Sans surprise, le «rectificatif» opéré dans la
composante du gouvernement ne laisse pas indifférente la classe
politique. Les partis proches du pouvoir, visiblement gênés par la
question, se montrent peu bavards et hésitent à livrer leur lecture.
L’opposition, quant à elle, n’hésite pas à évoquer un cafouillage en
haut lieu. Le porte-parole du FLN a longtemps hésité avant de se
contenter de dire qu’il ne s’agit ni plus ni moins que d’un
«rectificatif». Même réserve chez Abdelaziz Belaïd qui refusera d’aller
au-delà d’un «no comment». Plus prolixe, le porte-parole du RCD dénonce
le manque de crédit de l’Etat et pointe du doigt une politique de
bricolage et d’improvisation. Au MSP, on voit dans ce remaniement le
signe d’une «débâcle» alors qu’Ennahda dénonce «une première» dans les
annales.
Atmane Mazouz du RCD :
«cela mérite de figurer au Guinness du ridicule»
«Remanier en moins de cinq jours un gouvernement remanié en touchant
même aux postes de souveraineté mérite de figurer dans un Guinness du
ridicule. Ceci ne peut arriver qu’en Algérie, un pays de non-gouvernance
devenu la risée des nations. L’improvisation et le bricolage dans
lesquels sombre la gestion des affaires publiques du pays achèvent
désormais le peu de crédit dont jouit tout un Etat. L’Algérie paye au
prix fort l’illégitimité de toutes ses institutions. Cette manière de
faire prouve toute la faillite du pouvoir et atteste désormais de
l’impotence et de l’incapacité du chef de l’Etat à assurer le minimum
dans la gestion des affaires de la nation. On croyait qu’après l’épisode
de la rectification honteuse en moins de 24 heures du discours attribué
au chef de l’Etat que les leçons étaient tirées, mais la déchéance est
désormais irréversible d’où cette nouvelle affaire qui ternit l’image du
pays par la révision de la composante du gouvernement en moins de 5
jours. La question de qui gouverne en Algérie est maintenant
sérieusement posée avec un désordre institutionnel qui frise le
burlesque avec notamment la confusion qui demeure entière malgré ces
réaménagements pour se retrouver avec deux ministres des Affaires
étrangères et deux ministres de l’Energie. Le RCD a déjà annoncé que ce
remaniement a fait l’objet de luttes intestines au plus haut sommet de
l’Etat et que sa composante continuera à faire l’objet de divisions et
de blocages qui accentueront les tensions et les oppositions à
l’intérieur même du système. Aujourd’hui, les Algériens ont une autre
preuve de la déchéance et de l’impasse qui minent la nation.»
Saïd Bouhadja du FLN :
«un rectificatif»
«Il s’agit d’un rectificatif». S’est contenté de dire le porte-parole du
FLN, refusant de livrer tout commentaire.
Fateh Rebbai d’Ennahda :
«une première»
«Il s’agit là d’une première qu’il y ait un remaniement après un
remaniement. Cela augure d’une totale instabilité. Déjà que le
gouvernement de Sellal n’avait pas bouclé sa première année. Ce
remaniement ne représente nullement une réponse aux aspirations de la
classe politique qui est en attente de réformes tant au plan politique
qu’économique pour la refonte de l’Etat. Cela aurait demandé un débat
avec l’opposition mais au moment où la classe politique espérait une
initiative du président de la République, ce remaniement intervient puis
il est suivi d’un autre grâce auquel, le ministère des Affaires
étrangères aura désormais deux têtes, si on ôte au ministre des Affaires
étrangères les Affaires africaines et arabes, que lui reste-t-il ? Cela
nécessite un rectificatif rapide car il va certainement être à l’origine
de conflits.»
Zinedine Tebbal du MSP :
«l’expression de la débâcle du pouvoir»
«Le remaniement en lui-même ne reflétait pas de projet de changement
politique ni économique. Le second remaniement, ce n’est qu’une suite
logique. Cela montre la débâcle du pouvoir actuel : on crée des
situations qu’on est appelé à rectifier. Au final, il ne s’agit que d’un
aménagement interne sans incidence sur le pays. Nous avons déjà connu
des situations de blocage mais, actuellement, même les aspects liés à la
forme posent problème.»
Abdelaziz Belaïd du Front El-Moustakbel :
«ça n’arrive que chez nous»
«Ça n’arrive que chez nous. No comment !»
Aouchiche du FFS :
«l'épilogue d'un affrontement clanique»
«Le pays avait besoin d'un véritable changement dans tous les domaines
et le dernier remaniement n'est qu'un coup d'épée dans l'eau, un
remaniement pour rien, inutile et absurde. La cacophonie qui a entouré
la nomination des ministres est l'épilogue d'un affrontement clanique
qui aura certainement d'autres rebondissements. Certains présentent ce
gouvernement comme technocrate, pour nous, il s'agit d'une imposture.»
Nawal Imès