Actualités : Le pays perd plus qu’il ne gagne avec cet espace économique régional
L’Algérie doit-elle quitter la Gzale ?


L’accord de l’Algérie avec la Grande zone de libre échange arabe (Gzale) ne profite pas à notre pays, c’est le moins que l’on puisse dire après le constat fait par l'Agence nationale de promotion du commerce extérieur (Algex). Un travail d’évaluation de cet accord est en cours sous l’égide du ministère du Commerce.
Younès Djama - Algérie (Le Soir) - Selon les chiffres d’Algex, repris par l’APS, la balance commerciale de l'Algérie avec cet espace économique régional a affiché un déficit de 351 millions de dollars en 2015, contre un excédent de plus d'un milliard de dollars en 2014.
En plus, les exportations algériennes vers les pays de cette zone ont reculé de plus de 40% en 2015 comparativement à l'année d'avant. Ce qui relance l’idée de sortie de cette zone déjà évoquée par le ministre du Commerce à plusieurs reprises.
Lors d’une rencontre au début de cette année avec les exportateurs algériens, Bakhti Belaïb a dressé un bilan plutôt négatif des accords que le pays a conclus avec la Gzale, en incitant ces derniers à s’orienter vers les pays africains.
«On avait oublié de signer ces accords avec des pays dont les marchés offrent plus d’opportunités à la production nationale», a admis Belaïb exhortant ses interlocuteurs à lorgner vers la création de zones de libre-échange avec les pays où les produits ont de fortes chances d’être mieux placés.
Par la même occasion, Belaïb a incité les exportateurs à suivre l’exemple de pays voisins, notamment le Maroc, où les exportateurs réclament des zones de libre-échange avec les pays qui leur offrent des potentialités réelles de placement de leur production.
A l’occasion, le ministre a annoncé que ses services avaient entamé un travail d’évaluation de l’ensemble des accords signés avec les partenaires de l’Algérie, et à la lumière de ces bilans, la partie algérienne envisagerait de voir avec ses partenaires quels sont les ajustements qu’il va falloir introduire. «Si le bilan d’un accord d’association conclu avec un ou des pays ne s’est pas déroulé selon les promesses pour lesquelles il a été conclu, il est, à ce moment-là, du droit d’une des parties de se retirer», avait relevé Belaïb, ajoutant que ses services étaient en train d’agir en vue d'aller vers la création de zones de libre-échange avec des pays africains limitrophes à même de donner une chance à la production nationale.
L’expert Smaïl Lalmas avait estimé, dans une déclaration à notre journal, que l’Algérie était «victime» de ses accords, que notre pays rentier, dont l'économie est à tendance import par excellence, signe des accords permettant à ses partenaires d'envahir son marché sans payer les droits de douane, sachant qu'en contrepartie, on ne profite pas de ce dispositif puisqu'on n’exporte rien. Ou presque. L’Algérie pourra-t-elle demander de quitter cet espace régional économique du fait qu’elle y perd plus qu’elle ne gagne ?
Selon M. Lalmas, une suspension des accords devrait passer par des négociations avec les partenaires, du fait que le pays a pris des engagements qu'il est en devoir de respecter. Ceci étant dit, l’expert pense qu’en cas de déséquilibre, ce qui est le cas, il est légitime pour l’Algérie de revoir ces accords et même les geler «le temps de corriger les choses».
La sortie de cette zone ne se fera pas ressentir dès lors que le volume des échanges entre l'Algérie et les pays de la Gzale, qui s'est établi à 4,8 milliards de dollars en 2015, ne représente que 4% du total des échanges commerciaux de l'Algérie avec le monde.

Les exportations en chute
Les exportations algériennes vers les pays de la Gzale ont reculé de plus de 40% en 2015 comparativement à 2014. Les exportations algériennes des hydrocarbures vers cette zone ont fortement baissé à 2,1 milliards de dollars en 2015 contre 3,5 milliards de dollars en 2014 (-40%) en dépit d'une augmentation importante des volumes vendus (+40%).
Les exportations hors hydrocarbures (HH) ont également chuté de 52% à 121 millions de dollars, en raison notamment d'une baisse de 70% des ventes de sucre à près de 48 millions de dollars.
Représentant près de 60% des exportations HH vers la Gzale, les produits agricoles et agro-alimentaires ont reculé à 71,5 millions de dollars (-60%), sachant que le sucre en représente 67%, alors que le reste se compose essentiellement de dattes (5 millions de dollars), de truffes (4,2 millions de dollars), des eaux minérales et gazéifiées (3,5 millions de dollars), de pâtes alimentaires (2,1 millions de dollars) et de yaourts (2,1 millions de dollars).
Les produits industriels ont représenté, quant à eux, 40% des exportations algériennes HH vers cette zone avec un montant de 49,4 millions de dollars (-35%) dont 18,8 millions de dollars d'exportations d'ammoniac. En termes de clients, 71,7% des exportations algériennes HH vers la Gzale ont été destinées à la Tunisie, au Maroc, au Liban et à la Syrie.
Ainsi, la Tunisie a été le premier client de l'Algérie en ayant absorbé 32% des exportations HH globales algériennes vers la Gzale, soit une valeur de 39 millions de dollars dont 27% pour le sucre, 20% pour le verre plat, 8% pour les eaux minérales et gazéifiées, 8% pour les dérivés sulfonés et 5% pour les jus de fruits.
Le Maroc a été le deuxième marché avec 18,3% des exportations HH algériennes vers la Gzale, composées d'ammoniac (81%), dattes (9%), verre plat (3%) et de verre de sécurité (3%).
Quant au Liban, il a drainé 11% des exportations algériennes HH, suivi de la Syrie (10%) et de l'Arabie Saoudite (5,6%).
Les importations algériennes depuis cette zone ont légèrement baissé en 2015 en s'établissant à 2,5 milliards de dollars, contre 2,6 milliards de dollars en 2014, soit une baisse de 4,2%.
Les produits industriels importés depuis la Gzale, d'une valeur de 2,3 milliards de dollars, ont reculé de 4%, tels les transformateurs électriques, les fils et câbles électriques, le fil de cuivre, les médicaments et les matières de plastique.
Pour les produits agricoles et agro-alimentaires, leurs importations ont baissé en passant à 274 millions de dollars contre 291 millions de dollars (-6%). Il s'agit essentiellement de légumes à cosse secs, tabacs, jus de fruits, graines des épices, sucreries, légumes conservés et fruits secs.
Les importations de produits de la pêche ont progressé de 2% enregistrant une valeur de 9,8 millions de dollars en 2015 contre 9,6 millions de dollars en 2014.
Durant l'année 2015, les principaux fournisseurs de l'Algérie au sein de la Gzale ont été l'Arabie Saoudite (24% des importations algériennes), l'Égypte (19%), la Tunisie (17%), les Emirats arabes unis (13%) et le Maroc (8,3%). A rappeler que la création d'une Grande zone arabe de libre-échange avait été décidée par le Sommet arabe d'Amman en 2001.
La Gzale prévoit une suppression totale des droits de douane entre les pays signataires de l'accord, visant à dynamiser et à contribuer à l'augmentation des échanges commerciaux interarabes.
Y. D.



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