Contribution : Ne serions-nous plus que des lâches ?
Nour-Eddine Boukrouh
noureddinboukrouh@yahoo/fr
Si Gaïd Salah n’avait été qu’un maréchal- ferrant veillant au bon
état des sabots des mulets de son douar, personne ne se serait intéressé
au message d’allégeance qu’il vient d’envoyer à Amar Saâdani qui est le
dernier bounadem en Algérie à mériter d’être placé à la tête d’un FLN
même avili et traîné dans la boue par des décennies de servilité car ce
sigle reste quand même celui sous lequel sont tombés un million et demi
de chouhada. Mais il se trouve que Gaïd Salah est général de corps
d’armée, chef d’état-major de l’ANP et vice-ministre de la Défense
nationale et qu’à ce triple titre, il n’avait pas le droit d’adresser ce
message au chef imposé du FLN ou de tout autre parti. Le droit n’étant
pas de son côté, il ne reste que le mépris du droit pour expliquer cet
acte sans pareil depuis 1989, année où l’armée s’est retirée
officiellement de la vie partisane. Auprès de qui peut-on se plaindre de
cet attentat contre la morale publique, le droit, la démocratie et
l’intérêt du pays ? Auprès de Dieu ? Il faudra attendre la fin du monde
pour connaître sa décision. Auprès de l’armée ? C’est lui l’armée et
elle est très disciplinée, assure-t-il. Auprès du «premier magistrat du
pays» ? Il est, depuis le viol de la Constitution en 2008, le maître
d’œuvre de tous les complots contre la morale publique, le droit, la
démocratie et l’intérêt du pays, sans dire que le général en question
est son adjoint préposé à la répression. S’il n’y a rien à attendre de
Dieu dans l’immédiat, si l’armée reste muette devant les atteintes à la
morale publique, au droit, à la démocratie et à l’intérêt du pays, si le
«premier magistrat » n’est pas un recours mais la source de tous les
problèmes, il reste l’ultime solution qui est nous-mêmes, le peuple qui,
selon les termes mêmes de la Constitution en vigueur, est le détenteur
de la souveraineté nationale et du droit constituant. On lit en effet à
l’article 6 : «Le peuple est la source de tout pouvoir. La souveraineté
nationale appartient exclusivement au peuple» et à l’article 7 : «Le
pouvoir constituant appartient au peuple. Le peuple exerce sa
souveraineté par l’intermédiaire des institutions qu’il se donne…» Le
peuple, c’est l’ensemble des Algériens des deux sexes, de tout âge, de
toute opinion et de toute appartenance professionnelle, y compris les
militaires et les membres des services de sécurité. Lorsque les hommes
investis des principales responsabilités constitutionnelles dans un pays
sont défaillants, ont été neutralisés ou corrompus, le peuple souverain
et constituant a le droit, a le devoir de les récuser et de les
remplacer. Mais si cet ultime recours s’avère inopérant, si nous ne
sommes plus que des lâches, alors il faut se préparer à faire comme
l’émir Boadil après la perte de son royaume en Espagne, Grenade, en 1492
: «Pleurer comme une femme ce qu’il n’a pas défendu comme un homme.» Et
les mots sont d’une femme, sa mère. Nous serons inconsolables mais les
torrents de larmes de lâches que nous pourrions verser ne rendront pas
aux générations qui nous suivront le coin de paradis terrestre que nous
avons transformé en fourbi en à peine un demi-siècle de «souveraineté»
sous la direction de dirigeants ignares ou sataniques. Exit la
vantardise et la cocarde : «Vivre un seul jour en coq plutôt que mille
ans en poule !» C’est le contraire que nous avons été, c’est l’inverse
que nous avons fait tout au long de notre histoire : mille ans sous
diverses colonisations et des décennies d’avilissement sous le règne de
«frères» plus nuisibles à l’intérêt national et à la morale humaine
qu’aucune occupation étrangère avant eux. Un historien, Salluste, qui
fut aussi gouverneur de la Numidie à l’époque où notre pays était occupé
par les Romains, a écrit il y a deux mille ans : «Les Numides ne peuvent
être enchaînés ni par la crainte ni par les bienfaits.» Cet hommage
