virus chikungunya a depuis continué à
évoluer sur un mode endémo-épidémique sur les continents africain et
asiatique, en particulier en Inde depuis 2006 (environ 2 millions de cas
avérés et suspects) et dans l’océan Indien. En 2007, Le chikungunya a
également fait sont apparition en Europe, touchant plusieurs centaines
de personnes durant le mois de septembre en Italie. En 2010, les deux
premiers cas autochtones de chikungunya ont été recensés en France.
En Europe aujourd’hui, l’hypothèse d’une dissémination du virus du
chikungunya n’est pas à exclure dans les régions tempérées d’Europe où
le moustique vecteur Aedes Albopictus s’est répandu. En septembre 2007,
une flambée épidémique est survenue en Italie, dans la région de
Ravenne, touchant environ trois cents personnes. Elle aurait été
introduite par un voyageur en provenance d’Inde. Les deux premiers cas
autochtones de chikungunya en France ont été détectés en 2010. Le risque
que la dengue et le chikungunya se propagent en Europe du Sud est donc
devenu une question d’actualité compte tenu des flux de circulation
entre le continent et les Antilles. En conséquence, l’infection à
chikungunya a été ajoutée à la liste des maladies à déclaration
obligatoire et depuis janvier 2006, un dispositif de surveillance
renforcée a été mis en place.
En Afrique et Asie, l’aire de distribution du virus du chikungunya
s’étend à toute l’Afrique sub-saharienne et à l’Asie du Sud-Est. En
Afrique, le virus est maintenu au sein d’un cycle forestier faisant
intervenir des primates et des moustiques sylvatiques (Aedes
luteocephalus, Aedes furcifer ou Aedes taylori). En Asie, où son
introduction serait plus récente, le virus circule dans un cycle
essentiellement urbain qui implique les moustiques Aedes aegypti et
Aedes albopictus.
Depuis sa description initiale en Tanzanie, le virus chikungunya a été
régulièrement à l’origine de petites poussées épidémiques cycliques en
milieu rural, principalement en Afrique australe et de l’Est, de
l’Ouganda à l’Afrique du Sud et en Afrique Centrale. Sur ce continent,
la dernière épidémie importante est survenue en 2007 au Gabon, où 5 000
cas sont suspectés. Le virus chikungunya est plus rarement trouvé en
Afrique de l’Ouest, en particulier au Sénégal. Il est considéré comme
endémique en milieu rural en Afrique, où il est probablement responsable
de nombreux cas non diagnostiqués.
Parallèlement, des poussées épidémiques ont été observées en Inde, au
Sri Lanka, en Asie Sud-Est (Thaïlande, Myanmar, Viêtnam, Laos, Cambodge,
Indonésie, plus récemment Malaisie) et aux Philippines. Quelques cas
sporadiques ont été signalés à Singapour en 2009. Une importante vague
épidémique frappe l’Inde depuis janvier 2006 avec quelque deux millions
de cas suspects enregistrés à ce jour. La fréquence plus importante des
épidémies en Asie peut être reliée au caractère anthropophile des
moustiques vecteurs en cause.
En ce qui concerne l’océan Indien, aucune activité du virus chikungunya
n’avait été détectée avant le début de l’année 2005. Le virus,
vraisemblablement originaire d’Afrique de l’Est, a provoqué une première
épidémie aux Comores. La transmission du virus a probablement été
assurée par le moustique Aedes aegypti qui est prédominant dans cet
archipel.
En mars 2005, l’épidémie s’est propagée rapidement dans l’île de La
Réunion à partir du Nord-Ouest, avec une flambée importante entre fin
avril et début juin puis une persistance de la transmission virale
durant l’hiver austral. Sur cette île, la transmission du virus est
assurée principalement par le moustique Aedes albopictus qui s’y est
répandu grâce à sa grande plasticité écologique puisqu’il colonise
indifféremment les zones urbaines et sylvatiques (forestières), les
gîtes artificiels et naturels. Au total, environ 270 000 personnes
auraient été infectées, pour une population totale de 750 000 habitants.
