Sports : Contribution
Performance, quelle autre recette ?


«La discipline est mère de succès.»
(Eschyle)

Pourquoi les choses ne fonctionnent pas aujourd’hui comme nous l’aurions souhaité ? La formation est-elle défaillante ? Pourquoi n’arrive-t-elle pas à assurer, à former l’athlète dont nous avons tant besoin, le plus représentatif ? Sommes- nous redevenus si médiocres, incapables de produire, d’engendrer la moindre satisfaction dans cette Algérie qui a vu naître des générations de footballeurs au grand talent ayant chacune marqué nettement son
époque ? Le contexte ne s’y prêterait-il pas aujourd’hui ? Il est vrai qu’autrefois les choses étaient plus simples. On arrivait au football sans arrière-pensée, on y jouait sans calcul, sans visée précise, sans tenir compte de l’impact que pouvait susciter la pratique de cette discipline.
Et cet état d’esprit qui dénotait un environnement bon enfant offrait de multiples avantages, il y était partout présent, laissant grandes ouvertes les portes du succès. Les Madjer, Belloumi, Assad, Kaci Saïd ont déjà démontré l’utilité d’une telle atmosphère et avant eux les Lalmas, Khalem, Seridi qui brillèrent de mille feux en prenant le soin de préserver cette pratique des facteurs compromettants. Et puis l’argent fit son apparition, à profusion, censé contribuer à l’effort sportif dans toute son étendue. Engagé pour permettre l’émergence d’acteurs performants et de meilleure qualité, l’argent n’a pas assuré l’avantage que nous attendions de lui. Pis, devenu source de problèmes, il réussit à altérer la nature de cette pratique sportive. D’où la question : comment le football se portait-il quand l’argent était absent ? Pourquoi Lalmas et d’autres joueurs de renom ont-ils pu exister dans cette ambiance où l’argent se faisait rare et qui ont eu, en ces temps, à défrayer la chronique en matière de qualité de jeu jusqu’à détenir, pour le cas de Lalmas Hassen, le titre de maître du football africain et plus tard l’émergence de joueurs hors pair notamment ceux qui ont pris part à la campagne espagnole en 1982 (Mondial) où ils purent s’illustrer de si belle manière ?
A chaque touche, on voyait l’acte créateur, celui de Lalmas, de Selmi, de Madjer, de Bencheikh et de tous les autres. Ils ont signé une page héroïque de ce football qui a cessé d’exister de nos jours et avec lui toute une culture qui dut -faute d’entretien- céder la place à une tout autre, éthiquement dépréciée, où prédomine l’intérêt. Le responsable porte un nom, c’est l’argent mis entre les mains de personnes qui n’en ont pas fait bon usage. Si bien que contraint au contournement, notre football semblait se dissocier de cet esprit de sacrifice qui montrait il n’y a pas si longtemps comment on peut, si on désire, faire avancer les choses. Tous les anciens, au risque de nous répéter, connaissent bien le football algérien et ses mécanismes puisqu’ils en sont les précurseurs, mais ils sont là malheureusement à surplomber cet univers qui a cessé d’être le leur et qui leur est désormais étranger.
Notre football, notre championnat sont-ils frappés de malédiction ? L’on est tenté de s’interroger sur ce qui apparaît comme un phénomène dont on semble se soucier peu des conséquences qui en résulteraient ? L’espoir d’une équipe nationale conquérante, stable, avec les mêmes éléments constitutifs est-il permis ? Les joueurs issus du championnat national peuvent-ils garder l’espoir d’un avenir meilleur ? Peuvent-ils y croire vraiment ? La chance qu’on a accordée aux joueurs d’outre-mer appelés à renforcer cette équipe nationale, la fédération peut-elle renouveler l’expérience avec les joueurs issus du championnat professionnel national en leur accordant la possibilité de montrer ce qu’ils savent faire ? Pourquoi retirons-nous d’une main ce que nous essayons d’en montrer d’une autre ? Je peux citer un exemple, à même de nous fixer quant à la force de tel joueur par rapport à celle d’un autre, en l’occurrence Benzia (au fait pourquoi lui et pas Hani de l’école belge ?) comparé à Darfalou (USMA).
Ces joueurs évoluent en attaque et au même poste. Si Benzia mit du temps à s’imposer et à s’illustrer dans son club (aveu du joueur), en revanche Darfalou n’eut aucune peine à s’imposer en sélection des U23, à se draper de l’habit de titulaire dont on ne peut se passer de ses services sitôt intégré. N’a-t-il pas montré des aptitudes en terre sénégalaise qui forcent le respect, à l’instar de l’autre joueur de l’USMA disparu de la scène pour dopage et dont les qualités footballistiques auguraient d’une place de meneur de jeu en équipe nationale. Et n’allez pas dire que leurs championnats respectifs ne se ressemblent pas, c’est pareil ! Belfodil, Taider, Mansouri (aujourd’hui manager), Yebda, Lacen et bien d’autres ont-ils apporté le plus, souhaité, leurs qualités footballistiques étaient-elles particulières ? Nos passages en phase finale de la coupe d’Afrique ne furent-ils pas en deçà de nos espérances, quatre buts encaissés face aux Égyptiens et trois autres buts face à la modeste équipe de Malawi, une équipe algérienne pourtant truffée de joueurs formés à l’étranger ! On peut inlassablement abonder dans ce sens pour tenter de comprendre d’autres cas, celui par exemple de la non-convocation de Koudri, Benkhamassa de l’USMA, de véritables battants, très sérieux dans le jeu et qui peuvent beaucoup apporter dans les compétitions africaines, d’autres jeunes (à l’image de Benguit/PAC) qu’on devrait dès à présent mettre dans le bain, aguerris, prêts à en découdre pour peu qu’on leur accorde un peu d’attention. Ces joueurs qu’on s’obstine à ramener de l’étranger vont-ils enfin se décider à nous offrir une coupe d’Afrique ? Le produit local l’a déjà fait ! Les matchs contre l’équipe d’Ethiopie peuvent servir de test à ces jeunes qui ne demandent qu’à être enrôlés pour montrer de quoi ils sont capables.
Un contact qui se veut stimulateur face à une équipe d’Ethiopie qui ne fait pas figure de favori. Une chance pour laisser une trace de sa volonté à promouvoir le produit local, de rassembler pour tenter d’innover ? Alors que presque tout l’en détourne, le joueur local continue à croire en ses chances, en ses possibilités de gagner un jour sa place en équipe nationale.
A la fédération de ne pas renoncer à garder un œil sur les performances du produit local et à faire en sorte que le ressentiment (amer) que peuvent susciter de telles situations soit facile à surmonter. Quand toutes les tendances, toutes les idées d’ici et d’ailleurs se mettront à coexister, à s’accepter mutuellement, à œuvrer conjointement pour le bien de notre football, les problèmes ne resteront assurément pas sans solutions. On aura enfin compris que la discipline est passée par là !
Abderrahmane Zerouati



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