rendu au sens de la dignité chez les Algériens se justifie-t-il de nos
jours alors que la lâcheté (la crainte) et l’encanaillement (les
bienfaits) nous submergent comme le déluge a englouti Sumer au temps de
Noé ? Ces pensées maussades et démoralisantes me sont revenues cette
semaine en lisant les «Mémoires» de Mohamed Saïd Mazouzi qui viennent de
sortir. Je ne connaissais du personnage que son nom et l’image qu’il a
laissée en quittant la scène politique au milieu des années 1980, celle
d’un responsable politique discret. J’ai découvert l’homme qui se tenait
derrière cette image d’Epinal et cette découverte m’a ému. Si de nos
jours on ne sait plus ce qu’est l’Algérien dont parlait Salluste, si on
ne sait plus en ces temps de pourrissement général à quoi il
ressemblerait s’il existait, je crois que la réponse est dans les pages,
les souvenirs et l’âme de ce patriote. Né en 1926, Mazouzi est dans les
années 1940 un militant du PPA que la police coloniale arrête en 1945
pour son implication dans une affaire d’attentat contre un caïd de la
région de Dellys. Il ne sera libéré qu’à l’indépendance. Si Mohamed n’a
pas été à la Révolution, la Révolution est venue à Mohamed là où il
était entre 1945 et 1962, c’est-à-dire en prison. Déplacé d’une prison à
l’autre du pays et même de France, il relate dans ses «Mémoires» sa vie
carcérale et témoigne depuis cet observatoire sinon du déroulement de la
Révolution, du moins de son esprit, de ce qu’elle représentait pour les
Algériens morts, torturés ou emprisonnés pour que l’Algérie vive un jour
libre et digne. Elle est encore libre, en apparence du moins et pour on
ne sait combien de temps encore, mais elle n’est d’ores et déjà plus
digne. Il entendait parler des grands noms du mouvement, il fait leur
connaissance en prison et relate les évènements auxquels il a été mêlé
avec eux ou les paroles entendues de l’un ou de l’autre, nous présentant
des personnages au nom connu mais qui n’ont pas eu les faveurs des
projecteurs et rapportant ce que les historiens ou les autres
mémorialistes n’ont pas rapporté. A certains moments de la lecture on
oublie l’auteur pour se laisser bercer par une sorte de voix «off» comme
dans les films où le réalisateur fait résonner la voix d’un patriarche
ou de l’Histoire en accompagnement de certaines séquences. On a ainsi
l’impression que ce n’est pas un homme qui parle mais une entité
surnaturelle, en l’occurrence l’âme algérienne. Le livre, surtout dans
sa première partie, déborde de candeur comme ce serment fait un jour par
lui et un autre compatriote : quand ils seront indépendants, les
Algériens ne construiront jamais de prison ! A elle seule cette pensée
résume l’innocence des Algériens en même temps que leur irréalisme.
Beaucoup en effet croyaient dur comme fer qu’à l’indépendance l’Algérie
serait un paradis sur terre et ses dirigeants des anges, et que par
conséquent il n’y aurait nul besoin de prisons. Malheureusement pour
elle, des diables et des «aghiouls» sortis de ses entrailles ou venus de
pays limitrophes en ont fait un camp de concentration puis une cour de
miracles puis carrément la propriété d’une mafia ignare et impudente.
Tous les Algériens connaissent la vieille incantation «Ah ! si les
martyrs revenaient !», une litanie souvent répétée pour exprimer son
dégoût devant le spectacle de ce que des dirigeants cyniques et immoraux
ont volontairement fait de ce pays. M. Mazouzi ressuscite les martyrs,
les fait penser et parler. Ces martyrs, d’une certaine façon, c’est lui
; il les incarne par sa double particularité : celle d’être mort avant
eux et celle d’être revenu à la vie à l’indépendance pour témoigner en
leur nom. Mohamed Saïd Mazouzi a réussi à témoigner de ce qu’il a vécu
en prison, de ce qu’il n’a pas vu parce qu’il était en prison et de ce
qu’il a vu une fois sorti de prison. Nous sommes justement au jour de sa
sortie de «Maison-Carrée» (El- Harrach). Des combattants du FLN sont
venus l’attendre pour le conduire à une maison de Clos-Salembier (El-Madania).