En parallèle, dès fin mars 2005, les îles Seychelles, Maurice et Mayotte
ont été également touchées par l’épidémie de virus chikungunya, avec une
augmentation des cas dès janvier 2006. Madagascar a également connu une
circulation active du virus. Deux cas d’importation en provenance de
Madagascar ont été identifiés en Guyane française en mars 2006,
soulignant le risque d’émergence du virus dans les territoires français
des Amériques. Au printemps 2010, le chikungunya a à nouveau fait parler
de lui sur l’île de La Réunion, avec une vingtaine de cas confirmés.
Le chikungunya a également été identifié chez des touristes revenant des
Caraïbes dans l’île d’Aruba, de Floride aux Etats-Unis et au Panama.
Qu’est-ce que le chikungunya ?
Le chikungunya est une maladie infectieuse vectorielle due à un
arbovirus (type de virus ayant pour vecteur les arthropodes hématophages
(suceurs de sang) comme les moustiques, les tiques et les phlébotomes) :
le virus du chikungunya (virus à ARN lui conférant une plasticité
génétique qui permet de multiples adaptations). Ce virus de la famille
des Togaviridae (genre alphavirus) a été isolé pour la première fois en
Ouganda en 1953, lors d’une épidémie survenue en Afrique de l’Est.
L’appellation «chikungunya» vient du makondé (langue bantoue d’Afrique
australe) et signifie «l’homme qui marche courbé».
Comment se fait la transmission ?
La transmission s'effectue de personne à personne par l’intermédiaire de
moustiques infectés du genre Aedes.
Lors d’une piqûre, le moustique sain s'infecte en prélevant le virus
dans le sang d'une personne infectée. Le virus se multiplie ensuite dans
le moustique pendant une dizaine de jours, appelée phase extrinsèque. A
l’issue de cette phase extrinsèque ce moustique pourra, à l’occasion
d’une autre piqûre, transmettre le virus à une nouvelle personne. Une
personne infectée est contaminante pour les moustiques au moment où le
virus est présent dans son sang, c'est-à-dire pendant la phase virémique
de l'infection. Celle-ci commence 1 à 2 jours environ avant le début des
signes cliniques et dure jusqu’à 7 jours après. Pendant cette période il
faut éviter qu’une personne malade ne se fasse piquer, et transmette
ainsi le virus à d’autres moustiques. Ceci dans le but d’empêcher qu'un
cycle de transmission virale se développe dans l’entourage des malades.
Quelles sont les formes cliniques ?
L’infection est asymptomatique (infection sans aucun symptôme) dans 5 à
25% des cas. Chez les personnes qui développent des symptômes, après une
période d’incubation de 4 à 7 jours en moyenne, une fièvre élevée
apparaît brutalement accompagnée d’arthralgies (douleurs articulaires)
pouvant être intenses, touchant principalement les petites articulations
des extrémités (poignets, chevilles, phalanges). Surviennent également
des myalgies (douleurs musculaires), des céphalées (maux de tête) et une
éruption maculo-papuleuse (éruption en taches cutanées faites de
lésions).
L’évolution est le plus souvent favorable, sans séquelle, mais
l'infection peut aussi évoluer vers une phase chronique marquée par des
arthralgies persistantes.
On peut observer une inflammation d’un ou plusieurs ganglion(s)
lymphatiques cervicaux ou encore une conjonctivite. Des saignements des
gencives ou du nez ont, en outre, été fréquemment décrits,
principalement en Asie.
Alors que les formes compliquées de chikungunya n’étaient
qu’exceptionnellement décrites, l’épidémie de 2005, survenue sur l’île
de La Réunion, a permis de montrer l’existence de formes neurologiques
graves, présentant des méningo-encéphalites et des atteintes des nerfs
périphériques. Ces dernières sont principalement rencontrées chez des
personnes âgées, ou au système immunitaire affaibli, et chez des
nouveau-nés, infectés in utero par leurs mères malades.
