Culture : Le coup de bill’art du Soir
Secret de Polichinelle, le vrai du faux !
Par Kader Bakou
On sait qu’un secret de Polichinelle est un «secret» que tout le mode
connaît. Mais qui est ce mystérieux Polichinelle, un monsieur qui, en
principe, n’a pas de secrets ?
A vrai dire, un vrai secret de Polichinelle est un secret
qu’effectivement tous connaissent. Mais cette connaissance ou
information n’est pas ouvertement partagée. Les détenteurs du secret de
Polichinelle n’en parlent pas ouvertement parce qu’ils croient qu’il
vaut mieux, pour eux ou pour d’autres personnes, ne parler qu’avec des
gens de confiance, ou carrément se taire. Par conséquent, ils ignorent
si les autres sont au courant de cette information. On est alors dans la
situation où chacun sait, mais ne sait pas que les autres savent. Ainsi,
«les apparences sont sauves» parce que «personne n’a perdu la face».
Polichinelle (Pulcinella en langue italienne) est un personnage de la
commedia dell'arte, un genre de théâtre populaire italien. Polichinelle,
dit-on, n’est pas particulièrement beau. Mais il est très rusé (un peu
comme Ésope). Dans une de ses aventures, alors qu’il est le page du roi,
il veut se venger d’un seigneur très infatué de sa personne.
Polichinelle parle alors au roi d’un «défaut» de ce seigneur. Il révèle
au roi, sous le sceau du secret, que ce seigneur aurait le corps couvert
de plumes. Polichinelle fait la même chose avec tous les courtisans,
tout en recommandant le secret à chaque fois. Bientôt, tout le monde est
au courant. Depuis ce temps, on appelle secrets de Polichinelle, tous
les secrets mal gardés.
Le conte danois Les Habits neufs de l'empereur d’Hans Christian
Andersen, publié en 1837, illustre un autre aspect du «secret de
Polichinelle». Un jour, deux escrocs arrivèrent dans la grande ville
d’un pays. Ils prétendirent savoir tisser une étoffe que les personnes
sottes et incapables dans leurs fonctions ne peuvent pas voir. Ils
proposèrent au souverain de lui confectionner un costume. L’empereur
pensa que ce serait un habit exceptionnel avec lequel il pourrait
repérer les personnes intelligentes (ou sottes) de son royaume.
Quelques jours plus tard, l’empereur vint voir où en était le tissage de
ce fameux tissu. Il ne vit rien car il n’y avait rien. Troublé, il
décida de n’en parler à personne, car personne ne voulait d’un empereur
sot. Il envoya plusieurs ministres vérifier l’avancement des travaux.
Ils ne virent rien, mais n’osèrent pas, eux aussi, l’avouer, de peur de
paraître des imbéciles ou des incompétents. Bientôt, tout le royaume
parlait de cette «étoffe extraordinaire». Le jour où les deux escrocs
décidèrent que l’habit était achevé, ils aidèrent l’empereur à
l’enfiler. Ainsi «vêtu» et accompagné de ses ministres, le souverain se
présenta à son peuple qui, lui aussi, prétendit voir et admirer ses
«beaux vêtements».
La vérité sort de la bouche des enfants. Seul un petit garçon osa dire
la vérité en s’écriant : «le roi est nu !» Et tout le monde lui donna
raison !
Un secret de Polichinelle, parfois, ne tient qu’à un fil !
K. B.
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