Il écrit : «Ce que j’ai vu, ce que j’ai vécu et ressenti ce jour-là à
Alger, je ne pourrai jamais le décrire. C’est tellement fort que tous
les mots de toutes les langues de la terre ne seront jamais en mesure de
le rendre… Quelque chose que l’on ne peut imaginer aujourd’hui dans
cette Algérie désarticulée, délabrée… La joie partagée, le bonheur
commun, la fraternité spontanée et naturelle de tout un peuple. La
lumière dans les yeux de tous les Algériens pour clore le cauchemar ;
malgré le terrorisme de l’OAS et la mort qui rôdait encore çà et là. Ce
bonheur-là, aucun Algérien d’aujourd’hui en cette Algérie de mensonge,
d’imposture et de rapine ne peut l’imaginer ou le comprendre… » (p.
231). Le livre ne m’a rien appris sur l’histoire de la Révolution ou du
mouvement national, l’auteur ayant d’entrée de jeu prévenu que tel
n’était pas son but. Des centaines de livres ont été déjà été publiés
sur le sujet que j’ai normalement tous lus, mais j’ai trouvé dans ces
pages ce que je n’ai pas trouvé ailleurs : l’angle de vue unique et les
accents simples, sincères et véridiques d’un patriote qui écrit : «Je ne
fais que témoigner timidement de ma vie et un petit peu de l’Algérie»
(p. 370). Ce qui m’a captivé, c’est l’homme lui-même, son ressenti des
choses, sa manière de voir, sa droiture, qualités qui ont toujours été
associées dans mon imaginaire à l’Algérien tel que je m’en suis toujours
fait une idée. Comme lui je croyais en ces choses, en ce qu’a dit de
nous Salluste, en la formule cocardière citée plus haut, mais j’ai perdu
ces illusions alors que l’Algérie indépendante n’avait pas encore bouclé
ses dix ans comme en témoignent mes écrits du début des années 1970.
Bien avant M. Mazouzi qui me dépasse d’une génération et vibrait de foi
en la politique algérienne jusqu’aux premières années du règne de
Chadli.
En rendant ici hommage à ce grand patriote, je veux rendre hommage à
l’Algérien d’hier qu’il incarne et à l’Algérien de demain qu’il aura
peut-être contribué à inspirer car je souhaite de tout cœur que les
nouvelles générations lisent ses «Mémoires» et prennent exemple sur lui,
sur les valeurs qu’il a incarnées, portées et défendues au détriment de
l’intérêt personnel, plutôt que sur la racaille qui nous a souvent
dirigés. Reste un regret. J’aurais aimé que ces «Mémoires» aillent
au-delà des années 1990 et que leur auteur nous parle de ce qu’il a vu,
pensé et ressenti sous le règne de Bouteflika. Il décoche quelques
piques à son régime mais on dirait qu’il ne veut même plus voir ou
commenter, qu’après avoir été le témoin qui a vu sans être là, il veut
devenir le «chahed ma chafch haga» du célèbre film égyptien. Ce n’est
pas pour cette Algérie qu’il s’est sacrifié, ce n’est pas pour elle que
sont tombés ses frères d’armes et ce n’est pas elle qu’il veut montrer
même comme contre-exemple. Que peut-on tirer de ces «Mémoires» ? Leur
lecture m’a remué mais elle a aussi stimulé ma réflexion sur nous-mêmes,
mon sujet de toujours. Elle me pousse à aller plus en avant dans
l’explication autour de laquelle je tourne depuis quarante ans sans
vouloir la saisir en entier, sans vouloir me concentrer sur son visage
qu’elle s’évertuait à dérober à ma vue pendant tout ce temps pour que je
ne la regarde pas et lise sur ses traits la vérité que je devinais, que
je soupçonnais. Il fallait juste que j’envisage une hypothèse que j’ai
toujours refoulée. Au lieu de me demander pourquoi le peuple algérien,
après une glorieuse lutte de libération, s’est laissé encanailler,
j’aurais dû me demander : pourquoi en fait il s’est insurgé contre le
colonialisme au prix de sacrifices illimités ? Autrement dit, notre
libération du colonialisme s’explique-t-elle par une règle ou par une
exception : celle d’être dirigés par des étrangers ou des aventuriers
issus de nos rangs ? Etait-elle une exigence de l’âme algérienne ou une
péripétie de l’Histoire internationale ? Cinquante-trois ans
d’indépendance, c’est moins de la moitié de la durée de la colonisation
française et sept fois la durée de la Révolution du 1er Novembre :
132+53 = 185 ans d’humiliation et d’encanaillement contre sept ans et
demi de bravoure. Où se trouve notre vérité : dans la règle représentée
par le chiffre 158 ou dans l’exception représentée par le chiffre 7?
