Actualités : Que fera Sellal le 16 avril à Constantine ?
Les artisans de l’échec dans l’expectative
Antichambre de toutes les ascensions carriéristes,
sourira-t-elle encore aux aspirants parmi son exécutif et ses cadres ?
Rien n’est moins sûr devant l’incommensurable gâchis dont ils se sont
rendus coupables sur des terres qui ne portent pas en elles une
malédiction divine, mais certainement un blasphème fait homme.
Constantine ! «Elle est une présence, un rêve qui continue. A ses
genoux, les mots sont de pauvres courtisans. Le doigt de Dieu s’est posé
par ici et la main de l’homme ne peut que s’élever pour cette ovation
qui, à son paroxysme, avoue déjà son impuissance», écrivait Malek Haddad
il y a déjà un demi-siècle.
Rêve trahi d’un poète éperdument épris de son rocher. Constantine ne
compte plus ses échecs, plutôt, ceux de ses intendants. Pallier
l’incompétence par le mensonge était devenu le modus operandi par
excellence de ses autorités, ses édiles et autres rastaquouères qui
s’affairent ces derniers jours à exhumer l’ornement de la dépouille. Une
feuille de vigne asséchée qui craque au premier zéphyr. Le folklore qui
avait précédé le lever de rideau sur l’évènement qui allait, disait-on
il y a une année, restituer à la capitale numide ses lettres de
noblesse, est reconduit à la veille de ce 16 avril telle une galéjade à
répétition.
Le gouvernement qui sera partiellement présent à Constantine samedi
prochain pour l’extinction des projecteurs sur «la capitale de l’Année
de la culture arabe» fera-t-il part de son désappointement devant tant
de gaspillage de deniers publics pour des résultats quasi nuls ou bien
ménagera-t-il encore ses représentants locaux qui ont lamentablement
échoué ? Une débâcle qui fait l’unanimité parmi les Constantinois
longtemps bernés par la promesse de lendemains radieux pour la cité et
ses âmes.
Engagements maintes fois ressassés par le premier responsable de la
wilaya qui eut le privilège de patronner un projet exceptionnel doté
d’une manne rarement allouée par l’Etat. Le scepticisme manifesté, y
compris par les observateurs les moins avisés, quant à la concrétisation
de la foultitude de chantiers annoncés pour l’échéance du 16 avril 2016,
est balayé du revers de la main par Hocine Ouadah himself qui persiste à
ce jour à assurer que tous les objectifs ont été atteints au moment où
plus de 50% des opérations promises sont en souffrance ou carrément à
l’abandon. Jardin botanique, Pavillon des expositions, musées,
bibliothèque, réfections et réhabilitation des salles de cinéma, des
mosquées antiques, des vieux édifices, de la ville ancienne… une liste
de la démesure encore plus longue des chantiers en peine qui trahissent
les serments non tenus du wali qui fut relayé de manière solennelle à
une certaine époque, notamment par les ex-ministres Khalida Toumi et
Nadia Labidi.
L’opportunité donnera, en effet, le coup de starter à une course
effrénée entre prédateurs déjà dans le circuit fermé des malversations
et une nouvelle caste de postulants pour des marchés juteux puant la
corruption. Peu importe les qualifications des uns et des autres, le
morcellement des opérations était à même de satisfaire tout le monde
alors que l’administration n’avait, elle, ni les compétences, ni les
moyens humains pour assurer un suivi rigoureux des travaux. La ville est
plongée alors dans un désordre indescriptible pendant plus de deux
années. Une période jalonnée par des sorties périodiques de l’exécutif
sur le terrain et à travers les médias médisant effrontément les retards
considérables, les travaux bâclés et leurs surcoûts prohibitifs et
récusant l’irrégularité des transactions avec les néo-entrepreneurs
devenus maîtres de la cité.
La tromperie était pourtant criarde notamment quand le chef de
l’exécutif sermonnait sans ménagement les préposés aux réalisations en
brandissant à chaque occasion la menace de remplacer tout ce beau monde
par les Chinois sans jamais passer à l’acte. Car au milieu du chaos
résultant, les entreprises chinoises avaient réussi des prouesses dans
les délais impartis, le Novotel et la grande salle de spectacles
Ahmed-Bey. Ceci, au moment où les réhabilitations du Palais de la
culture Mohamed-El Aïd-El Khalifa et la Maison de la culture
Malek-Haddad ont coûté plus cher que de nouvelles acquisitions plus
imposantes. Tout sera recentré sur le parcours protocolaire
qu’empruntera le cortège du Premier ministre à quelques jours de
l’échéance. L’écran de vinyle en trompe-l’œil qui lui est offert
abusera, le temps d’un passage, les visiteurs.
