Nous apprenons de source sûre que la 3e édition du
Festival d’Alger du film maghrébin n’aura pas lieu cette année. Prévu
pour le début du mois de juin, cet événement qui a enregistré un franc
succès dès ses débuts semble être entré en disgrâce.
Malgré la pertinence de sa sélection et la fenêtre qu’il ouvre au public
algérois sur la création cinématographique maghrébine, le Festival
d’Alger du film maghrébin n’aura pas lieu cette année. Initialement
programmée du 6 au 13 juin, cette manifestation institutionnalisée en
2013 se heurte aujourd’hui à une certaine hostilité du ministère de la
Culture. En effet, le commissaire du Festival et ancien directeur du
Centre national du cinéma algérien (CNCA), Karim Aït Oumeziane, nous
apprend que la responsable des activités culturelles au niveau de la
tutelle, Halima Hankour, lui avait transmis la volonté de Mme Nadia
Labidi de transférer l’événement à Constantine du 8 au 13 mai dans le
cadre de «Constantine, capitale de la culture arabe».
Or, deux facteurs s’opposent, selon lui, à ce changement de lieu et de
date : d’abord, «la ville de Constantine n’est pas assez équipée en
salles pour accueillir un festival international avec ses trois
compétitions (longs, courts-métrages et documentaires)» ; de plus, les
dates choisies par le ministère coïncident avec celles du Festival de
Cannes, «ce qui diminue considérablement les chances du Festival
maghrébin d’attirer les réalisateurs».
M. Aït Oumeziane a donc proposé à la tutelle d’organiser l’événement
comme convenu à Alger et de créer, par la suite, un Panorama du cinéma
maghrébin à Constantine. Depuis janvier, les courriers du commissaire
sont restés sans réponse, si ce n’est une injonction verbale de Mme
Hankour qui lui aurait demandé d’arrêter les préparations car la
ministre n’avait pas encore donné son feu vert. Mais, toujours selon le
commissaire, le festival n’aura pas lieu en juin en raison des nouvelles
dates fixées pour le Festival d’Oran du film arabe, tenu habituellement
en décembre et fixé cette année pour le début du mois de juin. M. Aït
Oumeziane déclare qu’il n’a d’autre choix que d’attendre la décision du
ministère de la Culture et se dit prêt à organiser l’événement, en cas
d’accord de la tutelle, en novembre 2015.
Pour rappel, le Festival d’Alger du film maghrébin, créé en 2013, s’est
distingué dans le paysage cinématographique algérois par la qualité de
sa programmation et les belles découvertes qu’il a occasionnées
notamment en ce qui concerne le cinéma marocain. Ce dernier a d’ailleurs
raflé les trois grands prix lors de la première édition en novembre 2013
qui a consacré le long-métrage Les chevaux de Dieu de Nabil Ayouch, le
court-métrage Antropia de Yacine Marco et le documentaire La danse des
hors-la-loi de Mohammed El Aboudi tandis que le prix du meilleur
scénario est revenu au film Zéro de Noureddine Lakhmari et que celui de
la meilleure interprétation féminine a été décerné à l’actrice marocaine
Jalila Tlemci pour son rôle dans Andromane.
D’aucuns ont d’ailleurs salué l’impartialité du jury qui n’a pas hésité
à sacrer le cinéma marocain malgré ce qu’on aurait pu supposer en
considérations politiques souvent présentes dans l’octroi des prix dans
les festivals algériens. La deuxième édition a également surpris de
nombreux cinéphiles puisqu’elle a couronné le long-métrage audacieux et
tout aussi politiquement incorrect Les terrasses de Merzak Allouache, un
réalisateur longtemps snobé par les palmarès algériens.
Sarah H.