Culture : Générale de la pièce Le député respectable du TRC
Rédha Houhou revisité
Revisiter une œuvre réfléchie et adaptée à la scène
dès le début des années 1950 par l’un des pionniers du théâtre algérien
n’était pas en soi une mince besogne pour le talentueux metteur en scène
Karim Boudechiche qui récidive avec la détermination du porte-étendard
de cette nouvelle génération du TRC mais néanmoins avec une conviction
affichée pour un challenge qui ne lui était pas prédestiné. Confié dans
un premier temps à Hassan Boubrioua qui abandonna le navire dans de
mornes circonstances, Le député respectueux revient sur les planches, 70
ans après le supplice infligé par les forces coloniales à son géniteur,
Ahmed Reda Houhou. Inspirée du Topaze de Marcel Pagnol et exécutée par
la troupe El Mazher El Kassentini au milieu du siècle dernier le député
respectueux n’a pas pris de rides.
Réactualisant la verve satirique qui fut une marque de fabrique du
Théâtre régionale de Constantine et à un degré moindre l’engagement par
l’expression théâtrale, la pièce réhabilite un tant soit peu, un genre
qui donna ses lettres de noblesse aux planches de la capitale numide.
Signes d’une ambition d’un retour aux sources, les présences
charismatiques de Antar Hellal et Abdallah Hamlaoui qui n’ont eu guère
besoin de tenir les rôles prépondérants pour donner de l’allant aux
jeunes comédiens qui s’en donnèrent allègrement aux situations loufoques
et au jeu en général. Et pour ne guère déroger au burlesque, quoi de
mieux qu’une musique inspirée du cinéma muet pour accompagner la mimique
du Charlot de la troupe, Djamel Mezouari en l’occurrence, qui égaya
l’assistance et installa une complicité sans faille avec ses compères
Adel Hamlaoui, Hassan Boulekhrouf, Sabrina Korichi, Najla Tarli, Nabil
Messahel, Naouel Aouag, Mohamed Delloum, Mohcen Samir et Oujaoua Rabïa.
Le député respectueux met l’accent sur l’immoralité d’une élite présumée
et se prête à une actualité brûlante. Abus de pouvoir, passe-droit,
corruption et déliquescence de mœurs à l’école comme dans
l’administration ou encore dans les instances élues sont mis en évidence
à travers le parcours sinueux d’un instituteur promis aux
reconnaissances d’exemplarité mais qui subira l’exclusion et ses
déboires pour avoir récusé le chantage d’un supérieur hiérarchique peu
scrupuleux. Déboires qui le conduisirent dans les griffes d’une félonne
au service d’un édile peu honorable.
Savamment orchestré par les deux acolytes, le piège eut raison des
convictions de l’éducateur qui succomba au chant des sirènes et devint à
son tour un magnat des malversations qui saignent les deniers publics.
Sa voracité grandissante l’emmena à son tour à venger son propre martyre
et faire de son mentor un souffre-douleur en l’évinçant de l’empire
sulfureux qu’il avait bâti. L’élève dépassant le maître, l’instit qui
récusait le fait que l’injustice consolide le socle du pouvoir, héritera
du trône du député déchu. Fricoteur alors, il reçut enfin sa médaille du
mérite promise des mains du directeur qui l’avait répudié, venu
celui-ci, lui prêter allégeance, quémandant quelques dividendes.
K. G.
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