Dans notre comportement durant des millénaires ou dans notre
comportement pendant les brèves périodes de soulèvement ? L’écart serait
là encore plus frappant. Si on creuse davantage on tombe sur d’autres
questions, des questions jamais posées parce qu’on croyait connaître la
réponse depuis belle lurette alors que l’expérience montre que ce n’est
pas le cas : les Algériens ont-ils fait la guerre contre le colonialisme
pour leur pays ou pour l’Islam, car ce n’est pas la même chose ? Ils ont
nommé leur guerre de libération «djihad», les combattants «moudjahidin »
et leur mort «fi sabil Allah» (pour Dieu), la patrie ne venant
qu’accessoirement. Ceux qui ont fait cette guerre l’ont-ils faite pour
l’Algérie ou pour Dieu, car il y a une nuance ? Etaient-ils la majorité
ou la minorité ceux qui sont morts pour le pays, la terre, le drapeau,
l’hymne, l’Etat national ? Les soulèvements menés au XIXe siècle par
l’émir Abdelkader, les cheikhs Al-Mokrani, Ahadad et Bouamama
n’avaient-ils pas les mêmes mots d’ordre ? Ceci expliquant cela, on
comprendrait mieux pourquoi trente ans après le cessez-le-feu avec les
Français une autre guerre s’ouvrait entre Algériens non pas pour une
Algérie meilleure mais au nom de l’Etat islamique. Il faut rouvrir
l’enquête classée, s’interroger de nouveau sur notre passé, retourner à
la scène de crime pour chercher d’autres indices et réinterpréter ceux
qu’on avait déjà. On nous a éduqués dans l’idée qu’il n’y a pas pire que
le colonialisme et qu’une fois indépendants, il fallait s’estimer
heureux même si on n’a que de l’herbe à manger. En fait, on nous
préparait au despotisme, on installait en nous le mythe des
héros-libérateurs pour nous soumettre aux desiderata et aux lubies des
planqués, des faux moudjahidine, des usurpateurs, des assassins, des
assoiffés de pouvoir et de richesses matérielles qui sont encore à
l’œuvre aujourd’hui pour achever de vider le pays de sa moelle. Le
colonialisme n’a pas encanaillé l’Algérien. Il l’a certes opprimé,
exploité, spolié, confiné dans un statut de paria, mais il ne lui a pas
appris le mal, le satanisme, le mythe de la chèvre qui vole. Il a
soutenu le maraboutisme mais il ne l’a pas inventé, il l’a trouvé sur
place. Tout ce qu’il a fait c’était d’approfondir la tendance,
d’enfoncer le clou, d’y maintenir les Algériens pour qu’ils demeurent
des «msalmin m’kettfin», des êtres résignés au «mektoub», au fatalisme.
