Chronique du jour : Les choses de la vie
Les menteurs ont la vie dure !
Par Maâmar FARAH
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A
la veille de l'entrée des troupes US en Irak, et alors que beaucoup
d'amis éclairés saluaient la prochaine «chute d'un dictateur», nous
tenions un langage tout à fait à l'opposé des belles déclarations
d'intention qui survolaient le monde, grâce aux immenses moyens de
communication modernes au service de l'Empire. Nos cris n'allaient pas
plus loin que le bout du couloir de notre rédaction ! Certains nous
traitaient d'attardés, de révolutionnaires dépassés, d'adeptes de
théories du complot, et j'en passe. Nous disions clairement qu'il n'y
avait pas d'armes de destruction massive en Irak. Nous traitions Powell
de menteur. Un lecteur se révoltait dans une lettre postale : comment un
petit journaliste du tiers-monde peut-il remettre en cause des
déclarations officielles, dites sous le serment et devant les membres du
Conseil de sécurité ? Et lorsque le pauvre Powell, quelques années plus
tard, est venu, presque en larmes, demander pardon à la communauté
internationale, nos amis démocrates, amoureux de la «transparence»
américaine, n'avaient pas de commentaires à faire. Au même moment, de
grands quotidiens US publiaient des éditoriaux dans lesquels ils
présentaient leurs excuses à l'opinion américaine pour avoir appuyé une
guerre injuste, meurtrière et improductive et aussi pour avoir bêtement
cru les mensonges sur les armes de destruction massive. Dieu merci, avec
nos petits moyens et nos faibles connaissances, nous n'avons pas menti à
nos lecteurs !
A la même période, nous écrivions que l'Irak n'était que le prélude à
une immense manipulation qui va toucher d'autres pays. Le plan, concocté
dans les laboratoires de la pensée unique et de l'extrémisme sioniste,
coulés dans l'ultraconservatisme de la nouvelle droite au pouvoir,
prévoyait d'abattre tous les pouvoirs hostiles à Israël ou pouvant le
devenir à la chute des amis, nombreux, qui dirigeaient certains pays.
L'ennemi des Américains et des sionistes est la démocratie ! Oui, je
l'écris et le répète : leur ennemi mortel est la vraie démocratie, celle
qui libère les peuples de la tutelle des oligarchies et des valets de
l'impérialisme, celle qui combat pour le pain et la dignité, pour la
justice sociale, pour l'accès gratuit aux soins, pour un enseignement
ouvert aux démunis, pour une juste répartition des richesses nationales
! La démocratie, pour l'impérialisme et le sionisme, est un simple moyen
de mettre en place des régimes fidèles à leurs thèses, corrompus, prêts
à frapper toute idée d'émancipation et de justice ; des régimes qu'ils
tiennent par le bout de la laisse, afin qu'ils puissent servir leurs
intérêts à l'intérieur et à l'extérieur. Dès qu'un pouvoir opte pour une
autre voix, il est déclaré «dictatorial» ! C'est de bonne guerre, mais
ce qui fait mal c'est de voir, chez nous, des moyens d'information qui
croient en ces blagues et défendent les mêmes positions, consciemment ou
inconsciemment.
