Actualités : CITÉE POUR LA SECONDE FOIS DANS LE DISCOURS OFFICIEL
DU POUVOIR
La méfiance de l’opposition
C’est pour la seconde fois de suite que l’opposition
a droit de cité dans les messages présidentiels. Après celui «peu
flatteur» qui lui a été réservé le 19 mars dernier à l’occasion de la
fête de la Victoire, l’opposition a eu droit à des fleurs et des égards,
avant-hier, dans le message présidentiel à l’occasion du 53e
anniversaire du recouvrement de l’indépendance nationale.
M. Kebci - Alger (Le Soir) -
Un «acquis» à «double tranchant» que l’opposition ne semble pas
apprécier, y décelant un argument de plus à leur constat de président
«impotent» et de vacance du «pouvoir». «Le message de Bouteflika n’est
que mensonge», lance tout de go le chargé à la communication du RCD qui
s’interroge aussitôt : «Qui peut encore croire en un chef d’État
impotent qui passe de la menace à l’encensement de l’opposition dans
deux discours qui lui sont attribués en l’espace de quelques mois ? Ceci
relève du délire, le croire est félonie.»
Pour Atmane Mazouz, cette attention du pouvoir à l’égard de l’opposition
est due au fait que cette dernière «dérange par ses positions, par ses
activités en communion. Comment accorder du crédit à cet intérêt pour
l’opposition avec deux positions diamétralement opposées en trois mois ?
Ce qui prouve toute l’impotence du président et de sa capacité
d’analyse. C’est une preuve de plus que la lutte des clans s’attise et
qu’on veut gagner du temps».
Du côté du MSP, on invite tout simplement le pouvoir à joindre l’acte à
la parole. Car selon son chargé à la communication, «trop de promesses
similaires ont été faites par le passé, mais sans qu’elles trouvent de
concrétisation sur le terrain». C’est à croire, ironise Zineddine Tebbal,
que le pouvoir évolue ailleurs, loin du pays puisque la réalité est
faite d’un embargo presque systématique de l’opposition de la part des
médias publics en sus de l’interdiction qui frappe ses activités. Et de
s’interroger : quel rôle veut-on faire jouer à l’opposition ?, estimant
que ces volte-faces portent un sacré coup à la crédibilité du pouvoir.
Quant au porte-parole du parti des Avant-gardes des libertés, cette
attention à l’apposition est un «non-événement». Ahmed-Adimi estime que
c’est juste «une toute petite phrase réservée à l’opposition. On
voudrait bien savoir qui sont ceux qui écrivent au nom du président et
ce qu’ils veulent : car une fois ils traitent l’opposition de trahison
et d’adopter la politique de la terre brûlée, et une autre fois cette
même opposition a un rôle à jouer. Qu’ils s’entendent d’abord entre
eux».
Pour notre interlocuteur, «on ne peut pas construire un Etat moderne
sans véritable démocratie. Il n’y a que deux régimes de par le monde :
dictatorial et démocratique et ce dernier a ses règles, ses normes et
ses us».
Pour sa part, Noureddine Bahbouh estime que «le pouvoir souffle le chaud
et le froid». Car explique-t-il, «on encense l’opposition seulement dans
les discours car dans les faits, c’est tout le contraire qui se passe
avec des interdictions systématiques des manifestations publiques de
l’opposition». Le secrétaire général de l’UFDS (Union des forces
démocratiques et sociales) ne manquera pas de s’interroger à son tour :
«De quelle opposition veut le pouvoir, d’une opposition qui lui jette
des fleurs ou d’une opposition véritable selon les normes universelles
?»
En tout état de cause, poursuivra-t-il, «ce message prouve que ses
rédacteurs ne savent pas ce qu’il faut faire dans la situation de crise
actuelle empreinte de déliquescence des institutions de l’Etat. Il
prouve que le pouvoir est en crise. Un message destiné à la consommation
externe puisque le pouvoir se rend compte que le peuple adopte de plus
en plus les positions de l’opposition». Et à Bahbouh de défier le
pouvoir : «Chiche qu’il ouvre un véritable débat, une vraie consultation
politique au sujet des problèmes qu’endure le pays».
Dans son message avant-hier samedi, la veille de la célébration du 53e
anniversaire du recouvrement par le pays de son indépendance nationale,
le président de la République a signifié toute sa considération envers
la classe politique et l'opposition, soulignant que le peuple algérien a
besoin de connaître les propositions alternatives prétendant améliorer
son devenir.
«En effet, le peuple algérien a besoin de connaître les propositions
alternatives prétendant améliorer son devenir, et il saura ensuite
choisir souverainement lors des rendez-vous électoraux de la
République», a déclaré Abdelaziz Bouteflika. «C'est-là le message que
j'adresse en ce jour de communion nationale, à la classe politique du
pays et au premier chef, aux acteurs de l'opposition à laquelle
j'exprime ma considération», a-t-il soutenu.
Une opposition que le chef de l’Etat juge «qu’elle est dans son rôle,
tout comme sera dans son rôle la majorité qui a porté mon programme
durant la campagne électorale et à laquelle il revient de le promouvoir
aujourd'hui dans le cadre du débat démocratique, pour semer l'espoir et
pour soutenir l'effort».
M. K.
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