Au temps du colonialisme, l’Algérie était dirigée par une puissance
coloniale. Aujourd’hui elle l’est par une puissance satanique œuvrant
par la corruption et le banditisme à vider le pays de ses valeurs
morales, de ses ressources humaines et de ses richesses naturelles. Le
satanisme a fait plus de mal au pays que le colonialisme car ce dernier
n’a pas détruit moralement l’Algérien et était voué à partir un jour ou
l’autre ; il a dépouillé le peuple algérien de ses richesses économiques
mais pas de ses richesses morales, celles qui ont trouvé Ben Badis,
Ferhat Abbas, Ali Al-Hammamy, Moufdi Zakaria, Bennabi et d’autres pour
les incarner, les inculquer et les défendre. Aujourd’hui, il n’y a
personne pour défendre le pays des pillards et des dispensateurs de
mauvais exemples et de précédents mortels. C’est l’encanaillement, la
soumission et la lâcheté dans tous les compartiments et à tous les
étages de la vie nationale. L’encanaillement, c’est lorsqu’on ne croit
pas en quelque chose mais qu’on fait semblant d’y croire par lâcheté ;
lorsqu’on sait une chose anormale et que l’on se comporte avec elle
comme si elle était tout à fait normale par calcul ; lorsque tout va de
travers et qu’on persiste à soutenir que tout baigne dans l’huile parce
qu’on y trouve son compte ; lorsqu’on cache la vérité parce qu’on a été
soudoyé ou intimidé ; lorsqu’on piétine les lois sans redouter une
sanction ; lorsqu’on falsifie les résultats des urnes pour favoriser ses
partisans ; lorsqu’on met des personnes à des places qu’elles ne
méritent pas ; lorsqu’on préfère les fripouilles aux hommes honnêtes ;
lorsqu’on achète pour quatre sous les consciences et les allégeances des
civils, des militaires et des assimilés. L’encanaillement a perdu les
nations qui se sont laissé envahir par lui. Un peuple ne peut pas
espérer devenir grand quand il est tombé aussi bas ; un Etat perd son
honneur quand il couvre des pratiques irrégulières, quand sa justice est
partiale, quand ses représentants abusent de leur position pour
s’enrichir ; une administration perd sa raison d’être lorsqu’elle
renonce à sa vocation de service public pour devenir un instrument entre
les mains des intérêts économiques et politiques des puissants du
moment. L’Algérie n’a jamais manqué de moyens, de bras ou de cerveaux.
C’est de bons dirigeants et d’une morale publique qu’elle a toujours
manqué. Tant de morts depuis Octobre 1988 pour rien ? Pour que des
individus s’infiltrent dans les rouages de l’Etat pour piller ses
richesses ? Pour qu’une bande de gangsters confisque les symboles de la
Révolution à son profit ? Pour imposer de mauvaises lois et bafouer les
bonnes ? Pour sacrifier tout un peuple afin d’épargner quelques
individus pervers ?
Le pays est en train de se laisser prendre dans une immense toile
d’araignée tissée par le clanisme et les intérêts personnels. Il faut la
déchirer, s’en dépêtrer, proclamer son refus, son rejet, sa condamnation
absolue de l’encanaillement et se libérer de la peur et de la lâcheté
comme l’ont fait ceux qui ont libéré le pays entre 1954 et 1962 et dont
ne peuvent absolument pas avoir fait partie ceux qui sont en train de
couler l’Algérie, de préparer sa recolonisation. Pourquoi l’écrasante
majorité d’entre nous sont pauvres alors que le pays regorge de
richesses naturelles ? Pourquoi nous taisons-nous devant l’impunité dont
bénéficient ceux qui ont pillé les dinars et les devises de la
communauté et continuent de le faire en plein jour à partir de positions
officielles ? Pourquoi sommes-nous dirigés par un homme cloué à un
fauteuil roulant en nous faisant croire qu’il recèle des pouvoirs divins
qu’aucun autre parmi les vivants ne possède ? Pourquoi lui et son
entourage ont-ils le droit de violer toutes les lois à commencer par la
Constitution, et nous l’obligation de respecter tout ce qui vient d’eux
au nom du respect de la loi ? La loi de la ruse, de l’intérêt personnel,
de l’humiliation, de l’indignité, de la destruction morale, politique et
économique de cette nation. Pourquoi acceptons-nous que le sigle du FLN
sous l’égide duquel la Révolution du million et demi de martyrs a été
menée soit piétiné à ce point, foulé aux pieds d’individus ne méritant
même pas le titre d’Algériens, que des ignorants, des corrompus et des
valets soient mis à notre tête et que nous en ayons peur plus que de
Dieu ? Réponse : parce que nous ne sommes plus que des lâches, tous tant
que nous sommes ! A moins que tout ce que je dis soit pure invention de
ma part.
N. B.
P. S. : Mme veuve Bennabi, née Khadidja Haouès, est décédée
mardi 9 juin 2015 à 11h30 en son domicile à Alger des suites d’une
longue maladie et a été mise en terre le jour même dans la discrétion
selon les vœux de la famille. La défunte rejoint ainsi son éminent mari,
mort le 31 octobre 1973, et achève une longue vie durant laquelle elle a
veillé sur Malek Bennabi de son vivant et sur sa mémoire après. Que sa
famille, qui est aussi la mienne, reçoive ici mes hommages attristés et
ma reconnaissance éternelle.
N. B.
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