Comment confirmer le diagnostic et l’infection à chikungunya en cas
de suspicion clinique ?
En cas de suspicion clinique, le diagnostic peut être confirmé par des
analyses biologiques qui peuvent être directes (détection du virus ou de
son génome) ou indirectes (détection d’anticorps).
Cette confirmation prend une importance particulière dans les contrées
où la maladie peut être transmise en raison de l’implantation du
moustique vecteur, Aedes albopictus, aussi appelé «moustique tigre».
Il est primordial d’identifier avec précision la date de début des
signes (DDS) afin de guider les examens. Un diagnostic précoce (dans la
semaine qui suit la DDS) peut être obtenu par amplification génique (RT-PCR).
Les anticorps de type IgM peuvent être identifiées à partir du cinquième
jour après l’apparition des signes cliniques et persistent en moyenne 2
à 3 mois. Les anticorps de type IgG apparaissent quelques jours après
les IgM et persistent toute la vie.
Des IgM isolées doivent impérativement conduire à un second prélèvement
pour confirmation. En effet, leur spécificité est faible (il existe de
nombreux faux positifs).
En conséquence, en présence d’IgM isolées sur un premier prélèvement
sanguin, on analysera un deuxième échantillon prélevé, au minimum, 10
jours après le premier. Le diagnostic sera confirmé en cas d’apparition
d’IgG dans le second échantillon, ou devant un titre croissant d’IgM (en
principe, environ 4 fois plus élevé que sur le premier prélèvement
sanguin).
La démarche diagnostic recommandée dans le plan « anti-dissémination du
chikungunya et de la dengue » est la suivante :
jusqu’à 5 jours (J5) après le début des signes : RT-PCR
Entre J5 et J7 : RT-PCR et sérologie
Après J7 : sérologie uniquement (IgG et IgM) avec un second prélèvement
de confirmation au plus tôt 10 jours après le premier prélèvement. Les
prélèvements sanguins peuvent être faits par tout laboratoire d’analyses
et de biologie médicale. Ceux-ci adresseront les échantillons pour
analyse sérologique aux laboratoires qui réalisent cet examen. Dans le
cadre de la surveillance renforcée du
chikungunya et de la dengue, c’est-à-dire du 1er mai au 30 novembre dans
les régions où le moustique Aedes albopictus est implanté, les
prélèvements pour RT- PCR doivent être adressés au Centre national de
Référence (CNR) des arbovirus ou, le cas échéant, au laboratoire de
virologie du CHU où le patient est hospitalisé.
Chaque échantillon doit être accompagné d’une fiche de renseignements
cliniques.
Quelle est la prise en charge du chikungunya ?
Il n’existe pas de traitement antiviral spécifique du chikungunya. La
prise en charge est donc avant tout symptomatique afin de soulager la
douleur et la fièvre (antalgiques, antipyrétiques) : paracétamol et
anti-inflammatoires non stéroïdiens. L’immunité est acquise. Il n’y a
pas de vaccin actuellement disponible mais un vaccin expérimental assez
efficace est en cours d’exploration chez le singe macaque et chez la
souris.
Il est nécessaire d'expliquer au patient et à son entourage les mesures
de protection des moustiques afin d'éviter une transmission au domicile.
Pendant la phase virémique (présence du virus dans le sang) de la
maladie, le patient devra ainsi se protéger des piqûres de moustiques,
afin d’éviter que ceux-ci s’infectent, et puissent ainsi à leur tour
transmettre la maladie dans son entourage, quelques jours plus tard
(après la phase de multiplication du virus dans le moustique, dite phase
extrinsèque).
Comment prévenir la maladie au niveau individuel ?
Il n’existe actuellement pas de vaccin, ni de traitement préventif
contre l’infection du chikungunya. La prévention individuelle repose
donc essentiellement sur les moyens de protection contre les piqûres de
moustiques (répulsifs en sprays ou crèmes, serpentins, diffuseurs
électriques, vêtements longs, moustiquaires).