Tout en dénonçant la nouvelle guerre impérialiste en Irak, nous
avertissions : la prochaine étape sera la Syrie. Et nous expliquions que
le régime laïque et progressiste de Bachar El Assad, proche de l'Iran,
ayant de fortes relations militaires avec la Russie, n'était pas du goût
des faucons au pouvoir à Washington. Vous remarquerez que nous ne
parlons pas de «danger» car le véritable danger dans la région s'appelle
Israël ! C'est Israël qui est venu perturber la vie paisible des peuples
du Moyen-Orient et leur coexistence pacifique ! C'est Israël qui a
instauré un climat de guerre permanente et accéléré la militarisation
des sociétés ! C'est Israël qui occupe des terres étrangères, dont le
Golan, jusqu'au moment où j'écris cet article ! C'est Israël qui possède
la bombe atomique ! C'est au somment du pouvoir israélien que se
trouvent les hommes hostiles à la paix, racistes et arrogants, que
personne n'inquiétera et que nulle cour n'ira chercher pour leur
demander des comptes sur leurs crimes nombreux contre l'humanité ! C'est
Israël qui continue d'encourager la colonisation de terres qui ne lui
appartiennent pas et qui sont propriété de la Palestine ! Mais les
impérialistes ne voient aucun de ces «défauts». Le système est
démocratique, nous dit-on ! Deux partis, aux orientations idéologiques
qui se rapprochent chaque jour davantage, nourris aux mêmes idées
sionistes, dominent la scène politique et leur va-et-vient au sommet de
l'Etat, est suffisant pour déclarer le système «démocratique» ! Ajoutez
une folklorique transparence dans la communication de l'armée, quelques
procès retentissants pour corruption, et vous aurez le tableau, presque
complet, de cette farce gobée par des milliards de personnes... En
vérité, c'est une société où la liberté n'existe pas, où l'armée détient
le pouvoir absolu, où les gestes et paroles de chacun sont surveillés
pour cause de «sécurité nationale». C'est un pays théocratique, bâti sur
des idées extrémistes, soutenu par une riche communauté extérieure qui
exerce de terribles pressions sur des pouvoirs occidentaux, à tel point
que ceux qui ne font pas allégeance à Israël, n'ont aucune chance de
gagner des élections.
Israël n'est pas seulement servi par les impérialistes. Des régimes
arabes, des monarchies pour être plus précis, sont aux ordres de
Tel-Aviv. En façade, ils sont contre, mais dans les faits, ce sont les
plus fidèles serviteurs du sionisme. Pendant qu'Al Jazeera faisait
semblant de dénoncer la politique israélienne, son prince de l'époque
visitait Tel-Aviv et rencontrait Levni. Les Saoudiens investissent en
Israël et de nombreux richissimes hommes d'affaires du Golfe se rendent
sur la côte de la Palestine occupée pour leurs vacances. Ce sont des
faits authentiques. Nous écrivions à l'époque que la Syrie sera tôt ou
tard attaquée militairement parce que l'intérêt des impérialistes et des
sionistes est d'installer, à Damas, un régime à leur solde qui
facilitera, par la suite, l'accès à l'Iran. Ce que nous ne savions pas,
par contre, c'était que les nouvelles guerres imaginées par les mêmes
cabinets cités plus haut allaient avoir un visage tout à fait nouveau :
ni Israël, ni les Etats-Unis, ne vont faire la guerre en Syrie. Les lois
d'aide à l'opposition «modérée» sont vite votées et voilà le chemin
ouvert pour une agression barbare dont les images choquent le monde. Il
n'y a pas d'opposition modérée digne qui accepte d'être un instrument de
l'agression de son propre pays. Ce sont des traîtres et des renégats
formés dans les écoles de la CIA et qui sont vite effacés par la
formidable montée en puissance des groupes djihadistes radicaux !
Le monde, quand il n'est pas directement impliqué comme la France —
devenue, elle aussi, prosioniste —, est complice du génocide du peuple
syrien. La France aide les terroristes et est allée jusqu'à s'opposer à
l'inscription de groupe Al Nosra sur la liste des organisations
terroristes. Avant de céder. La Turquie joue un jeu trouble. Alors que
le pétrole volé par Daesh aux peuples irakien et syrien passe par son
territoire et que des milliers de djihadistes y transitent, le pouvoir
islamo-conservateur d'Ankara, qui entretient de très fortes relations
avec Tel-Aviv, joue au sauveur de Ghaza ! Daesh, c'est Israël et la
Turquie, sous l'influence directe de la CIA et la complicité sonnante et
trébuchante des traîtres arabes. L'ennemi commun demeure l'Iran.
L'Algérie qui n'a pas marché dans l'agression du Yémen (un autre front
anti-Iran) et qui maintient une position relativement indépendante par
rapport aux «toutous» arabes, ne semble pas avoir la force politique
nécessaire pour résister aux tentatives de déstabilisation qui peuvent
prendre différentes formes. L'absence d'un homme fort et physiquement
apte à la tête de l'Etat ne facilite pas les choses... Mais c'est déjà
une bonne chose que d'avoir gardé l'Iran comme ami.
M. F.
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