Culture : Le coup de bill’art du Soir
De Si Kaddour à Nouria Benghabrit
Par Kader Bakou
La ministre de l’Education nationale, Nouria Benghabrit-Remaoun, est la
petite-fille du frère de Si Kaddour Benghabrit. Né à Sidi-Bel-Abbès en
1868 et décédé en 1954 à Paris, Si Kaddour Benghabrit, un exemple
d’humanisme et de philanthropie, est le fondateur de l’Institut musulman
de la Grande Mosquée de Paris. Durant la Seconde Guerre mondiale, il
avait sauvé la vie d'un grand nombre de juifs, parmi eux le chanteur
Salim Hilali, en leur faisant octroyer par le personnel administratif de
la mosquée des certificats d'identité musulmane, qui leur permirent
d’échapper à l'arrestation et à la déportation. Les chiffres concernant
le nombre de juifs sauvés par la Mosquée de Paris divergent. Annie-Paule
Derczansky, présidente de l'Association des bâtisseuses de paix, précise
que «selon Albert Assouline, qui témoigne dans le film de Berkani», 1
600 personnes auraient été sauvées, alors que pour «Alain Boyer, ancien
responsable des cultes au ministère de l'Intérieur français, on serait
plus proche des 500 personnes».
En 1991, Derri Berkani a réalisé pour l’émission «Racines» de France 3
un documentaire sur cet épisode, intitulé La Mosquée de Paris, une
résistance oubliée. Si Kaddour Benghabrit est le héros du court métrage
Ensemble de Mohamed Fekrane sorti en 2010 et dans lequel le rôle de
l'imam est interprété par l'acteur Habib Kadi. En 2011 est sorti (en
France) le long métrage Les Hommes libres d'Ismaël Ferroukhi. Dans ce
film, Si Kaddour Benghabrit est incarné par Michael Lonsdale.
Voila, certainement, l’explication des attaques contre la nouvelle
ministre de l’Education nationale. Le frère de son grand-père a sauvé
des juifs, donc elle est juive et, pour ces gens-là, sauver des civils
juifs dans une guerre, ce n’est pas une bonne action.
Nouria Benghabrit-Remaoun est une sociologue, chercheuse et spécialiste
des sujets relatifs à l'éducation, la jeunesse, la femme dans la société
et la famille. En 1977, elle a obtenu un diplôme d’études approfondies
en sociologie de l’éducation à l’Université d’Oran, puis un doctorat en
1982 dans la même spécialité délivrée par l’Université Paris V. De 2003
à 2006, elle fut la présidente du comité arabe de l'Unesco pour
l'enseignement supérieur. De 1992 à sa nomination à la tête du ministère
de l’Education, elle a été directrice du Centre national de recherche en
anthropologie sociale et culturelle (Crasc) d’Oran. Mais tout cela c’est
«des détails» pour ceux qui préfèrent emprunter les raccourcis des
préjugés.
K. B.
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