Abdelmalek Sellal qui était revenu dans sa ville natale s’enquérir du
sort de «l’offrande» du Président s’était accommodé des mirages auxquels
l’on avait greffé, question de combler le vide, des réalisations
relevant du programme de développement local. Certes, ces derniers
impactent significativement le vécu des Constantinois et constituent un
pôle d’intérêt des préoccupations du chef de l’exécutif mais pour la
circonstance, un premier audit de la destination des 6 000 milliards de
centimes alloués à la wilaya hôte de la manifestation «Constantine
capitale de la culture arabe» afin de la débarrasser de ses haillons
devait déjà avoir lieu à cette époque. Et ce n’était que partie remise.
Une année plus tard, les mêmes scenarii sont reproduits à la veille de
ce 16 avril marqué par une frénésie inhabituelle.
Des collectivités locales, y compris celles qui ne sont pas concernées
par le programme de visite du Premier ministre, sommées ouvertement de
consentir tous leurs efforts et moyens dans l’embellissement de
l’itinéraire tracé pour cette visite. Programme communiqué à la presse
locale près de 20 jours avant la visite en question, ce qui est inédit
en soi pour un tel évènement et qui ne recèle en termes d’inaugurations
et inspections que trois haltes inhérentes aux chantiers inscrits dans
le cadre de la manifestation qu’il clôturera le même jour sur une
vingtaine de points indiqués. L’objectif étant vraisemblablement la mise
en avant des acquis qui seront lancés et/ou réceptionnés à l’occasion de
cette visite, lesquels de par leur importance seraient à même de faire
oublier le sort des projets en souffrance. Aussi, le parcours
traditionnel des officiels au centre-ville connaît également les
badigeonnages à tout-va alors que les bâtisses qui ont subi de graves
dégradations et effondrements du fait des travaux dits de réhabilitation
ont été abandonnées à leur sort sans qu’une voie de l’administration
voire celle de son premier ordonnateur ne s’élève pour rappeler à
l’ordre les pseudo-entrepreneurs qu’ils ont eux- même payés, insoucieux
qu’ils sont des supplices qu’ils font endurer à des dizaines de familles
otages depuis plus de deux ans des échafaudages et amas de pierrailles,
gravats et détritus hétéroclites. Le cas du petit immeuble de la rue
Bouderbala qui ne regroupe pas plus de quatre habitations et un
commerce, jouxtant pourtant le Palais de la culture qui a absorbé
plusieurs centaines de milliards en aménagement, partiellement anéanti
et odieusement défiguré puis délaissé à ses occupants menaçant ruine
avec des conséquences périlleuses qu’ils encourent chaque jour que Dieu
fait, est édifiant à plus d’un titre.
Des plaies béantes que Sellal ne verra pas lors de son prochain périple
constantinois tel des pans entiers de la cité qui croulent sous les
ordures et une vieille ville qui se sépare d’une partie de son âme à la
moindre averse. Il s’en ira avec sa délégation par contre, entourés des
artisans de l’échec, officier à une cérémonie de clôture que l’on veut,
aussi éclatante que l’artifice lâcher il y a tout juste une année pour
une manifestation qui aura desservi Constantine et toute sa région plus
qu’elle n’a profité à la prédation et au règne de la médiocrité et de
l’incompétence.
L’échec n’était pas l’apanage des seules autorités locales, le
commissaire de la manifestation Samy Bencheikh El Hocine et son alter
ego Lakhdar Bentorki, qui ont brillé par leur absence durant la majeure
partie de la manifestation sous couvert des charges professionnelles qui
sont les leurs, ont imprégné un caractère éminemment folklorique à
l’évènement, multipliant les ratages, la mauvaise gestion du temps, des
espaces et des fonds tout en reléguant la chose culturelle proprement
dite au second plan et en faisant du copinage et du clientélisme un
critère primordial dans toute leur activité. Ce dernier termine
d’ailleurs son année avec une cinglante note qui fait de lui persona non
grata dans la ville des ponts puisqu’une pétition qui connaît une large
adhésion des intellectuels, universitaires, artistes et personnalités de
Constantine exigeant des excuses publiques de sa part ainsi que son
départ suite à ses déclarations au forum du journal Echourouk jugées
dégradantes et insultantes à l’égard des Constantinois.
K. G.
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