Le moustique vecteur pique la journée, essentiellement à l’extérieur des
maisons, avec une activité plus importante en début de matinée et en fin
de journée. Les produits répulsifs (hors araignées, scorpions,
scolopendres et hyménoptères) recommandés en particulier aux voyageurs
sont composés de diverses molécules telles le N,N-diéthyl-m-toluamide (DEET),
le N-acétyl-N-butyl-bêta-alaninate d’éthyle (IR 3535), le carboxylate de
Sec-butyl 2-(2-hydroxyéthyl pipéridine-1/Icaridine (KBR 3023) et le
mélange de cis- et trans-p-méthane-3,8 diol (PMDRBO).
Quelles sont les mesures de lutte contre les moustiques utilisables
pour prévenir la diffusion du chikungunya ?
La lutte contre les vecteurs d’agents pathogènes, comme par exemple les
moustiques, est qualifiée de lutte antivectorielle. Dans son acception
la plus large, cette lutte antivectorielle comprend la lutte et la
protection contre ces insectes. La lutte antivectorielle s’appuie sur
des méthodes qui diffèrent selon les vecteurs et selon les contextes
épidémiologiques et socio-économiques. Elle inclut la lutte chimique, la
lutte biologique, la lutte génétique, l’action sur l’environnement,
l’éducation sanitaire, la mobilisation sociale et l’évaluation
permanente de toutes ces méthodes.
Son objectif est de contribuer, au côté d’autres actions de santé
publique, à diminuer les risques d’endémisation (installation durable
d’une maladie dans une région) ou d’épidémisation, à diminuer la
transmission d’agents pathogènes par des vecteurs, à gérer les épidémies
de maladies à vecteur, le tout dans un cadre stratégique formalisé.
En fonction de l’échelle à laquelle cette lutte contre les moustiques
est réalisée, on distingue la lutte réalisée à l’échelle de territoires
(wilayas, communes) de celle réalisée au niveau individuel, qui vise
plus particulièrement les lieux de développement des moustiques qui se
situent à proximité directe des habitations : marécages (ou «merdjas»),
eaux stagnantes au niveau des pneus stockés, des pots de fleurs et des
bacs vides et abondonnés…
La lutte antivectorielle, à l’échelle de territoires, est réalisée par
des services publics de démoustication.
Elle a deux composantes. L’une larvicide, dont l’action est dirigée
spécifiquement contre les larves de moustiques et, l’autre adulticide,
dont l’action est dirigée spécifiquement contre les moustiques adultes.
La lutte communautaire est de la responsabilité de tous.
Au niveau individuel, elle peut être réalisée de deux manières. L’une,
par la destruction des gîtes larvaires potentiels autour des habitations
(eau stagnante dans les soucoupes, gouttières, vases, seaux,
détritus...) pour priver les moustiques des sites où leurs larves
peuvent se développer. L’autre par la protection individuelle contre les
piqûres de moustique comme cité plus haut.
En conclusion, le chikungunya est un virus transmis d’homme à homme par
le moustique «tigre» (uniquement les femelles car le mâle ne pique pas)
s’exprimant par la «maladie de l’homme courbé» en raison des symptômes
liés aux douleurs musculaires et articulaires. Après un délai
d’incubation de 2 à 10 jours, la personne infectée est atteinte de
polyarthrite aiguë, touchant les poignets, les chevilles et les genoux
principalement.
Maux de tête, douleurs musculaires et éruption cutanée sur le tronc et
les membres sont aussi des symptômes courants. Si la maladie se soigne
relativement bien, elle peut être fatale aux personnes les plus fébriles
notamment les jeunes enfants et les personnes âgées. Pour s’en prémunir,
des gestes simples et efficaces sont nécessaires en particulier le port
de vêtements longs, l’utilisation de répulsifs cutanés, d’insecticides
sur les vêtements, de moustiquaire, d’épandages d’insecticides et
l’élimination des gîtes larvaires potentiels.
K. S.
* Par Kamel Sanhadji, professeur des universités, directeur de
recherches, CHU de Lyon, France.
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