Actualités : Paris 2015, In Aménas 2013 et les mauvais choix de Hollande
Par Hassane Zerrouky
«Huit frères portant des ceintures d’explosifs et des fusils d’assaut
ont pris pour cibles des endroits choisis minutieusement à l’avance au
cœur de la capitale française, le Stade de France lors du match des deux
pays croisés la France et l’Allemagne (…) le Bataclan où étaient
rassemblés des centaines d’idolâtres dans une fête de perversité ainsi
que d’autres cibles», lit-on dans un communiqué attribué à Daesh.
Ajoutant que «Paris a tremblé sous leurs pieds et ses rues sont devenues
étroites pour eux» (…) que «cette attaque n’est que le début de la
tempête et un avertissement…».
Au Stade de France justement, on voyait bien, vendredi soir, que les
joueurs français et, surtout, allemands, n’étaient pas dans le coup,
notamment en seconde mi-temps. Les Allemands, si réputés pour leur
rigueur de jeu, donnaient l’impression d’être ailleurs – festival de
passes ratées, dégagements à l’emporte-pièce – et côté français, malgré
les deux buts, ce n’était guère mieux. On voyait bien qu’informés de la
situation, les joueurs des deux camps avaient hâte que l’arbitre siffle
la fin du match. Et puis, chacun avait vu François Hollande quittant
précipitamment le Stade de France et chacun voyait des supporters des
deux camps, un œil sur le match et l’autre sur le smartphone, vivant
avec anxiété et inquiétude la situation. Surtout qu’il y avait des
enfants accompagnés de leurs parents au stade.
Après cette parenthèse – inutile de revenir sur ce carnage et cette
horreur innommable — de nombreux experts du renseignement mais aussi des
officiels français s’attendaient à une attaque terroriste mais ils ne
savaient pas quand elle se produirait. La France était prête à y faire
face, disait-on, comprendre que les services de sécurité français
étaient en mesure de déjouer des attentats. Aussi, dans le but de
rassurer les Français et les convaincre que l’Etat veille au grain, on
annonçait que des attentats avaient été déjoués.
Ainsi en était-il l’été dernier du projet d’attentat contre le fort
militaire de Port-Vendres dans le sud-ouest de la France ou celui plus
récent contre la base navale de Toulon. Des annonces souvent
accompagnées de discours légitimant l’intervention française en Syrie
présentée comme un cas de légitime défense puisqu’elle visait des
djihadistes français présentant une menace pour la France. Les médias
ont rapporté à ce sujet que le gouvernement français avait accordé à ses
militaires un «permis de tuer» hors du territoire français ! Une
information que les autorités françaises n’ont jamais démentie. Permis
de tuer ? Cette expression rappelle celle utilisée par George Bush «Dead
or Alive» (Mort ou vif) pour justifier sa «guerre contre le terrorisme»
et on sait où cela a conduit puisqu’aujourd’hui on en constate les
effets désastreux au Proche-Orient. Mais tout à sa politique de
reconquête de l’électorat français à quelque 15 mois de l’élection
présidentielle, François Hollande, reconverti en chef de guerre, croyait
ainsi gagner des points, voire remonter sa cote de popularité et battre
le moment venu ses adversaires de droite à l’issue du scrutin
présidentiel de 2017. Pour ce faire, quoi de mieux que montrer
bruyamment ses muscles. Le mieux aurait été qu’Hollande agisse
discrètement contre ceux qui, selon lui, préparent leurs attentats à
partir du territoire syrien. Et surtout, qu’au lieu de se focaliser sur
Bachar Al-Assad, qui aura un jour des comptes à rendre comme cela avait
été le cas pour Milosevic, il fallait empêcher que des jeunes Français
se rendent en Syrie – Paris le savait et a laissé faire du moment que
ces jeunes allaient faire le «djihad» contre Bachar – et ne pas
s’aligner sur les monarchies pétrolières qui sont pour quelque chose
dans l’ascension de l’Etat islamique (Daesh) et dont on sait qu’elles
souhaitent voir s’instaurer un régime islamiste en Syrie. Dans cette
affaire, disons-le, Hollande a fait les mauvais choix.
Concluons sur la prise d’otages de Tinguentourine (In Aménas) le 16
janvier 2013 (37 otages tués). Et souvenons-nous des critiques des
médias européens, notamment français, et anglo-saxons, à propos de
l’assaut des forces spéciales algériennes lors de la prise d’otages du
site gazier d’In Aménas. Il s’écrivait (et se disait) alors que les
forces spéciales algériennes manquaient de professionnalisme, de
compétence et n’étaient donc pas préparées à ce type d’opération puisque
l’assaut s’est conclu de manière sanglante ! Vendredi, au Bataclan, les
policiers français, confrontés à une prise d’otages et à une tuerie
innommable, n’avaient que peu de choix : l'assaut a été décidé «très
vite parce qu'ils tuaient tout le monde», confiait un policier. Bilan :
plus de 80 morts et des centaines de blessés dont beaucoup dans un état
grave dans le seul Bataclan.
Les Algériens savaient qu’une attaque se préparait, lisait-on à
l’époque. Les Français savaient aussi que des attentats allaient être
perpétrés sur le sol français. Mais ni les Algériens en 2013, ni les
Français en 2015 ne connaissaient le lieu, la date et l’heure.
H. Z.
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