
Actualités : Il conditionne cela à un accord entre États
Le Musée de l’Homme de Paris se dit «prêt» à restituer les 36 crânes de
chouhada de la résistance algérienne
Le Musée de l’Homme de Paris s’est dit hier «prêt» à
examiner «favorablement» la demande de restitution des 36 crânes de
chouhada, résistants algériens morts au champ d’honneur au début de la
colonisation française, conservés depuis plus d’un siècle.
«Nous sommes prêts à examiner favorablement la demande de restitution
des crânes des Algériens, conservés dans notre musée», a affirmé hier
dans un entretien à l’APS le directeur des collections au Muséum
national d’histoire naturelle (MNHN) de Paris, Michel Guiraud, qui a
souligné qu’il n’y a «aucun obstacle» juridique pour leur restitution.
Ces restes sont «nommés» (identifiés), donc «nous les considérons
forcément qu’ils peuvent sortir du patrimoine et nous attendons
seulement des décisions politiques», a-t-il précisé, avertissant qu’il y
a cependant «un chemin à prendre» sur le plan procédural pour que la
demande soit prise en considération.
«Pour leur restitution, il y a un chemin à prendre. Nous reconnaissons
le droit de la famille et celui des descendants relayés par leur Etat»,
a-t-il dit, soulignant que les demandes «doivent passer par le canal
diplomatique et non pas par une association qui n’a pas un droit
particulier par rapport aux restes humains».
Une pétition a été lancée, rappelle-t-on, en ligne pour la restitution
de ces restes, dont l’objectif est de les rapatrier en Algérie pour «y
recevoir une digne sépulture».
La pétition, qui avait déjà été lancée en 2011 mais restée sans suite, a
collecté, à la date du 7 juin 2016, environ 1 600 signatures.
Le directeur des collections du Muséum, qui a indiqué par ailleurs que
la grande majorité des restes humains conservés au musée proviennent de
France, a démenti l’information faisant état d’une mal conservation des
36 crânes de résistants algériens.
«Nous rejetons en bloc l’argument que les restes sont mal conservés.
Ils sont conservés dans ces boîtes neutres, qui sont d’ailleurs chères,
pour éviter toute détérioration», a-t-il affirmé, soulignant que tous
les restes humains sont conservés «de la même façon» et «selon les
normes de conservation».
Les 36 crânes, des dons provenant de médecins militaires à l’époque de
la colonisation, sont effectivement conservés dans des boîtes de carton
appropriées entreposées dans une armoire métallique fermée
hermétiquement, a constaté le journaliste de l’APS sur place.
C’est dans une déclaration à l’APS, en 2011, que le chercheur en
histoire, l’Algérien Ali Farid Belkadi, avait révélé, rappelle-t-on, que
les restes mortuaires d’Algériens, ayant résisté à la colonisation
française au XIXe siècle, avaient été retrouvés au MNHN de Paris.
Spécialiste de l’histoire antique et de l’épigraphie libyque et
phénicienne, qui s’intéresse également à la période coloniale, M.
Belkadi avait précisé que certains fragments de corps étaient conservés
au MNHN de Paris, depuis 1880, date à laquelle ils sont entrés dans la
collection «ethnique» du musée.
Les restes, des crânes secs pour la plupart, appartiennent à Mohamed
Lamjad Ben Abdelmalek, dit Cherif «Boubaghla», au Cheikh Bouziane, le
chef de la révolte des Zaâtchas (région de Biskra en 1849), à Moussa El-Derkaoui
et à Si Mokhtar Ben Kouider Al-Titraoui.
La tête momifiée d’Aïssa El-Hamadi, qui fut le lieutenant du Cherif
Boubaghla, fait partie de cette découverte, de même que le moulage
intégral de la tête de Mohamed Ben-Allel Ben Embarek, lieutenant de
l’Emir Abdelkader.
En 2011, le directeur des collections au MNHN, Philipe Mennecier, (parti
à la retraite), avait également confié à l’APS que «rien n’empêcherait
le rapatriement de ces restes mortuaires».
«Il suffit que la partie algérienne en formule la demande», avait-il
affirmé, précisant que «seul un accord entre l’Etat algérien et l’Etat
français pourrait faciliter la démarche de rapatriement».
APS
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